Genève 2018 : Tavares exhorte les Etats à booster les réseaux de recharge
par Elisabeth Studer

Genève 2018 : Tavares exhorte les Etats à booster les réseaux de recharge

Lors d'un échange avec des journalistes mardi dans le cadre du PSA, a appelé les Etats européens à s’engager sur le déploiement d’un réseau de recharge  d'une densité suffisante pour pouvoir accompagner le développement des véhicules électriques.

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Lors d'un échange avec des journalistes mardi dans le cadre du salon de Genève, Carlos Tavares, patron de PSA, a appelé les Etats européens à s’engager sur le déploiement d’un réseau de recharge  d'une densité suffisante pour pouvoir accompagner le développement des véhicules électriques.

Sautant, tel le kangourou moyen, sur la perche tendue, pour pouvoir justifier un certain manque de réactivité de PSA sur le dossier - voire quelques lourdeurs ou retards -  Carlos Tavares a assuré que son groupe était prêt à démarrer l'électrification de sa gamme dès l'année prochaine... Tout en exprimant, en parallèle, des doutes sur le niveau de la demande clients en l'absence d'un réseau de chargeurs de batteries suffisamment dense. Remettant ainsi en cause les possibilités d'un retour sur investissement rapide. Le nerf de la guerre.

Carlos Tavares exhorte les Etats à créer une densité minimum du réseau de recharges

"Les Etats doivent prendre des engagements minimaux sur la densité du réseau de charge", a ainsi déclaré Carlos Tavares lors des journées presse du GIMS, ajoutant qu'il soumettrait dès cette semaine cette proposition au conseil de l’ACEA, l’Association des constructeurs européens d’automobiles.

Pour le patron de PSA, le déploiement d’un tel réseau devrait être assorti d’objectifs - définis un ou deux ans en amont - concernant les plafonds d’émissions de CO2 fixés aux constructeurs automobiles. "Il y a maintenant une responsabilité citoyenne des Etats qui est de s'engager sur la densité minimale des réseaux de chargement de véhicules électriques, en amont des dates qui ont été fixées pour atteindre les objectifs de CO2" de l'Union européenne, a ainsi déclaré Carlos Tavares, lors d'une table ronde avec des journalistes.

Le patron de PSA demande aux pouvoirs publics de garder le cap qu'ils ont eux même défini...

"Il y a une maintenant une responsabilité claire des Etats. Ils ont choisi la technologie électrique qu’ils jugent être la meilleure, donc nous allons tous dans cette direction", a également poursuivi Carlos Tavares. Laissant ainsi entrevoir qu'un retour en arrière -voire une remise en cause des choix stratégiques  - s'avéraient désormais impossibles. Compte-tenu notamment des sommes en jeu et des lourdeurs des procédés industriels.

Autre point - et non des moindres ! - le patron de PSA a fait part de doutes subsistant quant à l'intérêt du basculement vers l'électrique, voulu par les Etats. "Du point de vue sociétal, il y a encore beaucoup de zones d'ombre sur la propreté de l'énergie électrique que nous utiliserons, sur ce que deviennent les recettes fiscales des carburants, sur l'empreinte carbone de la fabrication des batteries, du recyclage des batteries, de l'extraction des matières premières", a-t-il déclaré. Ouh là ! Cela a le mérite d'être franc !

L'attaque sur le réseau de recharges pour faire diversion ?

On se doit de noter que cette requête voit le jour alors même que le constructeur a annoncé mardi à Genève qu’il disposerait dès le début 2019, de trois lignes de fabrication de moteurs essence de dernière génération en Europe. Politique industrielle menée en grande partie en vue de faire face à la baisse des motorisations diesel. En attendant d'être plus performant en termes d'offres électriques et hybrides …

Quoi de mieux que de pointer les faiblesses des «  copains » ? Quand soi-même on est loin de se situer en position de force. Surtout pour pouvoir réagir aux tendances du marché à défaut d'avoir pu les anticiper...ou les financer.

Rappelons, que les constructeurs doivent réduire leurs émissions de CO2 à 95 grammes par kilomètre en moyenne sur leur gamme d'ici 2021 en Europe, contre 130 grammes en 2015, sous peine de se voir imposer de lourdes amendes par véhicule. Des contraintes qui ne font toutefois pas peur à Carlos Tavares. Lequel affirme que PSA respectera ces objectifs et sera en mesure de fournir à l'heure des voitures électriques. "Nous sommes très bien outillés du point de vue technologique, avec des technologies propres à PSA, pour nous positionner fortement dans le monde des véhicules électrifiés", a-t-il assuré.

Alors, le fait de pointer du doigt les faiblesses du réseau de recharges électriques ne serait-il au final qu'une stratégie pour tenter de noyer le pauvre poisson en détournant les regards d'un certain manque de réactivité de PSA en matière d'adaptation de ses offres au déclin du diesel ? Méthode de communication qui se veut avant tout efficace à défaut d'être fair-play ? On vous laisse juge. A moins, au final, qu'il ne s'agisse avant tout d'un crucial problème financier, qu'on se doit de reconnaître.

La très douloureuse question du financement et du retour sur investissement …

Car, mieux encore, Carlos Tavares a enfoncé le clou là où cela fait mal : le financement. "Ce sont les Etats qui doivent financer les infrastructures", a-t-il même martelé. "On ne peut pas pousser des véhicules sur le marché vers des clients qui seraient réticents à les acheter".

Laissant ainsi la responsabilité d'un éventuel échec commercial - et donc financier - de PSA en matière de motorisations électriques aux mains des pouvoirs publics. Lesquels ont - selon lui - les cartes en mains pour pouvoir assurer une rentabilité aux choix stratégiques que les constructeurs sont à l'heure actuelle contraints d'opérer avec une grande - et coûteuse - réactivité. Sans être assuré d'un retour sur investissement en rapide. Et ce, d'autant plus si les infrastructures ne suivent pas. A quoi sert de courir …. et devoir avancer des sommes monstrueuses …. si le réseau de recharge ne suit pas ?

Ainsi, le message de Carlos Tavares se veut des plus fermes. Il faut dire que l'enjeu – financier – est de taille ! Selon lui, "il y a une deuxième responsabilité". Il estime en effet qu'il "ne suffit pas de choisir la technologie" … "encore faut-il créer les conditions pour que les consommateurs puissent acheter des véhicules électriques en se disant qu’ils vont pouvoir les charger" déclare-t-il en lançant un débat crucial.

"Cela fait quatre ans que nous dépensons beaucoup d'argent pour ces technologies et, malgré cet argent que nous avons dépensé, nous avons les résultats financiers que vous connaissez", a tenu à rappeler à ce sujet Carlos Tavares. Faisant ainsi références aux bénéfices records annoncés la semaine dernière. Aussi, coupant l'herbe sous le pied aux éventuels reproches d'un manque d'investissement de PSA dans le domaine. N'ayez crainte, prudent, Carlos Tavares a bien fait balayer devant sa porte avant de s'exprimer sur le sujet.

Plus encore, le patron de PSA a affirmé que son groupe était en mesure d'investir pour préparer son groupe aux ruptures technologiques en cours, également en matière de voiture connectée et autonome.

Un réseau de recharge structurant

Pour que le marché puisse réellement décoller, PSA estime pour sa part comme ratio optimal de pouvoir disposer un point de charge pour dix voitures électriques.

Si on fait un parallèle avec le thermique, le réseau des stations de carburant n'a pas été créé par l'Etat mais par des entreprises pétrolières. Pourquoi n'en serait-il pas de même avec les points de recharge ?

A  noter que, déjà en 2010, dès le début de son offensive électrique, Renault avait lui aussi pointé du doigt la lenteur du déploiement du réseau public de recharge. D'autres concurrents ont décidé de déployer leur propre infrastructure de recharge. On pensera à Tesla avec ses super-chargeurs, mais aussi Nissan et d'autres.

Histoire de démontrer le côte structurant du dossier et ses efforts en la matière, tout en permettant d'accélérer le mouvement, PSA a  quant à lui signé mardi un partenariat avec Digital Charging Solution (DCS). Ce dernier devrait permettre aux clients de Peugeot et Citroën de se brancher sur le réseau français de stations de recharge électrique de DCS, filiale de BMW. Son application, dénommée ChargeNow permet aujourd'hui d'accéder à 6.360 stations de recharge électrique en France – dont 460 à charge rapide. D'ici la fin de l'année, ce réseau devrait monter à 9.000 unités.

Crédit Illustration : PSA

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