Biocarburants : boire – de leau – ou conduire

Décidément les biocarburants ou agro-carburants font fort ! très fort … voire même trop fort …

Si les craintes de devoir manger ou conduire augmentent de jour en jour … il va falloir bientôt AUSSI choisir entre boire ou conduire, mais non pas boire du vin … mais bien boire de l’eau.

Ironie du sort, personne (ou presque ?) ne pense à l’utiliser l’alcool produit par le raisin pour faire avancer nos chères limousines …

Les experts sont de plus en plus nombreux à alerter sur le fait que les biocarburants, appelés ainsi en référence à leurs supposés bienfaits, sont toutefois loin d’être la panacée … soulignant que leur production nécessite une importante consommation en eau, ressource déjà limitée par ailleurs. Comme l’ont fait récemment les professionnels du secteur agro-alimentaire allemand, ils redoutent également que la fabrication à grande échelle de ces carburants « verts », faits à partir de produits agricoles, ne se fasse au détriment de la production des aliments de base.

« Lorsque les gouvernements et les entreprises discutent de la solution des biocarburants, je pense que la question de l’eau n’est pas suffisamment prise en compte », a ainsi indiqué Johan Kuylenstierna, directeur de la Semaine mondiale de l’eau. Ce congrès annuel est actuellement réuni pour sa 17e édition à Stockholm, en présence de quelque 2.500 experts du secteur de l’eau, venus du monde entier.

Selon le SIWI (Institut international de l’eau à Stockholm), en 2050, la quantité d’eau nécessaire à la fabrication de biocarburants sera équivalente a celle requise par le secteur agricole pour nourrir l’ensemble de la population de la planète.

Pour Sunita Narain, directrice du Centre pour la science et l’environnement, en Inde, les biocombustibles sont « une idée qui est bonne en théorie, mauvaise dans la pratique ». Selon cette experte influente, la priorité est d’aborder et de régler la question de la consommation de carburant. Car il est « extrêmement idiot » d’imaginer qu’il sera possible à l’avenir de consommer autant de biocarburant que nous consommons actuellement de combustible fossile, a-t-elle estimé. « Si nous voulons consacrer de l’eau (à la production de biocarburants), nous devons réduire la consommation des biocarburants. Par exemple, les destiner aux bus et non aux voitures », a-t-elle expliqué.

A noter par ailleurs, qu’un an après sa rédaction, le ministère chargé de l’environnement a mis en ligne un rapport de l’Inspection générale de l’environnement (IGE) et du conseil général de l’agriculture, de l’alimentation et des espaces ruraux sur «la mise en uvre du plan biocarburants au regard de la protection de la ressource en eau».

Lancé en 2005 par Jean-Pierre Raffarin, le plan doit permettre à la France d’atteindre les objectifs européens d’incorporation de 5,75% de biocarburants à l’horizon 2010. Plus ambitieux, Dominique de Villepin a ensuite visé un objectif de 5,75% dès 2008, puis de 7% en 2010 et de 10% en 2015.

Selon les auteurs du rapport, «les objectifs du plan biocarburants sont, par nature, antinomiques avec les préoccupations en matière de protection de la qualité de l’eau, dès lors que le développement des cultures énergétiques passe par un accroissement des surfaces cultivées et une intensification des cultures.»

La seule solution qui permettrait de protéger les ressources en eau serait de substituer le colza alimentaire et des cultures plus polluantes que le colza par du colza énergétique. « Mais il est douteux que cela suffise pour assurer la pleine réalisation des objectifs du plan », conclut le rapport. Enfin, prendre en compte les problématiques environnementales signifierait avoir recours à des variétés rustiques et allonger le délai de retour sur le même sol, mesures qui ont pour effet une diminution du volume de biocarburant produit.

Mais au delà de la question de la limite de la disponibilité de l’eau, les experts craignent que la production à grande échelle des carburants « verts » entraîne une forte hausse du prix des denrées alimentaires de base. « La production de biocarburants pourrait devenir un important concurrent de la production de nourriture. Les prix mondiaux des aliments pourraient augmenter« , explique M. Kuylenstierna.

Pour rappel, l’augmentation aux Etats-Unis de la production d’éthanol à partir du maïs a provoqué début 2007 une hausse du prix du maïs sur le marché international et une hausse de celui de la « tortilla« , galette de maïs largement consommée par les Mexicains. Si l’éthanol est un biocarburant qui a été érigé au rang de priorité nationale aux Etats-Unis – où il compte désormais pour 5% du volume total d’essence distribué – remplir un réservoir de 95 litres d’éthanol pur nécessite environ 200 kilos de maïs, c’est à dire assez de calories pour nourrir une personne pendant un an, relève le SIWI dans un dossier de presse.

Source : AFP

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