Seulement deux exemplaires "purs"
Une Ferrari 412P de 1967 a été vendue aux enchères par Bonhams pour la modique somme de 30,25 millions de dollars. C’est la 4ème Ferrari de collection la plus chère jamais vendue aux enchères, mais c’est surtout l’une des deux seules Ferrari 412P « pures » construites, car les deux autres modèles engagés en 1967 furent des P3 converties. Cette Ferrari 412P regroupait tous les ingrédients pour une vente aux enchères de grande ampleur : une histoire connue, des courses vintages de premier ordre, une liste de collectionneurs de renommée internationale dans son registre de propriété, une authenticité totale des composants et même de sa carrosserie, et une restauration d'une qualité exceptionnelle. C'est un symbole de l'époque la plus sacrée de la course automobile de la marque la plus convoitée de l'histoire de l'automobile.
Merveille visuelle et mécanique
Ce modèle est la version cliente de la 330 P3, également connue sous le nom de P3/4 et fut utilisée par les équipes de pilotes indépendants de Ferrari : NART, Scuderia Filippinetti, Ecurie Francorchamps et Maranello Concessionaires. Les véhicules étaient des prototypes P3 de la saison 1966, mais dotés de la carrosserie, de la suspension et des jantes alliage de la P4. Sous le capot arrière bat un moteur V12 à 24 soupapes d'une cylindrée de 3 989 cc, alimenté par 6 carburateurs Weber 40DCN/15 en lieu et place du système d’injection Lucas des voitures d’usine. La puissance maximale atteint 420 chevaux à 8 000 tr/min, déchargée au sol avec l'appui d'une boîte de vitesses manuelle à 5 rapports. La pointe de vitesse, qui monte jusqu'à 310 km/h, est remarquable. Pour contrer les ardeurs de la voiture, un système de freinage à quatre disques assure.
Un pédigrée prestigieux
L’exemplaire a été piloté par des légendes comme Richard Attwood, Lucien Bianchi, Piers Courage, David Piper ou encore Jo Siffert. Parmi les résultats de la Ferrari 412P qui vient d'être vendue aux enchères figurent la troisième place aux 1000 km de Spa 1967, avec Attwood et Bianchi, et aux 24 Heures du Mans, avec Attwood et Courage, mais aussi la septième place obtenue à Brands Hatch par Siffert et Piper. Les points ainsi acquis ont contribué à la victoire de Ferrari au championnat du mondes des marques, malgré la force de frappe de Ford avec ses GT40. En 1968, avec David Piper au volant, cette 412P remporte les 200 km de Nuremberg, les Solituderennen et le Grand Prix de Suède.
Cette 412P évoque aussi un moment charnière de l’histoire de Ferrari, qui n'a pas produit suffisamment d'exemplaires de 412 P, de 330 P3/4, ou de P4 pour s'engager dans la catégorie Sport 5 000 cm3 qui exigeait la production d'au moins 25 voitures identiques, ce que Ford put faire avec sa GT40 grâce à ses moyens industriels bien plus conséquents. Le nombre réduit des Ferrari signifiait qu'elles étaient encore classées en tant que « prototypes » et a eu pour conséquence leur retrait de la compétition parce que la cylindrée du moteur dans cette classe a été limitée à trois litres. Ferrari boycotta ainsi la saison 1968, avant de revenir en 1969 avec la 312P.
Sa finition actuelle rend également hommage à la riche histoire de course du colonel Ronnie Hoare et de son agence britannique Ferrari, Maranello Concessionaires Ltd., qui a commercialisé les voitures « cheval cabré » au Royaume-Uni avec un grand succès. La voiture a divers engagements dans l'univers de l'endurance, comme les 24 Heures du Mans, les 1 000 kilomètres de Spa et la BOAC 500 à Brands Hatch. En 1969, la voiture a été acquise par Chris Cord, le petit-fils d'EL Cord, qui a fondé la société automobile Cord. Elle a ensuite changé de mains, passant par les collections de Lord Anthony Bamford, Sir Paul Vestey, John McCaw et Bruce McCaw avant que son propriétaire actuel ne l'acquière.
Un moment rare
L'annonce de la vente de la Ferrari 412P numéro 0854 a attiré l'attention internationale, suscitant de vives émotions chez les passionnés qui ont pris d'assaut le pavillon Bonhams lors des journées d'avant-première. Cette créature, véritable chef-d'œuvre à quatre roues, offrait une opportunité rare qui ne s'était pas présentée depuis un quart de siècle. Plus d'un millier de personnes se sont rassemblées dans le pavillon des enchères pour assister à la montée du « rouge » jusqu'au prix de compensation.Rupert Banner, responsable mondial des spécialistes chez Bonhams : « La 412P représente une œuvre d'art durable qui honore l'héritage Ferrari. Ce fut un privilège d'être en charge de sa vente et d'avoir obtenu un résultat aussi exceptionnel ».
C'est une icône de beauté et de performance de l'âge d'or des courses de sport-prototype. Cet exemple présente le châssis, le moteur, la boîte de vitesses et la carrosserie d'origine. Régulièrement immatriculée pour un usage routier, elle peut presque être utilisée pour aller prendre un café en centre-ville, mais sa mission est bien différente...