Global Bioenergies, la start-up - désormais cotée en bourse - spécialisée dans ce qu’on appelle la chimie verte, vient d’annoncer avoir réussi à produire de l'isobutène à partir de paille de blé. Ce composé rentre notamment dans la fabrication des carburants et des plastiques.
Accent sur l’isobutène
Global Bioenergies est une entreprise française produisant des hydrocarbures légers à partir de produits issus de l'agriculture, par des méthodes biologiques. Elle est l’une des rares sociétés au monde et la seule en Europe à développer un procédé de conversion de ressources renouvelables en hydrocarbures.
La société s’est focalisée dans un premier temps sur la fabrication biologique d’isobutène, une des plus importantes briques élémentaires de la pétrochimie qui peut être convertie en essence, kérosène, ingrédients cosmétiques, plastiques et élastomères. Global Bioenergies continue d’améliorer les performances de son procédé, en menant des essais sur son démonstrateur industriel en Allemagne et prépare la première usine de pleine taille au travers d’une Joint‐Venture avec Cristal Union - le n°2 du sucre en France - nommée IBN‐One.
Innovation avec la paille de blé
Jusqu’à présent, la société avait pu réussir à produire de l'isobutène dans les mêmes conditions ( à l’échelle de son démonstrateur) à partir de sucre de betterave. Elle cherchait à dupliquer sa technologie de fermentation utilisant des bactéries génétiquement modifiées avec d'autres types de ressources végétales, dont la paille de blé.
Elle a signé un partenariat en ce sens, notamment avec le chimiste suisse Clariant. En 2017, elle a obtenu un financement de 9,8 millions d'euros de l'Union européenne. Ces essais s’inscrivent dans le cadre du projet OPTISOCHEM, sélectionné et financé par le Bio Based Industry – Joint Undertaking au titre du programme programme européen H2020 de soutien à la recherche et à l’innovation, suivant une procédure très sélective menée par des experts indépendants.
Le BBI-JU, partenariat public-privé entre l’Union européenne et le Consortium des Bio-Industries (BIC), vise « à concrétiser le potentiel de la bio-économie en Europe, via la transformation de résidus et déchets biologiques en produits du quotidien plus respectueux de l’environnement, en s’appuyant sur des technologies innovantes et des bio-raffineries amenées à devenir le cœur de la bio-économie. »
Ce projet vise à créer une nouvelle chaîne de valeur associant le procédé Bio-Isobutène de Global Bioenergies et les technologies développées par Clariant et INEOS, deux des plus grands groupes de chimie en Europe : la paille de blé résiduelle - aujourd’hui sous utilisée selon la société - a été convertie en bio-isobutène renouvelable de deuxième génération à l’échelle d’un démonstrateur puis sera transformée en oligomères et polymères utilisables pour des applications dans les lubrifiants, les caoutchoucs, les cosmétiques, les solvants, les plastiques, ou encore les carburants. La coopération en terme de R&D se poursuivra jusqu’en mai 2021.
La société prévoit d’ores et déjà de produire plusieurs tonnes de bio-isobutène à partir de cette nouvelle matière première au cours des prochaines étapes du projet.
Markus RARBACH, Directeur Biocarburants et dérivés de Clariant a indiqué à cette occasion que ce projet mettait « en lumière une chaîne de valeur clé de la bio-économie : les bio-raffineries de pointe reposant sur les résidus agricoles. »
Selon Global Bioenergies, les avantages fiscaux associés aux biocarburants
en Europe et aux Etats-Unis devraient permettre d’atteindre la profitabilité, pour quelques premières usines, dès un prix de pétrole à 50$ le baril.
Prévoir l’après pétrole
La production de ce type de carburants dits « drop-in » laisse entrevoir « la continuité des filières au-delà de l’épuisement du pétrole, et fait disparaitre la nécessité d’installer des infrastructures supplémentaires pour le stockage, le transport, ou la distribution » précise par ailleurs la société.
Partenariat avec Audi
Global Bioenergies précise par ailleurs que Audi a d’ores et déjà souscrit à cette vision, les deux sociétés étant partenaires.
En effet, le 5 avril 2018, la société a utilisé pour la toute première fois un mélange d’essence conforme à la norme EN228 contenant plus de 34 % de dérivés d’isobutène renouvelable pour alimenter un véhicule.
Figurent dans cette essence de l’isooctane, obtenu par la condensation de deux molécules d’isobutène suivie d’une hydrogénation et de l’ETBE, obtenu par la condensation d’isobutène et d’éthanol. Avantage de taille : ces deux composés, jusqu’à présent produits sur base fossile, sont d’ores et déjà autorisés à la vente pour toutes les voitures essences, sans précaution particulière. Global Bioenergies précise par ailleurs que ces deux composés sont des additifs hautes performances (indice d’octane élevé égal ou supérieur à 100) jusqu’alors produits à partir de pétrole fossile.
Une Audi A4 2.0 TFSI a été choisie pour réaliser ces premiers essais, en situation réelle et non plus sur banc moteur, sur le circuit de Montlhéry.
Reiner Mangold, directeur du développement durable pour Audi, avait alors déclaré que l’objectif du partenariat avec Global Bioenergies était de développer de l“e-benzin” (nom donné par Audi à cette nouvelle essence de synthèse d’origine renouvelable) pour ses clients. « Les effets potentiels sur les économies de CO2 et la réduction d’émissions associés aux carburants synthétiques drop-in sont d’importants atouts pour notre stratégie e-carburants » avait indiqué le constructeur. »
Sources : Global Bioenergies, AFP, Audi