Goodyear, la mal nommée ? Car l’année commence bien mal pour ses employés canadiens.
Le fabricant américain de pneumatiques Goodyear a en effet annoncé jeudi la fermeture d’une usine de fabrication de pneus au Québec, qui va se traduire par la suppression de 800 emplois.
Certes la nouvelle ne fait pas la une de la presse en France, mais l’information est symptômatique des problèmes économiques auxquels est confronté le secteur des pneumatiques actuellement… et salariés, actionnaires voire même « afficionados » de Michelin pourraient en retirer quelques craintes.
Goodyear a annoncé jeudi la fermeture d’une usine de fabrication de pneus au Québec, laquelle, située à Valleyfield, emploie actuellement 1.000 personnes. Dans les six mois, seul un petit département spécialisé dans la transformation du caoutchouc restera ouvert. Goodyear va en effet transformer cette usine en centre de mixage pour les composants utilisés dans la fabrication de pneumatiques, ce qui permettra de conserver 200 emplois. Ce centre devrait être opérationnel d’ici la fin de l’année 2007.
Goodyear a précisé que cette fermeture entrait dans le cadre de son programme de réduction des coûts et des capacités de production. « Dans l’environnement actuel très concurrentiel et de plus en plus global, nous faisons face à des choix très difficiles », a souligné Jon Rich, président des activités de Goodyear en Amérique du nord. « La décision d’arrêter la fabrication de pneus à Valleyfield est l’une des étapes nécessaires pour rendre Goodyear plus concurrentiel. Cette décision est sans rapport avec les performances et les qualités des employés de Valleyfield », a-t-il ajouté.
La fermeture de l’usine va réduire les capacités de production du groupe de 7 millions de pneus, soit 21 millions au total dans le cadre du plan de restructuration. L’objectif initial était d’une réduction allant de 15 à 20 millions d’unités.
Goodyear va inscrire une charge comprise entre 165 et 170 millions de dollars après impôts pour financer cette fermeture dont 40 à 45 millions de dollars en cash. Elle devrait toutefois générer des économies de coûts de fonctionnement de 40 millions de dollars par an.
«Quand le téléphone a sonné à 6h15 du matin et que le directeur de l’usine nous a convoqués à une rencontre avec deux dirigeants venus de l’Ohio, on a commencé à se douter que quelque chose ne tournait pas rond», a expliqué Daniel Mallette, président du syndicat qui compte une soixantaine de membres.
«On nous a expliqué que l’entreprise se retrouvait en surcapacité de production en Amérique du Nord, et que la production de pneus (génériques) pour les grandes chaînes comme Canadian Tire et Wal-Mart serait abandonnée. Ça représente huit millions de pneus par année, dont beaucoup ici, à Valleyfield», a ajouté Bruno Lefebvre, autre représentant syndical.
Selon toute vraisemblance, selon la presse canadienne, la fermeture est aussi étroitement liée à la signature, il y a deux jours, d’une convention collective entre Goodyear et ses 14 000 employés syndiqués des États-Unis affiliés à la United Steelworkers of America.
Immédiatement après la rencontre, les employés ont été invités à retourner chez eux. Devant l’usine, des gardes de sécurité surveillaient étroitement les allées et venues, refoulant quiconque s’engageait sans autorisation dans l’entrée asphaltée du complexe. Peu après l’annonce, le président de la FTQ, Henri Massé, fulminait : « Ils nous ont pris comme des sauvages en annonçant la nouvelle à 6h ce matin. Nous sommes en train d’évaluer les actions que nous pouvons prendre «, a-t-il dit. «Nous voulons prendre le temps de digérer l’annonce de la fermeture, a cependant ajouté M. Massé. Si une rencontre avait lieu immédiatement, ça ne serait pas intéressant.»
La fermeture de l’usine de pneus de Salaberry-de-Valleyfield n’est pas une surprise pour bien des observateurs canadiens. En effet dès 1999, Goodyear avait clairement indiqué qu’elle n’avait pas l’intention de renouveler l’équipement de production de ses installations québécoises. Des investissements évalués à 100 millions étaient nécessaires, selon les spécialistes, pour que l’usine demeure compétitive face à celles d’Amérique du Sud. De tels investissements auraient aussi permis à l’usine de produire des pneus haut de gamme et des pneus de 17 et 18 pouces, très populaires pour le marché des SUV.
Devant cette menace de fermeture rapprochée, la Ville de Salaberry-de-Valleyfield, les différents syndicats de l’usine ainsi que certains partenaires de l’entreprise, comme Gaz Métropolitain, avaient entrepris des démarches auprès des gouvernements provincial et fédéral, de même qu’auprès du Fonds de solidarité de la FTQ, pour convaincre Goodyear de moderniser ses équipements. «Nous allons maintenant concentrer nos efforts pour convaincre Goodyear d’investir dans les équipements de traitement du caoutchouc, a indiqué le maire Denis Lapointe. Nous avons ici une expertise qui pourrait être très profitable à l’entreprise.» Au cours des prochains jours, les syndicats et la Ville entendent tenir des conférences de presse pour expliquer leur stratégie respective.
Goodyear a déjà annoncé des fermetures d’usines en Grande-Bretagne, en Nouvelle-Zélande et au Texas (sud) lui permettant de réaliser, avec celle de Valleyfield, des économies de coûts totalisant 125 millions de dollars.
Un mouvement de grève qui avait touché les usines de Goodyear aux Etats-Unis et au Canada pendant plusieurs semaines s’est achevé fin décembre avec un accord signé avec les syndicats. A l’issue de ce conflit qui avait duré 86 jours, la direction du groupe et le syndicat américain USW s’étaient entendus sur une nouvelle convention collective. Cet accord prévoit notamment que Goodyear repousse d’un an son projet de fermeture de l’usine de Tyler au Texas et donne ainsi le temps aux employés de trouver une solution de reconversion ou de retraite anticipée.
Un porte-parole de Goodyear, Ed Markey, a précisé jeudi que le conflit avait pris fin également dans les quatre usines en grève au Canada avec un accord sur une nouvelle convention. Le site de Valleyfield ne faisait pas partie des quatre sites concernés, a-t-il indiqué.
Pour rappel, Goodyear est le numéro trois mondial du pneu en termes de ventes -19,7 milliards de dollars en 2005 – derrière Bridgestone et Michelin.
Sources : AFP, Cyberpresse
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