Je t’aime, moi non plus : MG ZT 260 (I)

Souvenez-vous de l’été 2001. Lâché par BMW, dépossédé des pépites Land Rover et MINI, Rover Group se voyait reléguer au rang de constructeur régional. Placé sous l’égide du consortium Phoenix et rebaptisé MG Rover, le miraculé situait alors le seuil de rentabilité de son unique usine de Longbridge à 200.000 voitures par an. Une misère qui, comme toute prévision, ne sera jamais atteinte. Dans un contexte financier à faire détaller illico la plus téméraire des sociétés de capital risque, les diseurs de bonne aventure agenouillés au chevet du malade implorèrent la fée tuning contre les mauvais augures des analystes. Le coup de baguette magique qui changea la pompeuse Rover 75 en MG ZT m’as-tu-vu aurait laissé plus que sceptique s’il n’eut annoncé une mutation à moteur V8 Ford.

Des 500 chevaux expérimentaux destinés à appâter le journaleux, il en n’en restera que 385 pour le show-car X Power puis 260 en configuration client, car la bête ne se contenta pas de faire son intéressante devant les objectifs. En septembre 2003, elle s’abandonna à la commercialisation en série au Royaume Uni avant de traverser le Channel quelques semaines plus tard. L’opération semblait tenir du Saint-Esprit. Quand des géants tels PSA ou Renault ne jugeaient plus rentable de porter assistance à leur vaisseaux amiraux en perdition commerciale, le nain MG Rover, le pied dans la tombe et l’épée de Damoclès sur le point de rompre, se lança dans des investissements certes porteurs d’image mais sans commune mesure avec sa réalité financière.

Faire passer une traction à moteur transversal au stade de propulsion, y implanter longitudinalement un V8 de Mustang accouplé à une boîte de Corvette C6, modifier la coque pour y loger groupe motopropulseur et transmission, étudier une nouvelle suspension arrière, faux châssis compris, dédier une chaîne de montage spécifique à l’engin, tout cela pour un résultat invisible à l’illettré technique moyen, cela ne tenait plus du risque industriel mais de l’héroïsme pur. Pari à quitte ou double ou naïveté de dirigeants amateurs ? Déjà en 2001, MG Rover avait racheté la petite société américaine Qvale dans le but de commercialiser à des tarifs surréalistes un fantasme de boutonneux tout droit échappé de Fast and Furious, la MG X Power SV. Les capitaux dilapidés dans ces attractions de foire n’eurent-ils pas été mieux investis dans le remplacement du coeur de gamme, la Rover 45, que le poids des ans et des liftings successifs usèrent jusqu’à la corde ?

La postérité jugera. En attendant, la MG ZT 260 possédait le charme émouvant d’un baroud d’honneur et l’extravagance assumée d’une berline sportivo-folklorique. Rien que pour cela, on lui aurait beaucoup pardonné, ses défauts rédhibitoires devenant dès lors ses plus touchantes qualités. Et comme bien souvent chez les productions britanniques, la présentation extérieure nous en mit plein la vue. Jantes racoleuses et grilles en nid d’abeille, c’est futile mais ça brille. Revêtues de noir verni, les rondeurs charnues et la poupe callipyge prenaient une connotation licencieuse tandis que les finitions anthracite se substituaient à la panoplie éculée des chromes et boiseries, même si cela ne faisait pas aller nécessairement plus vite. Surtout, le sigle V8 et les quadruples sorties d’échappement, oubliées après presque deux décennies de six cylindres trop timorés, réveillèrent en nous quelques jouissances auditives perdues dans la bande sonore de Bullitt.

(A suivre)

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