Les deux usines, cueillies par cette annonce, se sont mises en grève immédiatement, bloquant la production mais aussi les accès des sites. Selon les syndicats, rien n'annonçait les fermetures. Selon Michelin, ces arrêts de production se feront au plus tard début 2026, mais plus probablement à l'été 2025. Selon le pneumaticien, "Ces deux usines sont confrontées depuis plusieurs années à de grandes difficultés économiques".
Il faut dire que ces usines produisent des pneus pour Tourisme-Camionnette et Poids Lourd. Comme déjà avant elles l'usine de La Roche-sur-Yon, la transformation structurelle de ces marchés et la dégradation de la compétitivité de l'Europe menace l'équilibre financier des deux sites. En gros, Michelin nous dit que ce n'est pas de sa faute si les clients préfèrent des pneus à bas prix qui doivent donc être produits dans des pays à bas coût (écologiquement et socialement laxistes souvent aussi NDLA).
Les usines françaises produisent des "pneus premiums" qui ont vu leurs ventes reculer d'une dizaine de points en 10 ans en faveur des pneus d'entrée de gamme. Un niveau de vente qui serait donc insuffisant pour maintenir la compétitivité financière des sites. Une décision que Michelin sait explosive. La direction a pris la décision d’arrêter jusqu’au 11 novembre inclus la production des deux sites. Cela doit permettre d'éviter une confrontation avec les grévistes et potentiellement d'ouvrir un dialogue pour préparer la fin des sites.
Si les bassins choletais et vannetais sont plutôt dynamiques en matière d'emplois. Les salariés virés auront besoin d'accompagnement. Même si Michelin annonce tout de go prendre des mesures renforcées d'accompagnement, les syndicats en demanderont forcément plus. Pour les salariés investis dans ces usines, la claque est rude ce 5 novembre. Cela change des annonces de "salaire décent" d'avril 2024.
Le site de Vannes, 299 salariés, produit principalement du câble métallique utilisé ensuite en Espagne et en Italie pour produire des carcasses pneumatiques. Le site de Cholet, 955 salariés, fabrique principalement des "petits" pneus pour camionnettes de 17 pouces ou moins. Au total, ce sont donc 1 254 salariés qui sont concernés.
Trouver de nouveaux emplois ouvriers
Michelin met en avant son entité spécialisée dans la création d’activités et d’emplois, Michelin Développement. Cette entité vise à trouver de nouveaux points de chutes pour les salariés qui perdent leur emploi dans le groupe. "A Joué-Les-Tours, 1.054 emplois ont été créés en 4 ans pour 706 emplois supprimés. À la Roche-sur-Yon, 635 emplois ont été créés en 4 ans pour 613 emplois supprimés ; ce chiffre pourrait atteindre 825 emplois créés au regard des conventions de partenariat signées mais non encore mises en œuvre". Ceux qui connaissent l'ancien site de La Roche sur Yon savent que si des emplois ont été retrouvés, le site en lui même est toujours en partie en déshérence.
Pour le Manufacturier de Clermont-Ferrand, l'équation n'est pas simple. Historiquement français, le Bibendum s'est développé à l'international et a acquis ou créé des usines un peu partout dans le monde. Mené par la finance plus que par le simple patriotisme salarial et social, Michelin doit à la fois ménager la chèvre et le chou en maintenant une compétitivité globale, sans (trop) écorner son image auprès de la France qui reste un marché important.
Un peu comme la production automobile, Michelin recentre la France sur la production de pneus de grande taille et de spécialités à fort contenu technologique (pneus Avion, pneus Agricoles, pneus tourisme Ultra Haute Performance, pneus de Génie civil). Ces pneus à forte valeur ajoutée permettent, tout comme le véhicule électrique pour la production auto, de maintenir des usines en France. Pour combien de temps ?
Total (autre géant mondial historiquement français) a fait plus ou moins la même bascule en fermant des raffineries, tout en en conservant d'autres en les réorientant sur des productions innovantes ou à plus forte valeur ajoutée. Reste à savoir pour Vannes et pour Cholet ce qui émergera des discussions entre les Directions, les syndicats salariés et les acteurs locaux.