Ce phénomène, c'est la déviation numérique. Tous ceux qui sont sur le même trajet, et utilisent la même application ou le même GPS, vont passer par le même endroit. Et des fois, cet endroit c'est une rue tranquille qui voit débouler des milliers de voitures envoyées là par les Waze, Google Map, Here et consorts aux heures de pointe.
Le dernier exemple en date est celui de Lieusaint, en Seine-et-Marne. Et l'application en cause est Waze et ses "itinéraires intelligents". Ceinturée par l'A5 et la N104 (la Francilienne), la ville est pourtant plutôt tranquille habituellement, avec un centre-ville peu encombré et des piétons à l'abri de files de voitures ininterrompues. Oui, mais cela, c'était avant, quand les voitures prenaient les "contournements" officiels. Avant donc que Waze ne dise aux automobilistes que passer par le centre-ville leur fera gagner une poignée de secondes.
Il faut dire que la ville est au niveau du raccordement entre N104 et A5. Ce raccordement crée des bouchons quotidiens. Ainsi, Waze a trouvé plus intéressant de passer par la ville. Nuisances sonores, pollution, trajets des enfants pour aller à l'école devenus plus dangereux. Le Maire Michel Bisson a dit stop !
Pour contrer les algorithmes des GPS connectés et dits intelligents, il a carrément installé 6 feux tricolores et changé le plan de circulation de sa ville ! Obligé de rendre son centre-ville hostile aux voitures pour que les GPS finissent par faire repasser les automobilistes en transit hors de sa ville. Alors que depuis 10 ans, la Mairie a remplacé les feux par des giratoires et revu son plan de circulation pour justement rendre le centre-ville plus fluide et diminuer les bouchons.
Embêter la vie de ses concitoyens pour éviter les bouchons !
Selon Le Parisien auquel Michel Bisson s'est confié, les premières mesures ont visiblement porté leur fruit puisque le trafic a baissé de 40 à 50%. Incriminé, Waze a aussi revu ses algorithmes pour éviter les passages près des écoles ou via des rues résidentielles. Mais, le maire veut aller plus loin en mettant le 30 km/h partout en ville.
Ce n'est malheureusement pas le premier cas du genre. Et tous les GPS ou presque sont touchés par le phénomène. Les automobilistes les suivent aveuglément, et des fois le trajet le plus rapide se termine sur un chemin de ferme ou a travers une rue paisible qui se transforme en périphérique deux fois par jour. Aussi, le problème est international, et touche aussi bien les grandes-villes que les villages perdus.
C'est tout de même aberrant et navrant qu'un maire doive "pourrir" son plan de circulation pour que la ville ne soit pas envahie du trafic en transit. Les habitants de ces communes se retrouvent alors "punis" par la faute des applications GPS dites intelligentes. Une solution pourrait être de contraindre les applications GPS à avoir des "zones blanches" de transit et ainsi éviter les centres-villes quand la destination n'est pas dans la ville et qu'un contournement existe.
Aux USA, la ville de Leonia dans le New-Jersey a dû en 2017 interdire quasiment la totalité de ses rues aux non résidents de 6 à 10h et 16 à 21h à cause d'un problème similaire.
Illustration : T. Emme/Leblogauto.com, Google