Au nom du fils
Peu après, Enzo Ferrari décide de fonder une marque en hommage à son fils disparu. Filiale de Ferrari, la marque Dino nait ainsi en 1964 pour surfer sur la nouvelle niche des sportives abordables. Mais Enzo Ferrari tient à l'image du Cavallino Rampante et à leur ADN V12, si bien que les Dino, flanquées de V6 pas assez "nobles" aux yeux du Commendatore pour porter le nom Ferrari, ne pourront arborer l'écusson du cheval cabré.
Les 206 S/SP, avec une cylindrée portée à 2 litres, remportent de nombreux succès en Endurance dont les 12 heures de Sebring 1966. Une déclinaison GT, baptisée 206 GT, dessinée par Pininfarina et carrossée par Scaglietti, est présentée en prototype au Mondial de Paris 1965 puis produite en petite série entre 1967 et 1968.
ma che bella !
Sauf que entre temps, une certaine Porsche 911 a déboulé dans le monde des sportives, avec son fameux Flat 6 ravageur. Ferrari ou plutôt Dino se doit de répliquer, ce qui aboutit en 1969 à la 246 GT, qui est présentée en grande pompe aux salons de Turin et de Genève. Évolution de la 206, la 246 voit son empattement rallongé de 60 mm et opte pour un nouveau bloc en fonte à 2 doubles arbres à cames en tête et double allumage, dont la cylindrée est portée à 2,4 litres. Donnant plus de souplesse et de fiabilité que le précédent bloc en aluminium, alimentée par 3 carburateurs Weber, cette évolution du V6 développe 195 chevaux à 7600 tours/min et permet à la 246 de proposer des performances remarquables: 0 à 100 Km/h en 7 secondes et 240 Km/h en vitesse de pointe. Souple, compact (55cm de large !) et disponible, ce V6 généreux et vif permet de franches reprises grâce à une boîte de vitesses bien étagée mais capricieuse, qu'il faut savoir apprivoiser.
Et que dire de la ligne, signée Sergio Pininfarina, qui conjugue à merveille sportivité et fluidité, sans fioritures. Modèle de compacité grâce à un moteur à 65° replacé en position transversale, la Dino, qui n'est pas sans rappeler la 250LM, dégage un irrésistible charme avec ses généreuses ailes galbées et des lignes à l'équilibre parfait. C'est la quintessence d'un design harmonieux, que la règlementation américaine viendra quelque peu déranger avec des normes spécifiques à respecter pour l'importation (dont des feux de position latéraux...l'Amérique refera le coup 30 ans plus tard avec les feux boomerang de la Maserati 3200 GT). Racée, ramassée sur ses grandes roues, la 246 GT au visage reptilien est prête à mordre la route.
Une icône des seventies
La Dino 246, c'est certes un moteur au son rauque terriblement envoûtant, mais surtout un châssis d'une très grande efficacité. Avec ses 4 suspensions indépendantes, ses barres anti-roulis et la position centrale-arrière du V6, la Dino offre à son pilote un comportement précis, stable et agile. Son moteur se retrouvera dérivé, shocking, dans la Fiat Dino Coupé mais aussi dans l'inoubliable Lancia Stratos.
Immortalisée par la série Amicalement vôtre où elle est conduite par Danny Wilde, alias Tony Curtis, la Dino était aussi une vraie Ferrari de son époque, pas exempte de défauts : finition spartiate plutôt médiocre, électricité capricieuse, carrosserie en acier à la longévité toute relative, fiabilité moteur-boîte loin d'être irréprochable. Mais une diva, c'est forcément un peu capricieux. Parfois énervant, mais aussi terriblement attachant.
1969, c'est aussi et surtout l'année où Ferrari cède à FIAT 50% des parts de sa branche production, pour pérenniser la marque qui connaît des difficultés financières et se concentrer sur la branche course. Jusqu'en 1974, au fil de ses évolutions et des trois séries fabriquées L, M et E, la Dino fut produite à 3761 exemplaires. Elle n'échappe pas, aujourd'hui, à la folie spéculative.
Une descendante à V6 Hybride devrait surgir cette année.