L’Italie avait Varzi, Ascari, Campari, Nuvolari; l’Allemagne avait Lang, Stuck, Carraciola et Rosemeyer. La France aussi brillait dans cet âge d’or de la course automobile avec Robert Benoist, René Dreyfus ou encore Louis Chiron. Mais Jean-Pierre Wimille était sans nul doute l’enfant prodige de la France. Fils d’un journaliste automobile du Petit Parisien, il baigne dès le plus jeune âge dans cet univers et débute la compétition en 1930.
Le héros Bugatti
Pilote vedette de Bugatti, il remporte le Grand prix de France 1936 sur une 57G (catégorie Sport) et à deux reprises les 24 heures du Mans en 1937 (pour sa 1ère participation) avec Robert Benoist et en 1939 avec Pierre Veyron. En championnat d’Europe des pilotes, il ne peut rien face aux surpuissants ogres germaniques Mercedes et Auto-Union qui écrasent tout sur leur passage, mais il leur tient la dragée haute à plusieurs reprises. Auto-Union l’approche pour le recruter mais cela n’aboutit pas, pour des raisons essentiellement politiques. Il remporte cependant de très nombreuses courses en France et termine second de la prestigieuse Vanderbilt Cup en 1936 aux États-Unis, derrière le grand Nuvolari. Wimille commet une infidélité à Bugatti en 1938, en s’engageant au sein de la Scuderia Ferrari qui aligne des Alfa Romeo mais l’expérience tourne court.
Le pilote résistant
Au début de l’occupation, Wimille développe des voitures électriques puis rejoint le réseau de résistance « Cheasnut » affilié au SOE (Special Operations Executive), le service secret britannique créé par Winston Churchill pour soutenir les différents mouvements de Résistance en Europe. Le réseau Cheasnut a la particularité d’être animé par trois pilotes de course : outre Wimille, on y retrouve son compère du Mans Robert Benoist ainsi que William Grover-Williams, qui n’est autre que le premier vainqueur du grand prix de Monaco ! Le réseau organise des sabotages et récupère du matériel parachuté par la RAF mais il est démantelé par la Gestapo. Seul Wimille y survivra : Grover-Williams sera exécuté dans le camp de Sachsenhausen en 1945 et Robert Benoist subira le même sort dans le camp de Buchenwald en 1944.
Celui qui aurait du être champion
Après la guerre, Wimille s’attelle à la création de sa propre marque de GT, mais il n’oublie pas de reprendre la compétition. Il signe la dernière victoire en course d’une Bugatti à la coupe des prisonniers du Bois de Boulogne en 1945 puis il est engagé par la prestigieuse écurie Alfa Romeo qui domine les grand prix de la fin des années 40 avec l’invincible « Alfetta » 158. Seul étranger au milieu d’une armada de pilotes transalpins, Wimille remporte en 1947 les grands prix de Suisse et de Belgique.
En 1948, il gagne les grands prix de France et d’Italie à l’occasion de la saison inaugurale de la nouvelle règlementation Formule 1, qui doit bientôt aboutir à la naissance d’un championnat mondial. Mais parallèlement à ses succès avec le Biscione, qui en font un des favoris pour le futur championnat du monde de F1, Wimille pilote également pour le constructeur Français Simca qui s’est associé à Amédée Gordini, le futur sorcier-préparateur Renault, pour concevoir des monoplaces de course.
En janvier 1949, il participe avec Simca-Gordini à des essais pour une course en Argentine. Dès son premier tour de piste, Wimille, visiblement surpris dans une courbe à haute vitesse par des spectateurs trop proches de la piste, dévie de la trajectoire pour les éviter mais la monoplace fait une embardée et se retourne sur le pilote, qui succombe à ses blessures pendant son transfert à l’hôpital. Tragique irone du sort, Wimille avait accepté ce jour là pour la première fois de porter un casque, en lieu et place du traditionnel serre-tête…Ses derniers mots auraient été « Que s’est-il passé ? ».
La mort du Français fut un énorme choc dans le monde de la course, tant le style de pilotage du Français, tout en adresse et en finesse, avait servi de modèle pour beaucoup de ses congénères. Le grand Fangio lui-même reconnut plus tard que Wimille avait été l’un de ses maitres-étalon.
Images : Flickr, Wikimedia commons
Belle découverte je ne m’étais jamais vraiment penché sur cette période. C’est un bel hommage.
Merci pour cet hommage à… mon grand oncle.
Hé ouais. Le nom de jeune fille de ma mère est Wimille.
Ma passion de l’automobile vient peut-être de là, mais je n’ai pas son talent de pilote.
Mon grand père était monté à ses côtés et en avait gardé un souvenir marquant.
C’est vrai qu’il n’est pas très connu. La série spéciale de la Bugatti Veyron à son nom lui a redonné un peu de visibilité.
Il avait commencé à créer sa marque automobile.
Il est l’inventeur, ou l’un des inventeurs, de la suspension hydraulique dont Citroën a racheté le brevet après sa mort.
https://lautomobileancienne.com/les-prototypes-wimille-1946-1950/
Citroën a racheté le brevet de la suspension hydropneumatique? c est quelque-chose que je lis pour la première fois. j aimerai bien des information sur ce fait.que les protos wimille soit proches de la ds?ok, eux mêmes proches de la voisin de Lefebvre,un des pères de la ds.
Déjà à cette époque là des spectateurs qui font n’importe quoi(ça ne date pas d’aujourd’hui) 🙁
Pareil pour le pilote italien de chez Peugeot en 1910, Giuseppe Giuppone, qui lors d’essais évite un cycliste mais se tue dans un fossé contre un arbre 🙁
…un article qui donne plaisir à lire. Respect pour ces artisans d’une époque où les grands pilotes avaient surtout une grande finesse dans la conduite pour s’imposer et… survivre. Merci pour l’article . Quand on pense Bugatti , on pense Wimille assurément.
Wimille: c’était avant les Trintignant Behra…
Cet article donne la fièvre parce qu’il stimule le souvenir des grands noms …