Peut-on virer Elon Musk de Tesla ?

Depuis l’élection de Donald Trump aux USA et les déclarations et gestes d’Elon Musk, de plus en plus de monde ose dire qu’il faut évincer Musk de Tesla pour la sauvegarde de la marque. Les effets des idées du patron semblent se concrétiser. Mais, peut-on réellement virer Elons Musk de Tesla ?

Avant toute chose, il convient de se pencher sur la structure de l’actionnariat de Tesla. Si Musk ne l’a pas fondé (contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, ce sont Martin Eberhard et Marc Tarpenning), il a rapidement pris une grosse part du capital. Sauf qu’au gré des ventes (pour financer l’achat de Twitter par exemple), Musk a revendu pas mal d’actions aussi.

A l’heure actuelle, Elon Musk ne détient plus que 12,77 % de Tesla. Donc la réponse théorique est OUI ! On peut virer Elon Musk de Tesla car il n’a pas de minorité de blocage des décisions. Merci bonsoir ! Ouh là, non. Ce serait évidemment trop simple.

Un Conseil d’Administration à sa botte

Dans une entreprise comme Tesla, cotée en bourse, c’est le Conseil d’Administration qui décide. C’est le Board of Directors (conseil d’administration) qui a le pouvoir de nommer ou de démettre le CEO. Elon Musk est CEO, mais ce n’est pas lui qui détient formellement ce poste à vie.

Le souci pour ceux qui voudraient voir Musk céder la direction de Tesla, c’est que ce conseil d’administration lui « mange dans la main » encore pour le moment. Déjà quand on regarde les membres de ce conseil, on a Elon Musk évidemment, mais également Kimbal Musk, l’un des frères de Elon. Les autres membres ne voient pas encore pourquoi il faudrait virer Elon Musk et l’ont même soutenu encore récemment.

Même quand la SEC avait forcé Musk à quitter temporairement la présidence du conseil d’administration, le CA avait patienté pour mieux le renommer Président du CA.

Alors c’est impossible finalement ?

C’est plus compliqué que cela. Déjà, le Conseil d’Administration peut très bien se retourner contre Musk. Ainsi, une majorité pourrait se détacher pour le démettre de son mandat de CEO. C’est ce qui est arrivé à Carlos Tavares chez Stellantis par exemple. Cela pourrait arriver face aux dérives de Musk et aux conséquences sur la société. En Europe, par exemple, les ventes sont divisées par deux en février.

Le CA pourrait arguer d’une dispersion de celui qui n’hésite pas à clamer qu’il prend de la kétamine. Dispersion entre X (ex-Twitter), Space X, Neuralink, The Boring Company, etc. l’entrepreneur boulimique pourrait être considéré comme négligent par rapport à Tesla. Et le CA d’en tirer des conséquences.

Le CA pourrait aussi être poussé à ce geste par les actionnaires importants. En effet, derrière Musk, on trouve Vanguard ou Blackrock. Des fonds d’investissement qui pour le moment sont contents du management de Musk mais pourraient changer d’avis.

Et une OPA ?

Car il y a des mécontents dans les actionnaires. Mécontents de l’image déplorable qui colle désormais à Tesla et à ses véhicules. Mécontents aussi du yoyo du cours de bourse. Après un plus haut à 480 dollars, l’action oscille désormais entre 220 et 280 dollars, certains estiment qu’il pourrait y avoir une chute jusqu’aux 170 dollars d’il y a un an. Une fortune virtuelle qui s’évapore, cela chagrine forcément.

Outre ces gros actionnaires de poids, il pourrait y avoir une fronde des « petits » actionnaires. Ces actionnaires peuvent s’exprimer à chaque Assemblée Générale ordinaire annuelle. Mais, honnêtement, pour l’instant on voit mal l’AG tomber d’accord en majorité pour virer Elon Musk.

Enfin, le scénario extrême, ce serait un rachat hostile par un constructeur mondial. Les actionnaires, lassés de Musk et à qui on offre un bon prix de leurs actions pourraient alors les apporter à cette OPA agressive. Cela pourrait pousser le CA à démettre Musk pour éviter le rachat.

En somme, Elon Musk semble pour le moment bien accroché à son poste de CEO de Tesla.

Allez, faisons un peu d’économie fiction ! Tesla se décide à virer Musk.

🚨 Breaking News : « Elon Musk quitte son poste de CEO de Tesla »

J+0 : Le jour de l’annonce

• Les marchés ouvrent en panique.
• 📉 Action Tesla : -20% à -30% en quelques heures.
• Réactions en chaîne sur Reddit, Twitter, X (et même Dogecoin chute 😅).
• Les fans crient au complot ourdi par les « dinosaures » automobiles.
• certains petits porteurs vendent massivement, alimentant la panique sur le titre.
• Les fonds institutionnels (BlackRock, Vanguard) essayent de rassurer en disant « c’est pour le bien de l’entreprise », mais l’ambiance reste glaciale.

J+1 à J+30

• Tesla devient extrêmement volatile en bourse. Certains actionnaires vendent dès qu’ils peuvent pour récupérer leurs billes. D’autres se positionnent, confiant sur le rebond de l’entreprise après le départ de Musk.
• Elon Musk même laisse sous-entendre qu’il pourrait vendre une partie de ses actions pour se consacrer à SpaceX ou X Corp. Cela provoque un nouveau coup de stress pour le marché, pour la plus grande satisfaction de Musk.
• Les journalistes financiers spéculent sur le nom du remplaçant : un profil traditionnel de l’industrie automobile ou un ingénieur de l’IA. Difficile de succéder à un patron emblématique.
• Le conseil d’administration tente de rassurer avec des communiqués, mais les investisseurs restent sceptiques.
• Certains analystes pensent que Tesla redeviendra « une boîte normale », d’autres craignent qu’elle perde son âme. L’entreprise et son dirigeant sont-ils si fusionnels que cela ?

Mois suivants, deux options

• Si le remplaçant est crédible et que les ventes de véhicules électriques Tesla repartent dans le monde, l’action pourrait remonter progressivement. Au moins elle se stabilise après cette tempête.
• Si au contraire, Tesla connaît des retards ou une perte de leadership sur l’IA et l’autonomie, le cours pourrait rester affaibli longtemps (-30 à -50% par rapport au pic d’avant), voire devoir se vendre au plus offrant.

Des précédents historiques

Certes, ces scenari peuvent sembler farfelus. Cependant, on a déjà vu cela par le passé. Comme évoqué, Carlos Tavares a été viré par le Conseil d’Administration en avance sur la fin de son mandat. Stellantis était malmené et la confiance n’était plus là.

Si on prend le cas d’Apple, il y avait un patron emblématique. Pourtant, en 1985, les ventes des Macintosh ne sont pas au beau fixe (tiens tiens) et John Sculley conteste le pouvoir de Steve Jobs, co-fondateur d’Apple. Devant les licenciements et les difficultés de la société, Sculley réussit à faire évincer Jobs par le Conseil d’Administration. Il le « placardise » ce qui pousse Jobs à partir fin 85.

Durant 10 ans, Apple va dériver. Tellement qu’en 1997, le Conseil d’Administration fait revenir Jobs qui se fait désirer. Il accepte le poste « par intérim ». Intérim qui durera jusqu’à sa mort. Apple est devenu sous sa férule la société que l’on connait. Alors un scénario identique chez Tesla ? Pourquoi pas. Mais Elon Musk n’est pas forcément Steve Jobs, bien qu’il essaie souvent de copier Jobs dans ses présentations, ses déclarations de « révolution », etc.

Et pour l’OPA ? Oh il y en a eu des réussies, des échouées. Mais la plus intéressante est sans doute celle qu’a lancé Elf sur Total. Au moment de lancer son OPA, l’enquête de la juge Eva Joly plonge le cours de bourse d’Elf dans la tempête. La société doit renoncer à son OPA et au final, c’est Total, devenu TotalFina qui lance une OPE (échange d’action) avant d’absorber finalement la société qui voulait la racheter. Alors une OPA sur Tesla ? Prudence.