Bugatti Chiron vs Rafale Marine : tonnerres mécaniques

Les deux monstres

A notre gauche, voici la Bugatti Chiron Sport « les légendes du ciel », dévoilée en novembre dernier. Certes, on pourrait avancer que la « francité » de la supercar alsacienne est aujourd’hui à relativiser un peu puisque, bien qu’elle soit toujours assemblée dans l’usine de Molsheim, en Alsace, la Chiron porte davantage en elle un ADN technologique germanique. Toutefois, on peut saluer le respect de l’Histoire puisque le drapeau tricolore est bien visible sur les jupes latérales et que cette série spéciale « les légendes du ciel » rend hommage justement aux « risque-tout » de l’aviation française. Albert Divo et Robert Benoist, pour ne citer que les plus célèbres, participèrent à la Grande Guerre comme aviateurs avant d’entamer leur brillante carrière en course automobile avec Bugatti. La firme d’Ettore Bugatti avait toujours tissé très étroits avec le monde de l’aviation, construisant pendant la Grande Guerre des moteurs d’avion et développant dans les années 30 un prototype de records qui, Seconde Guerre Mondiale oblige, ne put aboutir.

Produite à seulement 20 exemplaires de 2,88 millions d’euros pièce, la Chiron Sport, qui avoisine les 2 tonnes, embarque le fameux W16 8 litres à 4 turbos, développant 1500 chevaux à 6700 tours/min et 1600 Nm de couple pour une vitesse de pointe de 420 Km/h. Côté pointures, elle chausse du Michelin Sport Cup 2 en 285/30 R20 ZR à l’avant et 355/25 R21 ZR à l’arrière, avec des disques de frein d’un diamètre de 420 millimètres à l’avant et de 400 millimètres à l’arrière.

A notre droite, voici le Rafale produit par Dassault. Entré en service en 2002, l’avion polyvalent français, conçu aussi bien pour la reconnaissance tactique, la défense, l’attaque et la dissuasion nucléaire, est ici dans la version « M » monoplace spécifiquement développée pour la Marine et l’appontage sur le porte-avions Charles de Gaulle, d’où un train d’atterissage et des freins renforcés. Ils sont conçus justement par Safran Lafing Systems, qui s’appelait autrefois…Messier-Bugatti-Dowy, puisque Bugatti, après son rachat par Hispano-Suiza en 1963, avait développé des activités aéroautiques sur le site de Molsheim. Tout se tient ! Son côut unitaire est d’environ 76 millions d’euros.

Avec un poids à vide de 10,3 tonnes et un poids maximal de 24,5 tonnes, le Rafale M fait 15,5 mètres de long pour une envergure de 10,86 mètres. Il est propulsé par un biréacteur Snecma M88-2 qui délivre 58 550 newtons de poussée, soit un équivalent en puissance de plus de 5700 chevaux (à 260 km/h NDLR). Il atteint une vitesse de pointe de plus de 1,6 Mach, soit environ 1 975 km/h, tandis que sa vitesse « de croisière » est de 1487 Km/h. Côté freinage et atterrisage, Un système antidérapant spécialement développé pour les avions maintient le jet sur sa trajectoire, même lors d’atterrissages difficiles. Un bouclier thermique spécial sur le frein protège la roue en aluminium de 36 kilos et les pneus Michelin de 790×275-15 de la surchauffe.

Le duel

C’est sur la piste de la base de Landivisiau, en Bretagne, utilisée par l’armée de l’air depuis 1965, qu’a eu lieu l’affrontement. Dans le Rafale a pris place le pilote Etienne, tandis que la Chiron Sport est confiée au pilote d’essais maison, Pierre-Henri Raphanel, ancien champion de France de F3, vu brièvement en Formule 1 à la fin des années 80.

Peu après le départ, la Bugatti Chiron Sport est en tête. L’hypersportive accélère de 0 à 100 km/h en 2,4 secondes, pour atteindre 200 km/h en 6,1 secondes. Le passage à 300 km/h prend 13,1 secondes, les 400 km/h sont atteints en 32,6 secondes. Grâce à son énorme couple, elle passe de 50 à 150 km/h en 3,2 secondes, de 80 à 120 km/h en seulement 1,8 secondes et de 100 à 200 km/h en 4,3 secondes.

A cette vitesse, le Rafale Marine a déjà quitté le sol. Il atteint 165 km/h après 150 mètres, 210 km/h après 250 mètres et décolle à environ 260 km/h au bout de 450 mètres. « Sur les premières centaines de mètres, j’étais en tête devant le Rafale, mais après quelques centaines de mètres, il était en l’air à environ 20 mètres au-dessus et à côté de moi. Une vision incroyable et superbe », dira plus tard Pierre-Henri Raphanel. Après environ 1,5 kilomètres et à plus de 350 km/h, le pilote de la Bugatti déclenche sa manœuvre de freinage tandis que le Rafale a déjà disparu dans le ciel.

« La Chiron Sport possède une puissance d’accélération incroyable, très proche de celle du Rafale. Dans la Bugatti, on ressent les mêmes sensations que dans le jet, même au freinage », explique le pilote Etienne.

A partir de 400 km/h, la Bugatti Chiron Sport s’arrête après 491 mètres, et à partir de 300 km/h, il lui faut 247 mètres pour stopper. L’hypersportive passe de 200 à 0 km/h sur 114 mètres, et pour descendre de 100 à 0 km/h, il ne lui faut que 31,4 mètres. En raison de la faible longueur de la piste et des prescriptions de sécurité, la Chiron Sport ne freine qu’à partir d’environ 210 km/h, le Rafale Marine à partir de 250 km/h.

Le Rafale Marine s’approche de la piste à environ 280 km/h touche brièvement le sol et attrape le brin d’arrêt avec la crosse d’appontage placée sur la queue, comme sur un porte-avions. Etienne est pressé dans les harnais, sa machine s’arrête au bout de 150 mètres. « C’est une sensation très extrême, comme si on fonçait dans un mur, comme un crash contrôlé », dit-il pour décrire la manœuvre. En revanche, la Chiron Sport freine puissamment, mais moins brutalement.

Et Etienne de conclure: « La Chiron Sport est le véhicule idéal pour les pilotes de l’aéronavale.» Bon, à notre avis, les acheteurs sont plutôt à chercher du côté des milliardaires et des footballeurs. Quoi qu’il en soit, on ne peut que rester pantois devant un tel concentré de technologie et de puissance.

source et images : Bugatti

(33 commentaires)

  1. “La firme d’Ettore Bugatti avait toujours tissé très étroits avec le monde de l’aviation, construisant pendant la Grande Guerre des moteurs d’avion »

    Pardon, mais vous ne confondez pas avec la firme Hispano-Suiza, qui avait vraiment un pied dans l’automobile et l’autre dans l’aviation ?
    Alors, oui, il y a eu bien l’avion de course pour « Coupe Deutsch de la Meurthe » le Bugatti 100p qui n’a pas eu le temps de voler avant la guerre.
    En dehors de cet épisode, Bugatti était relativement peu dans l’aviation si l’on compare avec beaucoup d’autres firmes comme les Avions Voisin, Salmson et Hispano-Suiza, Renault avec Caudron, Gnome et Rhône et la moto.
    Uniquement pour les Françaises…

    1. @SGL : Nicolas parle de moteurs d’avion et pas d’avion 😉
      Exemple : Bugatti U-16 et tous ses dérivées (qui étaient principalement dans des Bréguet mais pas que). Le U-16 est réalisé par l’assemblage de deux moteurs 8 cylindres en ligne à 32 soupapes que Bugatti avait conçu et revendu à Diatto. L’assemblage en 16 cylindres fut vendu à Duesenberg, mais il y a eu des Breguet donc, des Mann (argh), des Napier, etc.
      Et ne pas oublier qu’Etore Bugatti a bossé chez Lorraine et certains des moteurs conçus ont été mis dans des avions 🙂

      Alors certes…Ce n’est pas BMW ou Avion-Voisin, Hispano-Suiza, etc. mais il y a bien eu du moteur d’avion Bugatti.

      1. Et pour les liens avec l’aviation, ne pas oublier (et c’est l’objet de la série limitée de cette Chiron) que de nombreux pilotes de course Bugatti étaient aussi des pilotes de l’aviation (durant la Première Guerre Mondiale ou la 2nde).

      2. Mais je parle bien de motoristes d’avion… sauf peut-être les Avions Voisin qui étaient propulsés par des Renault et des Salmson.

        Mais Renault, Gnome et Rhône, Salmson, Hispano-Suiza etc. étaient tous des grands fabricants de moteurs d’avions de renom, avant 1945… Pas des fabricants de cellules comme Bloch (Dassault), Dewoitine, Morane-Saulnier, Breguet Aviation. etc.

      1. On limite le poids des images pour ne pas pénaliser la lecture 😉
        Mais elle reste en 1600×1067.

        1. « On limite le poids des images pour ne pas pénaliser la lecture ?
          Mais elle reste en 1600×1067. »
          Heu votre atroce video envahissante et dont TOUT LE MONDE se plaint pénalise la lecture et pourtant cela ne vous gene de nous l’ imposer.
          Pire, comme la page se recharge automatiquement, votre video de m….de revient egalement.

  2. C’est « joli » pour les images.
    Mais pour le suspense, c’est couru d’avance.
    Les jets sont très mauvais pour accélérer sur le 0 à 100.
    Sauf qu’après leurs accélérations s’accroissent avec la vitesse… Souvent au-dessus des 300.
    Les turbines quand elles, couplées à des hélices pour devenir des turbopropulseurs, sont plus efficaces en accélération que leurs versions turboréacteurs qui fonction en mode jet.
    Cela se démontre encore facilement sur les Porte-avion, les jets sont normalement incapables de décoller sans aide de catapulte (sauf avec tremplin) les avions turbopropulsés pourraient le faire beaucoup plus facilement.
    Le jet n’aura jamais la motricité que procurent les pneus d’une sportive, et même des hélices.
    Enfin, pour pallier aux mauvaises accélérations des premiers mètres, les catapultes des porte-avions permettent de faire un 0 à 250 km/h en 75 mètres ou 2 secondes (la longueur du rail), les réacteurs ne servent pas, pour ainsi dire à rien, pendant les deux premières secondes

    1. Oui sgl mais c’est avant tout un coup marketing, la comparaison est pas possible entre une voiture et un avion

    2. Juste pour info, un Boeing 777 a environ 330t accélére de 0 à 310/320 km/h en ~ 45 sec. C est le temps qu il faut à une Chiron pour faire un 0-400-0 km/h

    3. Compare ce qui est comparable
      Sur un porte avion, les avions à réaction sont les avions de chasse, conçus pour voler à vitesse élevée, mach2, et ont peu de portance à très faible vitesse
      Les avions à hélice volent à plus faible vitesse, ont davantage de portance

  3. « On limite le poids des images pour ne pas pénaliser la lecture » -> S’il faut limiter le poids de chaque article, j’ai une proposition plus simple…

  4. Dassault Rafale puissance > 100.000ch. Bugatti a dit n’importe quoi sur son communiqué et tous les journalistes en mousse l’ont repris. Pathétique…

    1. On ne peut pas utiliser les chevaux comme puissance pour les avions. C’est juste un repère pour le commun des mortels. Le soucis est que ce repère est variable…

      Faire avancer un avion, on utilise une poussée, une force, en Newton.
      La « conversion » en puissance, c’est via le produit scalaire P = F.V
      On voit donc que la puissance obtenue dépend de la vitesse de l’avion

      Le Rafale a une poussée de 2x 75000N

      -si l’avion vole à 1900km/h environ, soit 530m/s
      150.000*530 = 79.500.000W
      soit 108000ch

      -mais si l’avion vole à 150km/h « en moyenne », sur la courte période du décollage
      150km/h environ = 40m/s
      150.000*40 = 6.000.000W
      soit 8100ch

      1. Bah oui, effectivement, les puissances des réacteurs ne peuvent pas être traduites aussi facilement que cela.
        @wizz à parfaitement raison, c’est en fonction de la vitesse, d’où l’impression d’être long à la détente des avions à réaction à partir d’un point fixe.
        A titre indicatif, sans que cela soit une valeur « scientifique » , le TP400 de l’Airbus A400M développe 11.600 ch à le corps chaud de la turbine de la même famille du M88 de 7,5 t/p du Rafale.
        J’oserais dire, qu’une Rafale turpropulsé avec ses turbines via des hélices, développerait environ 24.000 ch, mais cette comparaison reste très aléatoire.

        Autre comparaison des puissances et leurs résultats avec des avions fins et de dimensions et poids proches.
        Un bimoteur de chasse des années 40, Westland Whirlwind, 2 x 900 ch , vitesse maxi : 580 km/h
        Le Messerschmitt Me 262, 2 ans plus tard, avec 2 x 900 kg/p, vitesse maxi : 870 km/h
        Dés que l’avion à réaction descend sous les 500 km/h, il devenait extrêmement vulnérable, et pataud sous les 350 km/h.
        Bref, plus le réacteur prend de la vitesse et engouffre de l’air, plus il est à l’aise, à 300 km/h, il commence vraiment par bien respirer quand l’auto commence par s’épuiser.

        1. non
          la comparaison n’est pas aléatoire avec un Rafale avec des turbo propulseurs. C’est juste que tu vas changer le domaine d’utilisation de l’avion, qui ne pourra plus voler à vitesse élevée

          non plus, un avion ne devient pas vulnérable sous les 500km/h
          les vélo de route sont très performante sur une route lisse, mais ne s’en sort pas dans le sable
          un VTT s’en sortira dans le sable, et sera piètre sur le bitume

          C’est pareil pour un avion.
          Il y a des avions conçus pour la haute vitesse, et d’autres pour une faible vitesse. Dire qu’un avion est vulnérable sous 500km/h est un signe de méconnaissance
          Pour pouvoir voler à vitesse supersonique, les avions ont une aile en forme delta, et une faible surface (à vitesse élevée, cela suffit). Une grande aile aurait été contreproductive. Dès lors, à faible vitesse, il n’a plus de portance

          Et inversement, lorsqu’un avion est conçu pour une faible vitesse, loin du domaine supersonique, alors sa voilure est différente. Le A10 Thunderbolt vole très très très bien en dessous de 500km. Il a été conçu pour détruire les unités au sol (son surnom est tueur de char)
          https://fr.wikipedia.org/wiki/Fairchild_A-10_Thunderbolt_II

          1. @wizz, tu mélanges les configurations aérodynamiques avec les différents types de motorisation en fonction des domaines de vol.
            Alors si tu veux jouer avec ma méconnaissance, je te ferai remarquer qu’un A10 à un profil d’aile droite fait pour les moyennes vitesses pour pouvoir viser au canon et ses réacteurs sont des doubles flux avec un important taux de dilution élevé, c’est-à-dire des turbofans qui agissent aux 3/4 comme une hélice et que le jet de la turbine est minoritaire.
            Son réacteur même sur un avion plus en aile en flèche serait bien incapable de dépasser les 1000 km/h comme feraient la plupart de jet de combat moderne.
            Je connais tous les domaines de vol de chaque appareil en fonction de son aérodynamisme et de ses éléments hypersustentateurs de vol, mais je parlais précisément des caractéristiques des moteurs à réaction face à d’autres motorisations.
            Sous les 500 km/h, on ne choisit pas pour réacteurs pour un avion.

          2. sous les 500km/h, c’est surtout la voiture qui compte

            et pour avoir les deux, alors voilure à géométrie variable (F14 « tomcruise »)
            Selon si voilure fermée ou ouverte, l’avion sera très manoeuvrable ou va filer à toute vitesse. Et pourtant, c’est toujours le même réacteur

          3. Voiture, voilure…une lettre de différence. Coïncidence ? 🙂

          4. Un F-14 utilise aussi ses ailes déployées à fond (20°) pour un vol de convoyage vole au minimum à 750 km/h en vol.
            Ils les gardaient souvent déployés lors des Dogfight pour pouvoir tourner le plus court.
            Les jets les plus lents, modernes comme Pilatus PC-24 ou Honda HA-420 HondaJet, volent quand même vers les 800 km/h.
            Les avions à turbopropulseurs civils les plus rapides sont comme le Piaggio P180 Avanti, il vole vers les 700 km/h (c’est presque une exception)
            Le record reste les bombardiers Tupolev Tu-95 avec 950 km/h avec une croisière à 700 km/h, ce qui reste énorme.
            Mais là, l’avion a le physique d’un avion à réaction comme ses contemporains américains, les Boeing, et avec des turbines de 14.000 ch.

    2. @Nico : comme vous le savez (ou pas) la puissance en W est corrélée directement à la vitesse En m/s et la poussée en N.

      Donc…la poussée de 58 550 Newton ne génère pas la m?me puissance à 100 km/h et à mach 2.

      Ici la comparaison s’arrête en gros à 260 km/h…soit 72 m/s.
      58550*72 = environ 4 200 000 Watt soit en ch 5700.

      Drop the mic ! Les journalistes sont peut être en mousse mais ils n’ont pas oublié leurs cours de physique. 😉

      1. Tiens d’ailleurs, amusons-nous à calculer à peu près quand le Rafale M va dépasser en puissance les 1500 ch de la Chiron.

        1500 ch c’est 1,1 MW. Si on rapporte aux 58 550 Newton de poussée (sans post combustion) cela donne 18,85 m/s soit 67,9 km/h.
        Cela explique par exemple pourquoi sur les premiers mètres, la Chiron devance le Rafale M puisqu’elle se fait ramarrer et dépasser.

      2. Ça je le sais, mais « ce Nico » qui a posté Rafale>100000 ch ne le sait peut être pas. Et ça serait sympa de prendre un autre pseudo pour éviter les confusions

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