Les sociétés pétrolières vont désormais pouvoir "s'engraisser" au sens propre et au figuré. Le groupe ConocoPhillips va ainsi se lancer dans la fabrication du diesel à partir de graisse animale qui sera fournie par le groupe agroalimentaire Tyson Foods, ont annoncé les deux groupes lundi.
Les Etats-Unis n'ont pas la "primeur" de cette "pratique", puisque le groupe de raffinage d'huiles Daudruy Van Cauwenberghe a débuté en janvier dernier la construction d'une usine de biodiesel à Dunkerque en vue de produire 100.000 t de carburant à partir de graisse animale.
L'accord prévoit que Tyson enverra des graisses de boeuf, de porc et de poulet aux raffineries de ConocoPhillips, pour fabriquer du diesel. La production devrait démarrer courant 2007 pour atteindre environ 665 millions de litres par an.
Les deux groupes expliquent que ce diesel "renouvelable" pourra être produit dans les raffineries existantes avec un processus de dépolymérisation thermique. Ce diesel respectera toutes les normes et pourra être utilisé dans les véhicules actuels. A l'heure actuelle, les biodiesels sont surtout élaborés à partir d'huiles végétales, et dans des sites spécialisés.
Ce diesel sera incorporé au diesel classique, pour produire un diesel mixte qui respectera toutes les normes et qui pourra être utilisé dans les véhicules actuels. L'incorporation de graisse animale améliorera même ses capacités d'allumage, selon Conoco.
Pour produire un baril de 160 litres de diesel renouvelable, il faudra autant de graisse animale, soit deux boeufs, ou 16 cochons ou 1.300 poulets, selon Tyson. Le groupe produit environ 1,2 milliard de litres de graisse animale par an, dont 58% seront dédiés à la fabrication de diesel à terme. Actuellement le groupe vend la graisse aux industries de cosmétiques, de savons et de nourritures pour animaux domestiques.
Conoco pourra ainsi s'acheter à bon compte son certificat de bonne conduite (c'est le cas de le dire) - en y retirant même quelques bénéfices - alors qu'il est soumis actuellement à des pressions pour fabriquer des carburants alternatifs.
Tyson devrait enfin pouvoir profiter de l'essor des biocarburants, alors que jusqu'ici la "mode" de l'éthanol extrait du maïs n'a entraîné pour les groupes d'élevage que des coûts supplémentaires, causés par la hausse du prix du maïs destiné à nourrir les animaux. Avec l'éthanol, "c'est le producteur de maïs qui en profite, ici il y aura davantage de gens" qui profiteront des énergies alternatives, a ainsi souligné le PDG de Tyson Richard Bond.
Ce diesel coûtera plus cher à fabriquer que le diesel classique mais le gouvernement américain vient de décider qu'il pourra bénéficier d'un bonus fiscal. Le produit doit encore recevoir l'autorisation de l'Agence de protection de l'environnement.
Pour revenir à notre bon vieux continent, sachez que le groupe de raffinage d'huiles Daudruy Van Cauwenberghe vient de débuter la construction d'une usine de biodiesel à Dunkerque. DVC créera une filiale, Nord-Ester, pour exploiter cette usine, qui doit être mise en service à la fin de l'année, et qui produira 100.000 tonnes de biodiesel par an, à partir de graisses animales. L'investissement est de 25 millions d'euros. Interrogé sur la concurrence de Total et Diester Industrie, qui s'implanteront également dans la région, M. Daudruy a affirmé que « chacun trouvera sa place. Les quotas alloués par le gouvernement aux producteurs couvrent les besoins du marché ».
Conformément à un protocole d'accord signé avec le finlandais Neste Oil en juillet 2005, Total est en « phase finale d'étude » pour la construction d'une unité de biodiesel à Mardyck (Nord), où il raffine déjà du pétrole. Cette usine, dont la date d'entrée en service n'est pas connue, produirait 200.000 tonnes par an à partir d'huile de palme et de graisses animales. Elle pourrait coûter 200 millions d'euros, selon le quotidien Les Echos , un chiffre que le groupe n'a pas confirmé. Le gouvernement souhaite passer d'une production de 400.000 tonnes de biodiesel en 2005 à 2,3 millions de tonnes en 2008.
Sources : AFP, Pleinchamp.com