Gabin pour venger la mort de Dalban tué par Pousse
La Matra 530 apparaît dans le film « Le Pacha » de Georges Lautner avec des dialogues signés Michel Audiard. A l’affiche, Jean Gabin au sommet de son art, en compagnie des « gueules » habituelles comme Robert Dalban, André Pousse, etc.
La musique du générique est sans doute ce qui reste le plus dans la culture populaire puisque c’est Serge Gainsbourg qui compose (et apparaît dans le film dans son propre rôle) le fameux « Requiem pour un con » (cf. plus bas). Certaines répliques sont même cultes dont le fameux « Je pense que quand on mettra les cons sur orbite t’as pas fini de tourner ».
Venons-en à la Matra 530. C’est la voiture dans laquelle évolue le commissaire Louis Joss, dit « le Pacha ». Sacré coup de publicité pour une voiture présentée en 67 et à l’affiche en 68. En plus, en voiture de police, pour aller vite sur les lieux du crime, et qui accepte un gabarit comme Gabin en passager avant.
Elle apparaît dans pas mal de scènes et à plusieurs reprises, Jean Gaven est au volant, Gabin en passager et un autre inspecteur est à l’arrière. Pour ceux qui connaissent les places arrières de la 530, cela devait être un festival de contorsion pour l’acteur. A ce propos, découvrant la Matra, Gabin aurait dit à Lautner : « Tu ne vas tout de même pas me faire rentrer dans ce suppositoire ? ». Et pourtant si.
Deux Matra, et pas mal de la production de l’époque
La M530 n’est pas le seul véhicule du film, on y trouve un Citroën P55 par Leffondré qui sera fini au lance-roquette, une Renault 1000 kg et une Goellette (1400kg) en faux véhicules de la Poste. Côté Citroën, il y a une inévitable DS noire ainsi qu’une version break vert clair, et même une Matra Jet 5 (une ex-Matra-Bonnet Djet devenu Jet en 67 sous la marque Matra Sports) Police avec un gros gyrophare orange.
L’histoire mêle des truands, des flics, des flics un peu ripoux, un vol de bijoux, des fusillades, et une vengeance menée par Gabin envers André Pousse. Un des chefs-d’œuvre de Lautner avec un Gabin cabotinant sans excès sur fond du rythme de batterie de la bande originale signée Gainsbourg et Colombier.
Le film fera un peu plus de 2 millions d’entrées à l’époque et est devenu l’un des polars « à la française » à avoir vu au moins une fois.
Matra, symbole de la mort de l’automobile française non généraliste
L’histoire de Matra est indissociable de celle de Jean-Luc Lagardère. MATRA (pour Mécanique Aviation TRAction) a été fondée en 1937 par Marcel Chassagny sur les ruines d’une ancienne société d’avion. Après la guerre, Matra abandonne les avions et se concentre sur l’électronique et l’armement.
Chassagny en 1962 recrute Lagardère pour en faire son dauphin. C’est sous son impulsion que Matra va se diversifier et croître. La diversification passe alors par une collaboration avec René Bonnet. Cette collaboration finira par une reprise de la société DB (Deutsch Bonnet) ainsi que du modèle Djet que Matra produira.
La Matra 530 est le successeur de la Djet. La 530 est conçue par le génial Philippe Guédon qui sera plus tard le papa de l’Espace avec le succès que l’on connait. Matra s’est spécialisé dans les petits coupés sportifs et maîtrise les carrosseries en résine. Par rapport à la Djet reprise de DB sans modification, la M530 est ambitieuse au niveau technique. La voiture, un coupé 2+2, doit être légère, avec un moteur lui aussi léger mais avec du caractère.
Lagardère veut du « sportif abordable ». La 530 aura un moteur central arrière, en V. Et sera en propulsion. La voiture est plutôt légère (840 kg de base) et le petit V4 1,7 litre de la Ford Taunus se démène comme il peut pour cracher 72 chevaux. Côté accélération ce n’est pas un foudre de guerre, mais la voiture est confortable, enchaîne bien les virages, freine bien et possède même un toit escamotable en deux parties.
Son style plait beaucoup, surtout les phares rétractables et les lignes tendues qui la parcourent. Le coffre est à l’arrière, après le moteur. Tandis qu’à l’avant se trouvent le réservoir et la roue de secours.
Une cible manquée malgré de bonnes prestations
Malheureusement, la « voiture des copains » fait payer très cher sa conception en petite série. Les « copains » ne peuvent se la payer, à moins d’être des fils à papa. Une version LX puis une SX (moins chère avec phares et toit fixes, etc.) seront ajoutées mais cela ne suffira pas à faire décoller les ventes. De l’usine de Romorantin ne sortiront que 9 600 exemplaires. Il en était prévu 50 000 au moins.
Pourtant Matra en ce temps-là était synonyme de réussite du sport automobile français. La Matra MS80 est titré en Formule 1 avec Sir Jackie Stewart en 1969. Puis il y aura l’épopée des 24 Heures du Mans avec les victoires en 1972, 73 et 74. La Matra 530 (qui tire son nom d’un missile fabriqué par Matra NDLA) n’en profite pas et cédera la place à la Bagherra, fruit de la collaboration Matra-Simca, après 6 ans au catalogue. « To be continued » comme on met dans les films américains.
Désormais, la Matra 530 possède une très belle cote d’amour. Le style plait toujours, ainsi que sa mécanique simple et solide. Mais, il faut se méfier avec la carrosserie en fibre epoxy. En effet, de nombreux modèles ont été « choucroutés » pour masquer des petits accrocs. On ne répare par la fibre comme une pièce de tôle. On trouve des modèles entre 8 000 et 25 000 euros selon les travaux à faire dessus.
Festival de cames, une série à retrouver sur Leblogauto.com tout l’été, chaque mercredi et dimanche soir…
Illustration : Matra, captures du film
Merci !
J’aime beaucoup ce billet, j’attends les suivants avec plaisir !
splendide
La Matra Djet 5 (pas Jet) est conçue à l’origine par René Bonnet en 1963 et non pas par DB. Deutsch et Bonnet ont mis fin à l’aventure DB en 1962.
En fait la Djet (née Bonnet vous avez raison et j’ai modifié) est devenu Matra-Bonnet Djet mais en 1967 c’est devenu la Matra-Sport Jet 5.
Dans le film, c’est une (ou un) Matra Sport Jet 5 que Matra fournissait à la police pour les grandes routes (mais qui ici évolue en ville de façon un peu décalée).
http://www.imcdb.org/i010533.jpg
Confere le logo (le logo de René Bonnet était sur fond blanc, avec un drapeau français et une biche (ou genre) en train de bondir vers la gauche, le logo Matra-Bonnet était le même avec la flèche Matra en fond, le logo Matra-Sports était sur fond noir comme ici).
et pour les images qui bougent il y a un épisode de l’émission TV Vintage Mecanic qui restaure une 530.
Oui en effet.
Achetée 10 et « revendue » 15,5 k€ (finalement « peu chère » quand on voit certaines annonces).
J’ai revue ce film il y a pas si longtemps et j’avais remarqué cette voiture avec un toit légèrement surélevé.
Je lui trouve une belle gueule.
Fan du film et de la voiture bien sur, la volonté de Lautner était de montrer une police «nouvelle» et moderne avec un Gabin (Joss) en fin de carrière et en total décalage avec ces nouvelles méthodes et la violence allant crescendo des truands de l’époque. D’où l’utilisation de la 530 à l’image novatrice (la fameuse voiture des copains» slogan que j’ai toujours trouvé un poil gnangnan) et allouée à son adjoint qui lui représentait cette nouvelle génération de flics.
C’est le Renault Goélette qui est attaqué au lance roquette et fini au lance flammes. Le Citroën est juste la pour transporter la carcasse à l’abri des regards indiscrets…
https://www.imcdb.org/movie.php?resultsStyle=asImages&sortBy=4&id=62092
Un site pour les obsédés de voiture et de films. Vous pouvez faire des recherches par film et voir les voitures qui y apparaissent, ou par voiture et voir dans quel film on peut les voir.
@beniot9888
j’y vais tout le temps avec des fois de belles anecdotes dans les commentaires le nombre de films référencés est impressionnant.