Pascal Couasnon, Directeur de la compétition chez Michelin a accepté d’éclairer les lecteurs du blog auto sur ces questions primordiales.
LBA : Quelles sont les nouveautés Michelin, cette année en LMP1 ? Comment les choses ont évolué au cours de l’intersaison ?
Pascal Couasnon : « Je dirais volontiers que nous n’avons pas changé nos habitudes de travail. A chaque intersaison, on travaille avec chaque écurie pour pouvoir adapter le pneu aux évolutions des voitures. Là, nous avons noté des évolutions assez drastiques chez Toyota et chez Audi.
Chez Porsche, même s’ils avaient une très bonne auto l’année dernière, ils ne s’arrêtent pas ! Donc on a continué, avec comme but une adaptation aux besoins, mais aussi d’avoir des fenêtres très larges mais distinctes. C’est à dire que lorsqu’on propose deux ou trois types de pneus, on puisse avoir une définition de plus en plus claire et qu’on puisse dire, dans telles conditions c’est tel pneu qu’il faut utiliser pour avoir la meilleure performance possible.
Le feedback de chaque écurie est très positif. On avait à travailler des domaines différents par écurie mais nous avons noté des progrès sensibles dans tous les cas et nous sommes très satisfaits ».
LBA : Chez Toyota par exemple il y avait une sacrée marche à franchir, en quoi Michelin aura contribué à redonner des couleurs à l’auto qui semble bien dans le coup au prologue ?
PC : « Pascal Vasselon nous avait dit, le pneu aide mais il ne peut pas tout faire. Donc, je pense que beaucoup de choses ont été modifiées sur la voiture. Notre but était de suivre et de s’assurer qu’en fait on contribuait bien à l’évolution mais aussi, que l’on comprenait bien comment la voiture avait bougé, pour à nouveau extraire le plus de performance possible. Je suis certain que la TS 050 a bien progressé et nous y avons contribué, à notre modeste façon ».
LBA : La réduction de la consommation des pneumatiques c’est bien toujours à l’ordre du jour cette saison ?
PC : « A nouveau, ça dépend des circuits. Le but, selon le règlement, c’est d’aller sur des doubles relais partout et au Mans, on vise toujours quatre relais en sachant que les voitures continuent de progresser de façon incroyable. Il faut bien faire attention à l’évolution des choses. On nous dit : alors vous êtes toujours à quatre relais, mais on ne se rend pas compte de la difficulté, de l’exploit réalisé chaque année en réussissant à tenir quatre relais ! Je rappelle qu’il y a deux ans, le pneu est devenu 5 centimètres moins large, et a perdu un plus d’un kilo. Ce qui veut dire, que l’on délivre de plus en plus de performance avec moins en moins de matière. C’est bien en termes d’efficacité énergétique que nous jouons pleinement notre rôle et nous continuons à le faire, pleinement ».
LBA : Vous êtes moins présent sur les autres catégories du WEC ?
(NDLR : Dunlop, le grand concurrent en endurance, équipe toutes les LMP2 et est, pour la première fois depuis plusieurs années, présent en GT avec Aston Martin Racing)
PC : « Sur le GT, nous sommes bien très présents cette année, avec un acteur majeur dans la catégorie (Ford) que nous avons l’honneur de suivre, ce qui extrêmement important. Ce qu’on constate c’est quand un acteur de cette importance arrive en compétition au plus haut niveau, il choisit Michelin. Bien sûr la concurrence constitue un aiguillon supplémentaire pour évoluer.
Comme je suis sûr que vous allez me poser la question du LMP2, dans cette catégorie nous avons travaillé. C’est une catégorie, où nous devons prouver à nouveau des choses. C’est un petit peu tôt pour être prêt en championnat du monde mais il sera intéressant de suivre ce qui va se passer en European Le Mans Séries. Si j’ai bien lu les feuilles de temps des récents essais de ce championnat lui aussi très relevé, les choses se sont bien passées. Je pense que les teams vont apprendre à redécouvrir Michelin en LMP2 et on devrait avoir de belles surprises ».
LBA : Où en est-on sur cette question du transfert de la compétition vers le pneu de Monsieur Tout le monde ?
PC : « C’est toujours l’objectif Michelin. Je dirais que pour chaque discipline où nous sommes engagés en compétition, nous avons un but différent. En rallye par exemple, on y apprend comment développer des pneus qui résistent aux chocs, tout en étant très performants et endurants.
Si on n’est pas performant on ne peut pas se présenter dans une discipline. Le rôle de l’endurance auto, c’est de trouver le moyen d’être performant, stable dans la durée et le plus ouvert possible en ce qui concerne la fenêtre d’application. En formule électrique, c’est bien sûr être performant et économe en énergie. On a vu récemment en Moto GP comment avoir un grip constant.
On voit bien dans la philosophie de développement de nos pneus que nous avons toujours en tête comment nous allons pouvoir utiliser tout ça au profit de la voiture de tous les jours. Notre philosophie reste toujours la même. Nous continuons à transférer des gommes, des nouveaux tissus et les mêmes systèmes de développement vers notre centre de Ladoux, pour élaboration des nouveaux produits commerciaux ».
Du prologue à la course
Dans le paddock, les mécaniciens effectuent des navettes entre le stand et la zone de montage de Bibendum. En bord de piste, les techniciens clermontois, à l’instar de leurs concurrents britanniques, mesurent la température de la piste, scrutent le ciel, prennent la température des pneus lorsque les pilotes effectuent leurs relais. Chacun d’entre eux consigne tous les éléments, qui vont être moulinés rapidement dans le programme de simulation par ordinateur.
Ainsi, lors de la première course à Silverstone, le 17 avril prochain, ils pourront répondre sans coup férir aux demandes des managers, quant à un choix délicat par rapport à une météo mitigée et changeante, par exemple.
Pour notre part, ce sera bien lors des 24 heures du Mans que nous pourrons scruter la stratégie, de chacun des candidats à la victoire qui peut – comme on l’a déjà vu – conduire à la victoire pour quelques secondes économisées avec un changement de pneus en moins que son adversaire direct.
Alors vivement Le Mans !
Alain Monnot
Photos : DPPI/Michelin, Alain Monnot, Fabien Legrand