La Réunion connait une grave crise sociale depuis vendredi 16 novembre. Là encore, ce sont les "gilets jaunes" qui ont lancé le mouvement. Mais, ils ont été débordés par un grand ras-le-bol social. Outre une paralysie totale de l'île, les manifestations ont dégénéré avec des pillages et des affrontements avec les forces de l'ordre. On compte une trentaine de policiers blessés.
Face à cette "grogne" (euphémisme), le Président de la Région a donc décidé de geler les taxes sur les carburants qui n'augmenteront donc pas pendant les 3 prochaines années. "J'ai demandé au Gouvernement, à la Ministre des outre-mer en particulier avec laquelle je me suis encore entretenu cet après-midi, une dérogation pour La Réunion sur l'augmentation de la taxe sur les carburants pour les trois prochaines années" déclare Didier Robert.
"J'ai dû me battre pour obtenir ce résultat" ajoute-t-il, tout en soulignant le rôle de l'Etat qui a donné son accord. "La Région ne peut pas intervenir seule dans l'évolution de la fiscalité des carburants, liée à la transition énergétique et inscrite dans le cadre de la PPE (*). Il a fallu prendre le temps d'amener cette solution en discutant avec l'Etat".
Evidemment, cela a fait réagir en Métropole où certains dirigeants politiques ont appelé à des mesures similaires. De quoi calmer une partie des gilets jaunes sans doute. Oui, mais...à la Réunion, comme dans les autres DOM, il n'y a pas de TICPE. C'est la taxe spéciale sur la consommation des carburants (TSCC) qui est en vigueur. En effet, la situation insulaire fait qu'il faut importer les carburants et que cela renchérit leur coût.
Situation différente en Métropole
A la Réunion, le carburant vient de Singapour. Ajouté au prix du carburant importé la marge du port, des transporteurs, etc. il y a enfin la TSCC. La TVA n'est pas appliquée sur les carburants réunionnais. Cette TSCC est fixée par la Région, dans le cadre de la loi. La région a augmenté la TSCC en janvier dernier dans le cadre de la convergence des taxes entre diesel et essence. A la Réunion, cette convergence n'interviendra pas avant 2025.
Malgré un dispositif spécial, le gazole a connu une forte hausse récemment, et une hausse de la taxe en janvier. Cette hausse votée par la région, ainsi que le renchérissement du pétrole jusque mi-octobre a mis le gazole à 1,20 €/l environ. Le SP95 pour sa part s'affiche à des prix proches de ceux de la Métropole (environ 1,50 €/l).
Sauf que le niveau de vie de la Réunion n'est pas le même qu'en Métropole. Le taux de chômage est très important. Un quart (23% en 2017) des habitants y est sans emploi ! 40% des Réunionnais vivent en-dessous du seuil de pauvreté. Les prix, de par la situation insulaire sont eux aussi très importants pour beaucoup de produits alimentaires. Les yaourts par exemple, mais aussi d'autres produits importés sont de 4 à 8 fois plus chers qu'en Métropole.
Une situation exceptionnelle qui fait que les DOM ont une fiscalité particulière et que le Président de Région a donc un pouvoir fiscal plus important qu'en Métropole. Hélas pour ceux qui espéraient que leur Président de Région pourrait faire quelque chose, la TICPE fixée par la loi avec 3 taux, un taux pour l'Ile-de-France, un taux pour la Corse et un taux pour les autres régions. Les Présidents de région ne pourront donc pas, sauf modification de la loi, compenser ou bloquer les hausses prévues au 1er janvier prochain.
Pour rappel, la TICPE diesel progressera de 6,9 centimes par litre et la TICPE essence de 2,9 centimes par litre.
(*) Programmation pluriannuelle de l'énergie
Avec AFP
Illustration : Ile de la Réunion