On a vu « Anatomie d’un come-back »

Annoncé en grandes pompes juste après le Toussaint via les canaux officiels et la production, le documentaire promet un grand nombre de révélations et des secrets et accès inédits pour une équipe audiovisuelle au sein du Groupe Renault. L’eau à la bouche est également montée en voyant la qualité des personnalités interviewées qui s’entrecroisent au fil des quatre épisodes. A retenir, beaucoup de positif dans la forme et le fond, tout en étant parfaitement conscient qu’ « Anatomie d’un come-back » reste une vaste opération de communication pour le Groupe Renault. ATTENTION AUX SPOILERS POUR CELLES ET CEUX QUI SOUHAITENT LE VISIONNER.

Du jamais vu dans les coulisses

« Anatomie d’un Come-Back » traite l’histoire du Groupe Renault juste après la chute de Carlos Ghosn en 2020, et montre l’arrivée de Luca De Meo aux commandes puis les intentions, l’élaboration et les moyens mis en oeuvre par le nouveau patron pour accomplir le plan Renaulution, encore en cours dans une de ses dernières phases. Le documentaire est découpé en quatre épisodes, assez malicieusement écrits et retraçant à la fois la montée en puissance du plan dans le temps tout en se consacrant aux différentes disciplines qui donneront le succès décrit.

Faire la révolution ou mourir

Le premier épisode, baptisé « Faire la révolution ou mourir » détaille autant que faire se peut les différents constats faits par Luca De Meo en arrivant aux commandes, avec les points faibles et aussi les points forts, même si on comprend vite que pour lui, beaucoup de process sont a revoir et qu’il n’y a pas de vision claire de l’avenir. De Meo lui même nous explique avec le recul ses sensations en arrivant, et fait part à ses collaborateurs des intentions qui justifieront l’élaboration d’un cap clair à travers un plan en 3 phases développé ultérieurement. Certains points paraissent évidents, comme un retour à la production au nombre et non en masse pour gonfler les stocks.

D’autres relèvent un peu plus de la passion ou de l’émotion à réinsuffler dans le coeur du groupe, comme un appel au passé et aux valeurs que les modèles de Renault diffusaient dans le coeur des clients et sur la population en général, la volonté de faire revenir l’essentiel de la production en France pour les modèles électriques, et le fait à court et moyen terme de relancer une marque de sport de luxe qui deviendra Alpine.

Au sujet d’Alpine, on a droit à une longue et passionnante parenthèse avec les designers et metteurs au point de la A110 puis des autres prototypes dans les tuyaux expliquant que De Meo les poussaient à se dépasser. Tout au long de cet épisode, on a aussi des images totalement inédites et jamais vues de ce qui sera LE point pivot de l’avenir de Renault: les premiers tours de roues de la future Renault 5, conduite pour la première fois par De Meo lui-même.

Traverser les tempêtes 

Le second épisode est consacré aux éléments qui aideront le groupe, alors en très grande difficulté au niveau financier, à remonter le cap et « Traverser les tempêtes », du nom de l’épisode. Pour cela, le groupe dispose d’un champion encore mal détouré et utilisé: Dacia. Le principal but dans cet épisode sera d’assister à travers les intentions de De Meo, les témoignages des pontes de Dacia et de l’orientation technique et marketing (a travers des réunions auxquelles nous assistons) à la montée en puissance de la marque, qui va chercher à se détacher de ses origines modernes de constructeur low-cost pour arriver à une orientation outdoor plus proche des généralistes, avec l’arrivée du Duster 3 puis du Bigster qui chercheront à atteindre et séduire des clients ne regardaient pas la marque jusque là.

La transition de la marque au niveau marketing s’accompagnera donc d’une nouvelle identité visuelle, d’un nouveau logo et d’un nouveau design général. A cela s’ajoutera un pari sportif, le développement d’une voiture qui se lancera sur le Dakar avec des pilotes émérites et reconnus.

Fighting spirit

Traverser les tempêtes, il y en avait besoin dans la division sport qui montrait des résultats décevants après un bon départ en 2023. Renault F1, rebaptisée Alpine pour accompagner la montée en puissance de la marque sur le marché a commencé à beaucoup se chercher. C’est pour cela que Luca De Meo décide de se rendre face aux équipes française et britannique et de tirer la sonnette d’alarme dans une froide colère. De Meo décidera de faire participer les deux équipes à un camp d’entrainement extreme dans une base du GIGN afin de renforcer les liens humainement pour aller dans une même direction.

Le troisième épisode baptisé « Fighting Spirit » suit en grande partie ce camp d’entraînement puis les résultats qui suivront sur le plan sportif, avec dans une intention voulue d’unifier les équipes sportives, le lancement simultané des programmes Formule 1 et Endurance, avec les 24 Heures du Mans dans le collimateur.

D’un autre coté, on suit la montée en puissance de l’équipe publicitaire qui prépare l’annonce puis la présentation officielle de la gamme Iconic, tout le travail qui a été nécessaire pour redonner un semblant de frémissement à la marque Renault et la volonté de revenir en force sur l’esprit de la marque et les souvenirs bien connus (les voitures à vivre, la musique de Robert Palmer, les circuits 24 d’antan). Le documentaire suit donc l’arrivée récente d’Arnaud Meloni en 2020, Directeur Marketing Global en charge de lancer ce nouvel esprit de reconquête pour la marque avant le lancement de la R5. La demande est claire de la part de Luca De Meo pour les équipes marketing: « Renault est sauvée avant l’arrivée de la R5 », et cette dernière sera le clou du spectacle pour le public.

Le futur est déjà là

Pour ce dernier épisode, on s’intéresse aux premiers pas de Dacia dans les préparatifs du Dakar, puis du clou de la mise au point de la R5 avant fabrication et commercialisation avec toute l’attention pointée sur les détails. L’échange avec les équipementiers devant un modèle de pré-série sur lequel sont pointés des défauts vaut au passage son petit pesant de cacahuètes, avec une étrange tendance à des regards fuyants et des moues boudeuses autour de la voiture. On assiste aussi aux premiers résultats en demi teinte de l’équipe d’endurance, qui se retroussera les coudes. Enfin, nous sommes les témoins de la réouverture du Groupe – revenu en forme – à la reconquête de nouveaux marchés comme l’Inde.

Le documentaire laisse deviner ici par sa conclusion tout le chemin parcouru en seulement 4 ans et la refonte totale de l’image du Groupe et de sa structure, quelques éléments ayant été volontairement « oubliés » dans ces colonnes pour la surprise. Et la confiance se synthétise en une image, exclusive pour le documentaire: le concept de la R5 Turbo 3E est dévoilé sous nos yeux en présence de Luca de Meo et de Gilles Vidal, qui annoncent tout à fait « officieux-ellement » le probable passage a la petite série de ce modèle.

Que penser du documentaire ?

En avant propos, il ne faut pas perdre à l’esprit que ce documentaire – même si il est fait avec toute la meilleure volonté et les meilleures qualités du monde – va immanquablement servir les intérêts de communication du groupe Renault. Cela n’est pas une tare en soi, mais ceux qui s’attendent à une critique ouverte du fonctionnement ou une remise en cause des plans annoncés seront plutôt déçu, mais ce n’est visiblement pas pour ces intentions qu’« Anatomie d’un come-back » a vu le jour.

On y parle notamment de la réorganisation du Groupe en deux entités consacrées d’un coté aux projets thermiques et de l’autre au coté électrique de la production qu’est Ampere. On justifie la création d’Ampere mais on n’aborde pas la volonté de faire entrer en bourse la division et le relatif fiasco qui entraine le rétropédalage de Renault à ce sujet. Pas bien grave, l’intention n’est pas là pour le réalisateur et les créateurs de la série documentaire, mais elle aurait simplement gagnée en objectivité. 

Une fois qu’on a ce biais à l’esprit, on peut retenir une excellente production, une mise en image parfois spectaculaire, un montage très actuel et nerveux, servant de manière passionnée le sujet, donnant de la valeur ajoutée aux images. Certaines relèvent donc du jamais vu, à travers tous ces moments passés au Technocentre ou des autres lieux de développement créatif, techniques et sportifs, dans le bureau de De Meo, dans les échanges humains dont nous sommes témoins avec les équipes de développement, de marketing, de design, de course, dans les usines, sur les pistes d’essais, ou lors de réunions entre CEO Européens de grandes marques.

Nous l’avons abordés un peu plus tôt mais l’écriture est également à souligner parce que le traitement (consciemment ou inconsciemment biaisé) amène via les différents pôles traités dans le groupe à une unification vue et ressentie des efforts de chacun pour arriver aux objectifs fixés par Luca De Meo. Toute la dramaturgie de l’époque à laquelle on est entrain d’assister pour Renault nous tient en haleine. Le narrateur sur l’ensemble des épisodes est Cédric Fréour, journaliste passionné aux Echos et sur sa chaine Youtube « Sans Bornes », également producteur d’ « Anatomie d’un come-back ». Passionné dans le sens où – en dehors du documentaire – son exaltation et son amour inconditionnel de l’automobile dans toutes ses facettes le fait parfois rentrer dans des exagérations qu’on excuse volontiers. Ici, celles et ceux qui le connaissent à travers ce prisme le trouveront presque sage. Presque.

En conclusion, l’avis de leblogauto.com

« Anatomie d’un come-back » est avant tout dédié à ceux qui veulent voir les choses qu’il voient rarement, les coulisses d’un constructeur dans la conception, la mise au point technique et le processus de commercialisation de nouveaux modèles, et les échanges verbaux, parfois secs, parfois cassants, souvent constructifs et enrichissant. Le moment a été parfaitement choisi ici pour le Groupe Renault, un groupe alors dans des conditions très difficiles et non épargnées par les facteurs externes (le conflit en Ukraine notamment et l’engagement du constructeur en Russie) qui tente de se réinventer sous nos yeux, guidé par la vision de son dirigeant, un passionné d’automobile qui veut se donner tous les moyens humains et techniques pour réussir. L’histoire est belle et toute trouvée pour donner un fil conducteur vers une rédemption très cinématographique dans les moyens mis en oeuvre sur le plan de la production. Un beau témoignage d’un changement d’époque qu’il convient de prendre pour ce qu’il est: une ode à la gloire de son dirigeant et un support avéré en marketing pour marquer encore plus les esprits à l’aube de la commercialisation de la gamme Iconic encore en cours.

« Anatomie d’un come-back » est une série créée par Nicolas Valot et Cédric Fréour, réalisée par Stéphane Gillot, Marlies Demeulandre et Julie Robert, disponible sur Amazon Prime Video depuis le 13 Décembre dernier.

(4 commentaires)

  1. Je suis extrêmement ravi de voir la forme de Renault… d’abord par patriotisme et pour mon portefeuille d’actions.
    Néanmoins, je vais radoter encore une fois, je suis très inquiet pour l’avenir.
    Renault ne peut pas partager… Ou très peu… Ses excellentes plateformes VT/VE… Surtout les VE coûteuses avec d’autres labels.
    J’aimerais les voir fusionner ou s’unir avec un Tata à parts égales pour ne pas se faire « bouffer » par un Chinois.
    Après… s’ils peuvent rester indépendants et racheter des marques… Pourquoi pas !?
    Mais Renault, Dacia, Alpine , Mobilize, c’est encore trop léger pour ne pas se faire manger.

  2. Bof, autant la fiat 500 thermique a été une révélation et j’en ai possédé 2, autant celle là me laisse de marbre…..chère, grasse et électrique, pneus énormes qui laisse présager une maintenance onéreuse, pour résumer bourgeoise et hors cible sinon le boomer gentrifié parigo et il ne la prendra pas en jaune car la couleur leur file des aigreurs depuis les gilets mdrrr

    1. « …. le boomer gentrifié parigo et il ne la prendra pas en jaune car la couleur leur file des aigreurs depuis les gilets mdrrr » 😆👍
      C’est pas Faux !

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