Brève rencontre: Panther

En quelques années, entre le milieu des années 50 et la fin des années 60, la possession d’une voiture de collection (en particulier les modèles prestigieux ou sportifs de l’entre-deux guerre) passe d’un hobby pour garagistes retraité à ZE truc à la mode, lorsque les chanteurs pop s’y mettent (ici un détail d’un album des Beatles.)

Mais les anciennes sont difficilement utilisables au quotidien (problème de confort, de fiabilité, de performances et de prix des pièces.) D’où la vogue des « néo-classiques »: un style « ancien », mais une mécanique moderne. De l’artisan scrupuleux (mais cher) au petit malin qui vous propose un kit pour transformer votre Cox en Mercedes SSKL, l’offre était vaste.

L’Anglais Robert Jankel est créateur de mode et passionné d’automobile. En 1970, il traverse l’Espagne dans sa Rolls-Royce 1930. Un torero tombe amoureux de sa voiture et la lui achète (alors qu’elle n’est pas à vendre.) Jankel se dit donc qu’il existe un marché pour les pigeons passionnés de voitures anciennes.

Il fonde Panther (par analogie avec Jaguar) en 1972 et présente dans la foulée une J72. Calquée sur la Jaguar SS100, ce roadster deux places possède une finition très soignée. La version de série utilisera les mécaniques Jaguar contemporaines: 6 cylindres 3,8l ou 4,2l et le V12 5,3l. Malgré un prix élevé, la clientèle est au rendez-vous.

Loin de se contenter de faire de la monoculture, il multiplie les projets. En 1974, il s’associe avec Willy Felber, le spécialiste allemand du kitsch dans les années 70-80. Le résultat sera la Panther FF (parfois baptisée Felber 330 GTC.) La Felber-Ferrari reprend une plateforme de Ferrari 330 GTC pour en faire une espèce de Lotus Super Seven. Seuls sept véhicules seront produits par Panther (d’autres seront ensuite produites en France.)

Toujours en 1974, il crée la Deville. Il s’agit d’une berline au style inspiré par la Bugatti Royale (d’où la calandre en fer à cheval.) Sous le capot, le 6 cylindres 4,2l ou le V12 5,3l de Jaguar. Vendue au prix de deux Rolls-Royce pendant une dizaine d’année, sa diffusion sera évidemment limitée. Elton John, célèbre pour son bon goût, en a possédé une.

Il y eu également une version cabriolet.

Panther exécuta des projets encore plus fous. En 1974, son importateur Canadien voulait un véhicule unique pour sa femme. Ce sera le roadster Lazer… Dont la femme en question ne voudra pas. Finallement, il la revendra au prince héritier d’Iran.

En 1977, il créera la Panther 6, disposant d’un V8 Cadillac en position centrale et comme vous pouvez le voir, de six roues.

Persuadé qu’avec la crise du pétrole, les acheteurs de Rolls-Royce se tourneront vers des modèles plus modestes (mais aussi luxueux), Jankel imagine la Rio. Il s’agit d’une Triumph Dolomite « rollsisée », tant à l’extérieur qu’à l’intérieur.

Présentée en 1975, elle est vendue environ 9500£, alors qu’un Dolomite normale en vaut près du tiers et qu’une Jaguar XJ12, nettement plus noble, ne coûte « que » 7500£. Panther en vendra une quarantaine en deux ans avant de jeter l’éponge.

Panther rectifie le tir en 1977, avec la Lima, basée sur l’Opel Kadett contemporaine (alias Vauxhall Viva), dont elle reprend le 2,3l atmo ou turbo.

GT au look « retro » (mais ne s’inspirant d’aucun modèle en particulier), elle amorce le tournant de Panther qui veut devenir un constructeur de voitures de sports.

La Lima MKII, bien qu’ayant la même apparence, possède un châssis en acier inédit.

En 1979, Jankel fait faillite et se reconvertit comme carrossier. Panther est alors reprise par Ssangyong, qui fait ainsi ses premiers pas dans l’automobile. Les Coréens sont le pendant des Chinois aujourd’hui et d’aucuns les regardent avec scepticisme.

En 1982, la Kallista (ce qui signifie « la plus belle » en Grec) prend la suite de la Lima. Le carrosserie est désormais en aluminium et surtout, elle propose un large choix de mécaniques Ford.

Avec l’arrêt des J72 et Deville, elle deviendra le seul modèle de la gamme.

Au milieu des années 80, les petits coupés ont presque tous disparus. Panther veut en profiter pour se diversifier. Au salon de Birmingham 1984, elle présente la Solo, qui disposant du moteur de l’Escort XR3. Hélas, Toyota commercialise la MR qui joue dans la même catégorie (mais moins cher) et lui ressemble étrangement.

La Solo retourne à la table à dessin afin de s’en distinguer. Pendant des années, elle est l’Arlésienne de Panther. Elle reçoit une mécanique et une transmission intégrale de Sierra RS Cosworth, tandis que Comtec (une filiale de March) s’occupe du châssis. La Solo réapparait en 1989. C’est un bide et elle s’efface au bout de quelques mois (on ne connaît pas le nombre exact de Solo, car certains modèles ont eu succéssivement plusieurs numéros de châssis.)

Ssangyong a perdu beaucoup d’argent avec la Solo. Les Coréens tenteront ensuite de déménager la ligne de production de la Kallista en Corée (afin d’éviter les taxes sur les voitures importées.) Le transfert s’éternisera, creusant un peu plus les dettes de Panther. Equipées d’un 2,3l, un petit nombre de Kallista seront fabriquées au pays du matin calme.

Ssangyong est fatigué de sa danseuse, d’autant plus que depuis 1988, il a commencé la fabrication des Korando. La dernière Kallista sort en octobre 1992.

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