ACC est soutenu par SAFT (filiale de TotalEnergies), Stellantis et Mercedes-Benz. Si la R&D est à Bruges près de Bordeaux et Nersac près d'Angoulême, les trois gigafactories seront sises à Douvrin dans les Hauts-de-France (FR), mais aussi à Kaiserslautern en Rhénanie-Palatinat (DE) et Termoli en région Molise (IT).
L'usine de batteries inaugurée aujourd'hui est celle de Douvrin. Et ce ne seront pas moins de trois ministres qui seront là, preuve de l'importance de cette usine pour la France. Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, et Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’Industrie, sont attendus ce mardi matin sur place.
C'est la première usine du genre, d'une telle capacité, en France. C'est la première pierre de la "vallée de la batterie" voulue par les constructeurs et les pouvoirs publics. De l'argent public est d'ailleurs injecté à hauteur de 80 millions d'euros pour soutenir le projet ACC qui devrait fournir 1000 emplois très rapidement.
L'usine se veut "plus propre" avec 30% d'eau consommée en moins, mais aussi un recyclage à 90% des déchets de production. L'eau n'est pas rejetée et l'usine ne doit pas faire de bruit. L'usine a été implantée sur un site en friche industrielle pour minimiser également son influence sur la nature. Bref, un tableau qui semble idyllique pour ACC.
Eviter une désindustrialisation
Les cellules de batteries électriques produites sur place seront à destination de véhicules produits en France. Un cercle vertueux qui devrait compenser en partie la perte des emplois de l'industrie automobile en France. Cela pourrait également attirer d'autres constructeurs européens ou extra-européens pour participer à cet écosystème électrique.
Pour ses débuts, et d'ici fin 2024, l'usine devrait avoir 600 personnes y travaillant. ACC recrute et forme déjà son personnel depuis des mois. La capacité initiale devrait être de 13 GWh de batteries produites par an. Si on prend une batterie de 63 kWh (capacité nominale brute de la Megane E-Tech par exemple), cela permet en théorie de produire plus de 200 000 véhicules électriques en bout de chaîne.
D'ici 2025, ACC prévoit 800 emplois sur site, et 40 GWh produits par an soit plus de 630 000 batteries de 63 kWh pour reprendre notre exemple. En 2030, ACC prévoit d'atteindre la pleine capacité de l'usine avec 2 000 emplois. Il faut dire que l'Europe veut absolument passer au 100% électrique vendu en 2035 et qu'il faudra produire sur place si on ne veut pas importer massivement nos batteries d'Asie (quel que soit le pays).
Le véhicule électrique, ces nouvelles mines du Nord
L'Etat et les industriels du secteur ambitionnent 2 millions de véhicules électriques produits en France. Ce serait un exploit vu la chute vertigineuse de la production francophone ces dernières années. Le recyclage n'est pas oublié avec par exemple à Dunkerque l'annonce d'une usine de recyclage, mais aussi de production de composants dans un accord entre le chinois XTC et le français Orano (ex-AREVA).
Le véhicule électrique devrait redynamiser tout le bassin d'emplois du nord de la France sinistré par la fermeture des mines, mais aussi de la sidérurgie. Entre 13 et 20 000 emplois devraient être créés, avec tout le tissu économique qui en découlera. Comme un clin d'oeil au passé automobile, ACC s'installe à côté d'une usine de moteur Peugeot (la Française de Mécanique, ex usine Renault-Peugeot) et Verkor, autre acteur de la filière, s'installe à côté de Renault, son partenaire.
Le thermique cède la place à l'électrique. Souhaitons à ACC et aux autres, le même succès industriel que le moteur Douvrin par exemple, monstre de solidité durant des années.
Notre avis, par leblogauto.com
Reste la filière lithium à soutenir pleinement pour un lithium en partie extrait et raffiné en France et la boucle sera bouclée. La "gigafactory" (*) ACC est la première de quatre prévues en France pour le moment. AESC-Envision fournira Renault Electricity à partir de début 2025. Mi-2025, Verkor débutera sa production aussi pour Renault. Puis fin 2026, le groupe taïwanais ProLogium, spécialisé dans la batterie dite "tout état solide" produira aussi à Dunkerque (c'est le dernier projet en date annoncé).
Mais, ne nous y trompons pas, ces nouvelles usines ne remplaceront pas les emplois perdus par l'industrie automobile en France. En 2021, le groupe Renault et Stellantis produisaient 1,14 million de véhicules (particuliers et utilitaires légers). Entre 2007 et 2014, la France s'est massivement désindustrialisée dans le secteur de l'automobile, perdant 40% de sa production nationale et détruisant près de 170 000 emplois, souvent locaux.
Ce ne seront donc pas 13 000 emplois qui referont la filière des années 2000. Et pendant ce temps les petites unités locales qui produisaient des pièces et fournissaient de l'emploi dans les territoires mettent la clé sous la porte devant les délocalisations à l'Est ou dans d'autres pays à bas coût. Désindustrialisation et "colère" de la population sont intrinsèquement liées. Le VE, signe de déclassement (qui peut payer 45 k€ un véhicule ?) n'arrangera rien, sauf pour la com'.
Note
(*) Gigafactory : le concept de gigafactory vient de Tesla mais est désormais devenu commun. Il désigne une usine de batterie qui est capable de produire au moins 1 GWh de capacité de batterie par an. C'est même communément (et donc de façon impropre) utilisé pour désigner des usines dans le véhicule électrique, capables de produire de "grandes quantités" (composants, véhicules, etc.). Ici, on est bien sur une "gigafactory" capable de produire d'ici fin 2024 13 GWh de capacité de batterie de traction par an.