Jean Gabin, en tant qu’acteur ou dans sa vie, aura côtoyé de nombreuses « œuvres d’art » automobiles. Dans « Maigret et l’affaire St Fiacre », c’est une Hispano-Suiza K6 carrossée par Vanvooren.
Le film : une histoire d’héritage
Le jeune Jules Maigret a vécu une partie de sa jeunesse au château de Saint-Fiacre. Fils des métayers, il est devenu un célèbre commissaire. La comtesse de Saint-Fiacre lui demande de venir car elle a reçu une lettre anonyme lui annonçant sa prochaine mort.
Maigret se retrouve plongé dans son enfance, dans un château de vieille famille désargentée. Autour de la comtesse, des profiteurs et des vautours se disputent les restes de la fortune des Saint-Fiacre. La mort, d’une crise cardiaque de la Comtesse force Maigret à enquêter. Témoin de la splendeur passée, le commissaire forcera le fils prodigue à endosser l’habit des comtes de Saint-Fiacre.
Le film date de 1959 et est évidemment une adaptation d’un roman de Georges Simenon. C’est une production franco-italienne et le tout est filmé par Jean Delannoy qui avait déjà dirigé Gabin dans « Maigret tend un piège » dans les rues d’un « Paname » oublié. Les dialogues sont ciselés par Michel Audiard.
Le film est en noir et blanc, et l’image colle comme un chaud été. On perçoit la nostalgie de Maigret qui revient sur les lieux de son enfance. On est dans une vieille France dont on la nostalgie même si on ne l’a pas connu. Tous les personnages ont les traits un peu forcés comme le curé de campagne, le métayer, le dévoué comptable qui barbote un peu au passage. Et même le fils qui dilapide sa part de la fortune.
Hispano-Suiza une aventure espagnole qui finit en France
Jacques Marin joue Albert, le chauffeur de la comtesse. Il la conduit dans un brougham (nomenclature anglais) ou un coupé (ou coupé-limousine ?) ou bien encore un coupé-chauffeur en nomenclature française, sur base de Hispano-Suiza K6. Hispano-Suiza est un ancien constructeur automobile espagnol. Fondé en 1902 José María Castro Fernández et l’ingénieur suisse Marc Birkigt. Espagne-Suisse…Hispano-Suiza. Le nom exact est J. Castro, Sociedad en Comandita, Fábrica Hispano-Suiza de Automóviles.
Mais tout n’est pas simple. Déjà fondée sur les restes d’une première société, cette association ne tient que quelques années. Nouveau repreneur qui injecte un peu d’argent, et rebelote. Marc Birkigt reste l’ingénieur. Mais, les finances sont toujours le point faible. La Hispano-Suiza, Fábrica de Automóviles, S. A. tente de survivre, mais le marché espagnol est trop petit pour cela. La société française Hispano-Suiza est fondée en 1911 et assemblera les voitures conçues par Birkigt.
Comme bon nombre de ses concurrents, Hispano-Suiza assemblera des moteurs d’avions pendant la première guerre mondiale. C’est au sortir de cette guerre qu’Hispano-Suiza vivra sa meilleure période, jusqu’à la seconde guerre mondiale. Après la seconde guerre, Hispano se spécialise dans les transmissions de puissance et l’assemblage de moteur d’avions. Reprise par la Snecma, elle intègre le Groupe Safran suite à la fusion avec la Sagem.
Hispano-Suiza K6 carrossée par Vanvooren
La « grande crise » de 1929 a fait du mal aux grandes automobiles avec des moteurs 12 cylindres ou plus. Hispano-Suiza a la J12 mue par un V12 de 9,5 litres de cylindrée. La société est forcée d’ajouter un plus « petit » modèle à sa gamme.
Sur un châssis de J12, un 6 cylindres en ligne de 5180 cm3 est installé. Le niveau de fabrication d’Hispano-Suiza est respecté et une nouvelle clientèle veut se payer « une Hispano ». 120 chevaux officiellement, à 2000 tours/min seulement ! Par rapport à la J12, la vitesse maximale est « faible » (140 km/h) mais, les versions légères font le 0 à 100 km/h en moins de 20 secondes.
A l’époque, les carrossiers sont encore les rois. Ils partent d’un châssis nu (ou déjà carrossé) et font selon l’envie des clients. Ici, les passagers montent à l’arrière et le chauffeur est à l’extérieur. Il peut être protégé par une capote. A l’intérieur, il y a des rideaux à pampilles, et une banquette qui tient plus du sofa qu’autre chose. La K6 tient encore de la voiture à cheval.
La maison Vanvooren est une société de carrosserie française. La famille Vanvooren était déjà des carrossiers à l’époque des voitures hippomobiles. Le fils, Achille, prend la suite de son père et suit l’évolution vers l’automobile. La société est ensuite reprise par Marius Daste, le directeur technique. Vanvooren carrosse les plus belles et les plus renommées : Bentley, Hispano-Suiza, Bugatti et même Rolls-Royce. Comme beaucoup de carrossiers français, la société ne survit que très peu d’année après la seconde guerre mondiale.
La dernière des Hispano-Suiza
La K6 arrive au mauvais moment. Lancée en 1934, elle se heurte de plein fouet à la guerre civile espagnole et aux réquisitions. En France, le Front Populaire, vainqueur des élections décident de nationaliser l’industrie. Hispano-Suiza se concentre alors sur la fabrication de moteurs d’avions. Seules 206 K6 ont été fabriquées.
La K6 de la Comtesse de Saint-Fiacre arbore sur son radiateur sa célèbre Cigogne. Remplaçant le logo ailé avec les drapeaux espagnol et suisse des voitures assemblées en Espagne, la cigogne est, en France, un hommage à Georges Guynemer, l’un des plus célèbres pilotes de la première guerre mondiale. Il dirigeait l’escadrille des cigognes composée de Spad équipée de moteurs Hispano-Suiza. Les usines de Bois-Colombes étaient sises rue Guynemer.
Plutôt rares et appréciées, les Hispano-Suiza ont une belle cote. Elles restent toutefois abordables. Par exemple, en février 2018, Artcurial a procédé à la vente d’une K6 Vanvooren, dite « sans montant » (pas de pied milieu). 286 080 €. Plus rare, un cabriolet carrossé par Letourneur et Marchand avait atteint les 451 000 € en 2011.
Illustration : extraits du film, Artcurial
Hispano Suiza est la plus importante des marques de luxe de l’avant guerre. Rolls Royce selon les dire de ses propres dirigeants a eu beaucoup de mal à suivre le niveau technologique et la qualité de fabrication des Hispano.
Olympiennes, increvables, des GT avant l’heure, les Hispano sont la gloire de l’automobile française d’avant guerre.
A Bugati le sport, à Hispano le luxe.
Merci de l’avoir dit @Pananma
Merci de rappeler que l’histoire de l’automobile de luxe était une tradition très française avant-guerre.
Il y a eu un changement brutal après 1945, à ne pas faire du luxe pour des raisons obscures de politique (de lutte des classes).
Avec de la volonté, un retour est possible… Il faudra du temps et de l’argent.
Coupé Chauffeur ou Coupé de Ville sont les termes désignant ce type de carrosserie avec le chauffeur à l’extérieur.
Le coupé chauffeur ou le coupé de ville n’est pas un vrai coupé. C’est une combinaison entre un coupé à l’arrière et une voiture découverte à l’avant. Il y a donc en réalité quatre places, les deux places avant sont à découvert, pour le chauffeur, alors que les places arrière sont celles d’un coupé à toit fixe et fenêtres.
L’Hispano-Suiza de l’article est un coupé-chauffeur ou de ville équipé du tendelet au-dessus du poste de conduite.
Quand à la conduite-limousine je n’en voit pas trace.
Oui @Alban. J’ai ajouté.
Toujours très difficile de savoir vu qu’à l’époque rien n’était vraiment normé et que les carrossiers désignaient par différents noms des modèles identiques.
Dans la nomenclature anglaise, c’est un « brougham » à mon avis ou un « cabriolet victoria ». Même si on trouve aussi le terme Sedanca coupé (terme introduit par le Comte de Salamanque pour les Rolls Royce qu’ils vendaient en Espagne).
Dans la nomenclature française, c’est un « coupé » (définition 1930) vu le nombre de fenêtre latérale (1 seule) ou plus tard ce que l’on nommera un coupé-chauffeur en effet.
Il semble qu’Hispano-Suiza la nommait « coupé » trouvé dans différents musées qui en exposent). Et le Musée de Bruxelles qui dispose d’une Hispano H6C par Vanvooren indique « coupé » pour la même carroserie.
Chapron (qui travailla surtout des H6) les nommait « coupé chauffeur » (faisant même des coupés chauffeur landaulette).
Chez Franay, on mixait encore plus les appellations puisque leur carrosserie sur base de K6 s’appelait Sedanca de Ville 😀
Comme quoi cela ne date pas d’aujourd’hui les appellations confuses 🙂
Hispano-Suiza fut aussi connu par son excellent canon de 20 mm, repris sous-licence par les Anglais puis par les Américains qui a contribué en quelques sortes à la victoire des alliés.
Le dérivé américain, le Colt Mk 12, est toujours opérationnel de nos jours !
Ce n´est que très partiellement exact, la seule Chose intégralement vraie concerne la Reprise de la production par la RAF.
Tous les reste est faux.
-Les américains n´ont que très partiellement repris le HS-404 de 20mm, jusqu´à la fin du conflit ils sont restés globalement fidèles à leurs mitrailleuses Borwning de 12,7mm. Et même au-delà, le F-80 shooting star et le F-86 sabre par exemple utilisaient toujours les Browning. Plus tard ils sont passés sur un calibre 30mm sans rapport avec le HS(pour la chasse s´entend, les appareils d´attaque au sol ont utlisé le 20mm pour son poids et sa compacité). Les rares exceptions concernaient la chasse de nuit, et c´est la RAF qui assumait la grande partie de ces fonctions. Seul le B-29 a été équipé massivement de HS-404 à commande radar.
-La contribution du HS-404 à la victoire est négligeable… En face la Luftwaffe était passée à des calibres de 30mm et la MG151/20 de 20mm avait une cadence de tire supérieur au HS-404 (750 coups/min contre 600 coups/min).
Au final le grand contributeur de la victoire reste le P-51. Pas le HS-404.
Sauf que tous les Spitfire après 1940 avaient des HS 404, la quasi totalité des Hurricane à partir de 1941 (pour l’appui au sol) sur les fronts nord-africains et de l’est (au moment le plus nécessaire pour la victoire).
Les P-38 Lightning, 90 % des Typhon (la terreur des Allemands en Normandie et les Ardennes), les Tempest (le tueur des V1).
On peut même rajouter que le HS 404 continue bien au-delà de la Seconde Guerre mondiale.
Juste après guerre, 1946, l’US Navy l’adopte pour les Corsair, Skyraider, Bearcat puis les Panther/Cougar.
D’ailleurs, l’US Navy prouva que le canon de 20 mm était bien plus efficace que les mitrailleuses de 12.7 mm pour abattre les Mig-15 dans les vitesses Transsonique pendant la guerre de Corée..
Les dernières versions des F-86 n’auront que des 20 mm.
Jusqu’aux dernières missions des Skyraider aux Vietnam, vers 1973, les M3/HS404 se sont montrés redoutable.
Après pour revenir à Hispano-Suiza et les moteurs, on peut parler du (moins bon) Hispano-Suiza 12Y qui dans son cousin soviétique a énormément contribuer à la victoire, sous le nom de Klimov M-100 (103/105).
Principalement le moteur dans les avions de chasse Yakovlev Yak et les bombardiers Petlyakov jusqu’à la guerre de Corée.
On parle d’une production de 140 000 exemplaires de 1936 à 1948 !
A l’origine Hispano-Suiza n’a quand même rien de français(comme Bugatti dont le fondateur était né en Italie): un ingénieur suisse(Marc Birgikt)et des hommes d’affaire espagnols… 😉
…;-)
Enfin à part les origines espagnoles, tout est français ou sur le sol français a tout époques, conception, finances, donneur d’ordre, fabrication, etc. … pas vraiment le cas de Bugatti, enfin bref…
Personne ne dit que c’est français.
C’est même clairement précisé l’origine sur tout le début de l’historique 😉
Hispano-Suiza, Avions Voisin, Talbot…Voilà ce qu´était le luxe à la francaise, pas des Peugeot recarrossée.
Sauf mon p´tit père que le luxe ne se décrète pas, même Avec de l´argent. Les Clients exigent un patrimoine, une lignée.
Cela dit tu oublies Bugatti. Ah bah non, c´est pas francais selon tes capacités limitées.
Diantre, tu as changé d´avis sur Bugatti qui a son siège social en France? :O