En travers et en contre-braquage, au volant d'un bolide frappé du cheval cabré, sans peur et sans reproche, voilà comment l'on se représentait Gilles Villeneuve, gladiateur des temps modernes. Funeste mois de mai en Formule 1, qui emportait ce 8 mai 1982 le "petit prince", 12 ans avant de nous prendre "Magic Senna" le 1er mai 1994.
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Le petit prince de la Formule 1
Gilles, c'était ça !
Gilles Villeneuve avait commencé au début des années 70 juste dans les courses de dragsters puis de motoneige. Révélé par une course de F2 à Trois-Rivières où il avait tenu tête à des pointures de la F1 venues se frotter aux jeunes loups locaux, les portes de la F1 s’étaient ouvertes en 1977. Son sens de l’attaque tape rapidement dans l’œil d’Enzo Ferrari, qui est séduit par la fougue de ce jeune canadien, alors même que le divorce entre Niki Lauda et la Scuderia Ferrari est acté juste avant la fin de la saison. Après des débuts difficiles, sa victoire à Montréal, en 1978 sur ses terres, déclenche l’étincelle de ce qui va devenir une véritable « Villeneuvemania ».
C’est à partir de 1979 que le québécois prend une autre dimension, grâce à une Ferrari 312 T4 très performante mais aussi à plusieurs morceaux de bravoure qui sont entrés au panthéon de la Formule 1. C’est toujours à fond, parfois ça passe ou ça casse, mais sa maîtrise, son car control comme on dit, est au firmament. Villeneuve forge sa légende en multipliant les coups d’éclats et devient la véritable coqueluche à la fois des tifosis italiens et d’une partie du paddock, qui raffolent de sa combativité, de son pilotage spectaculaire et de son inépuisable énergie. Le célèbre duel roues contre roues face à René Arnoux au grand prix de France à Dijon, à coup de freinages tardifs et trajectoires viriles, ou encore, suite à crevaison, son retour aux stands improbable sur trois roues avec une carrosserie partant en lambeaux au grand prix des Pays-Bas, définissent ce qu’était Gilles Villeneuve : un pur-sang, un attaquant né, qui ne renonçait jamais et mettait toute son âme dans la bataille, dans la plus pure intensité du sport, sans calculs, à des années-lumière de la gestion de course froide d’un ordinateur comme Lauda.
La déchirure d'Imola
En 1981, Villeneuve est le chouchou de la Scuderia. Il accueille comme nouvel équipier Didier Pironi, en provenance de Ligier. Aux antipodes de Villeneuve, le français est calme, pragmatique et très analytique. Moins flamboyant en piste, plus diplomate, il n’en reste pas moins déterminé et doué d’une grande intelligence de course.
La première saison en rouge a été difficile pour Pironi, largement éclipsé par son équipier québecquois qui, malgré l’agilité de poids lourd de la Ferrari, a réussi à s’imposer à Monaco et en Espagne. En 1982, la donne change. Ferrari dipose d’un excellent moteur turbo et surtout d’une nouvelle monoplace moderne, en fibre de carbone, qui place Maranello en prétendant au titre. Et surtout Didier Pironi hausse son niveau de jeu.
La rivalité entre les deux hommes est franche mais elle prend une autre tournure lors du grand prix d’Imola où une interprétation différente des deux pilotes sur des consignes de course provoque un duel tendu. Didier Pironi arrache sur le fil la victoire à Villeneuve, qui considérait que les positons avaient été gelées par l’équipe et s’estime trahi. La direction sportive de la Scuderia ne gère pas comme il se doit cette rivalité intestine.
Le drame
Quinze jours plus tard, en arrivant à Zolder pour le grand prix de Belgique, l’ambiance est délétère. Les deux hommes ne se parlent plus. Didier Pironi ne comprend pas l’intransigeance de son équipier mais Gilles Villeneuve est un homme meurtri, qui ne veut plus rien savoir. A ses yeux, la victoire lui a été volée. Maintenant, ce sera une lutte sans merci, chacun pour soi. La guerre est déclarée. Samedi 3 mai. Villeneuve a peaufiné les réglages de sa monoplace et plaisante même avec des proches. Il ne semble pas du tout dans un esprit de revanche vindicatif.
La séance de qualifications touche à son terme, il ne reste qu’une quinzaine de minutes. Pironi devance Villeneuve de quelques dixièmes. Le canadien effectue un nouveau run de quelques tours, dans l’espoir de le battre, mais sans succès puis le stand Ferrari lui indique de rentrer aux stands. Il ne reste que quelques minutes. Une nouvelle règle limite à deux le nombre de trains de pneus neufs en qualifications, ce qui réduit les opportunités. Le québécois déclare même avant les essais : « Si je n’ai que deux tentatives pour signer un chrono, j’ai besoin d’une piste libre (…) s’il y a une voiture devant, j’espère qu’elle a de bons rétroviseurs, car je ne peux lever le pied vu que c’est ma dernière chance ».
Un nouveau train de pneus et il serait encore possible de le devancer dans un dernier effort, à la limite, comme toujours. Villeneuve entame son tour de rentrée aux stands, à fond, et aborde à haute vitesse une courbe dans laquelle Jochen Mass roule au ralenti, en pleine trajectoire. Voyant la Ferrari arriver comme un boulet de canon, l’allemand se décale sur la droite pour laisser l’intérieur de la trajectoire libre, mais Villeneuve a déjà bifurqué dans la même direction. C’est l’incompréhension mais il est trop tard pour réagir. La Ferrari percute de pleine fouet la March, dont la roue arrière fait office de catapulte, et décolle dans les airs. Telle une marionnette désarticulée, Villeneuve est éjecté du cockpit sous la violence du choc.
Tandis que la 126 C2, après être retombée au sol par le nez, termine sa série de tonneaux en lambeaux en plein milieu de la piste, Villeneuve s’écrase au sol, de l’autre côté de la piste, au pied des grillages. Il git, 50 mètres plus loin que sa monture. Les secours arrivent rapidement mais il n’y a rien à faire. Les lésions internes sont trop graves. Plusieurs pilotes se sont arrêtés en bord de piste, dont Pironi, impuissant, qui rentre aux stands avec deux casques. Le sien, et celui de Gilles, qui avait été arraché dans le choc. Héliporté vers un hôpital spécialisé dans un état désespéré, le canadien décède en début de soirée, à seulement 30 ans. Villeneuve aurait-il pu être champion cette année-là ? Aurait-il concrétisé son projet d’écurie avec Gérard Ducarouge, implantée dans les Alpes Maritimes ? What if…comme disent les anglais.
1982 - 1994 : sinistres parallèles
1982 et 1994 ont de tragiques similitudes. La tragédie frappe a plusieurs reprises la même année et brise le coeur de millions de fans en les privant brutalement de leur idole. La mort de Villeneuve est un choc immense dans le monde de la Formule 1, semblable à celui qu’elle connaîtra, douze ans plus tard, avec celle d’Ayrton Senna. Le « petit prince » s’en est allé. Ferrari est traumatisée, et le patriarche, Enzo, a le cœur brisé. Lui qui avait été endurci par déjà tant de drames, il s’était laissé prendre d’affection pour un pilote, et voilà que la tragédie frappe encore.
Didier Pironi est aussi sous le choc. Très actif en tant que président du GPDA, il poursuit sa croisade pour la sécurité et contre les jupes aérodynamiques. Au Canada, il cale au départ et se trouve percuté par l’Osella du pauvre Ricard Paletti, qui meurt sur le coup, empalé sous le choc par sa colonne de direction. Pironi a été le premier à bondir sur l’épave pour tenter de sauver le malheureux et participer aux secours. Sombre présage… Mais sa force de caractère est inébranlable. Quand le paddock arrive à Hockenheim en Allemagne, pour la 12ème manche du championnat du monde, Didier Pironi est en tête du championnat et plus que jamais favori. Mais là encore, le destin en décidera autrement…
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Pour résumer
Gilles Villeneuve a marqué à jamais l'histoire de la Formule 1, par sa forte personnalité et son spectaculaire style de pilotage qui fit le bonheur des fans et des tifosis. Le 8 mai 1982, la grande faucheuse le happait en pleine gloire.