Gilles Vidal est capable de faire autre chose que du Gilles Vidal. Formule un peu rapide s'il en est, mais regardez-moi ce Renault Emblème. Il est tout en rondeurs, à l'opposé des créations du Français chez Peugeot puis chez Renault. Est-ce un "manifeste" du style des années à venir chez Renault ?
Pour le style, on a un "véhicule galet", avec des courbes qui se croisent, se coupent et dessinent les formes sans créer de cassure. A l'avant, la signature lumineuse change encore avec cette fois deux traits qui sont deux côté du losange Renault. Des pointillés relient les deux blocs optiques fins et passent derrière un logo mis en avant sur une "plaque". Le capot est percé avec des entrées d'air à sa jonction avec la "calandre". Ces flux d'air sont là pour améliorer la consommation du véhicule.
Difficile de dire si c'est un SUV, un CUV, une berline, ou autre. Renault parle d'un "shooting brake". On sait qu'il mesure 4,80 m de long et 1,52 m de haut (un Scenic E-Tech c'est 1,57 m avec les barres de toit NDLA). "[Emblème] réaffirme également la volonté de la marque Renault de continuer à innover sur les segments C et supérieurs" nous dit le constructeur.
L'arrière est sans doute plus discutable (c'est une histoire de goûts après tout). C'est assez confus dans le trait, mais sans doute dicté par des lois aérodynamiques. Les feux sont dans un espèce d'ovale en creux qui doit permettre, on suppose, de décrocher proprement le flux d'air et minimiser les turbulences. Il y a du Zagato dans cet arrière. Le bouclier arrière est percé par de larges formes. Là aussi sans doute une fonction aéro. Les feux reprennent la signature lumineuse avant avec deux côtés du losange.
Evidemment on est sur un concept, mais on peut tout de même noter que la lunette arrière est symbolique. Coincée qu'elle est entre un toit qui retombe (avec un béquet) et une carrosserie très haute. Sinon il est des atours de SUV ce Renault Emblème avec des ailes très épaulées et des arches de roues marquées par des plis, et des "élargisseurs" noirs. Gilles Vidal oblige, les jantes sont tarabiscotées, et pleines il faut le noter, pour limiter les turbulences générées.
L'hydrogène comme solution
Mais, ce Renault Emblème est aussi un "manifeste" technique. En effet, il a été pensé "du berceau à la tombe". C'est-à-dire que l'on anticipe toutes les étapes de la vie du véhicule, mais aussi sa fin, pour minimiser son empreinte écologique.
Renault parle d'émission de CO2e (équivalent CO2) en baisse de 90% par rapport à un véhicule thermique d'aujourd'hui. Comment ? Déjà, il utilise de nombreuses matières recyclées à faible empreinte carbone. C'est la généralisation du renouvelable, de la circularité. Ensuite, le véhicule par sa forme, est très efficient. On peut noter dans les détails les caméras rétroviseurs intégrées aux arches de roues, mais aussi fond plat comme sur les voitures de course. A l'arrière, un diffuseur actif participe à minimiser la traînée et donc la consommation. Au final, Emblème c'est un Cx de 0,25. Pas si pire (mais d'autre berlines font mieux NDLA).
Vu son gabarit, Emblème pèse lourd. Oui. Renault indique viser une masse de 1 750 kg. C'est beaucoup pour un véhicule, mais c'est moins que les SUV hybrides ou électriques du même gabarit. Pourquoi ne pas comparer avec un simple thermique ? Car il serait battu évidemment. Mais aussi car sous ces aspects tout joli tout beau se cache une motorisation bi-énergie. Tiens comme Hopium qui a jeté l'éponge.
Ce Renault Emblème est électrique (encore). Mais, alors, pourquoi parler de bi-énergie ? Car il dispose d'une batterie classique que l'on peut recharger au quotidien. Mais, il a aussi une pile à combustible à hydrogène pour les trajets plus longs que le quotidien. Et Renault arrive à tout loger sur une plateforme AmpR Medium !
Le moteur électrique est à rotor bobiné de 160 kW de puissance. Renault indique qu'il est dépourvu de terres rares. Une batterie de 40 kWh (tout de même) en chimie NMC (Ah...Lithium nickel manganèse cobalt, ben là y a du "cracra") est choisie car elle permet une meilleure densité. Elle est donc moins grosse, moins lourde que d'autres chimies. Enfin, il y a une PàC PEMFC 30 kW (*). Elle est alimentée par de l'hydrogène via un réservoir de 2,8 kg de contenance. Renault parle d'un rendement max de la PàC de proche de 60%. Tiens, là encore une PàC demande des métaux précieux, rares, et dont l'extraction est décriée.
Ce "Range Extender" puisque c'est sa fonction, permet selon Renault de faire 1000 km dans "un temps équivalent à celui d’un véhicule thermique". "Juste" deux pleins de dihydrogène (H2) qui rajoutent 350 km d'autonomie. Le "demo car" sera exposé au Mondial de l'Automobile d'ici quelques jours. C'est l'effervescence cette année avec le retour de plein de constructeurs qui boudaient le salon ces dernières années.
Notre avis par leblogauto.com
Pour le style du Renault Emblème, on laissera chacun juge. Le style est dicté par la fonction et cela peut donner des choses...bizarres dirons-nous. Mais cela change du sempiternel style Vidal.
En revanche, le discours "faible empreinte" et autre. On est mitigé. Pourquoi ? Car autant, on sait que la France peut, grâce à une énergie fortement décarbonée (merci le nucléaire) avoir une industrie plus propre et à l'empreinte carbone plus faible qu'ailleurs, autant, on est dubitatif sur l'emploi, une nouvelle fois de l'hydrogène.
Evidemment, dans le discours, on prend du H2 vert et forcément, cela diminue d'autant le bilan carbone. Dans les faits, Renault passe très vite fait sur l'empreinte de la batterie NMC, mais aussi de la PàC avec ces métaux précieux très énergivores à extraire (sans parler des conditions d'extraction). En bref, au-delà du discours, on ne demande qu'à être convaincu...
Ah, si. A noter que le réservoir de H2 doit, comme tout contenant de H2 gazeux, avoir des fuites. Si on n'utilise pas le H2 régulièrement, il y a de forts risques que le réservoir soit vide quand on en aura besoin. Un détail. 1 750 kg, ce n'est pas très écolo en fait.
(*) PEMFC = Proton-exchange membrane fuel cell