L’Estonie, désormais un pays stratégique. Le pays est malheureusement sur la liste des pays que Poutine pourrait envahir … Or, la société canadienne Neo Performance Materials (Neo) y construit la première usine de fabrication d’aimants en terres rares en Europe. Conçue pour produire des aimants permanents en terres rares destinés aux véhicules électriques, aux éoliennes et à d’autres technologies d’énergie propre.
Les aimants produits sont essentiels pour la transition verte de nombreuses industries, servant notamment de composant crucial pour les véhicules électriques. Nous en parlions déjà sur leblogauto.com en août 2021.
L’usine de Narva devrait être opérationnelle en 2025.
Résumons donc : le pays qui héberge un maillon industriel crucial dans la chaîne de production des VE de l’Europe pourrait être la cible prochaine de Poutine.
L’ Estonie pour s’affranchir de la domination asiatique
« La production d’aimants est dominée par des entreprises asiatiques. La réaction en Europe est que la production doit être en Europe. Le lancement du processus européen a maintenant commencé ici, à l’un des points de départ de l’Europe », déclarait Constantine Karayannopoulus, PDG de Neo en novembre 2023, lors du lancement du projet.
Selon Karayannopoulos, la capacité de production de l’usine de Narva est initialement prévue à 2 000 tonnes de blocs magnétiques par an, avec le potentiel de passer à plus de 5 000 tonnes par an à l’avenir. « Cela pourrait porter l’investissement total à environ 250 millions de dollars et nous devrons peut-être augmenter notre emploi à environ 1 000 personnes », avait-t-il ajouté.
De quoi équiper de 1,5 à 4,5 millions de voitures électriques
L’usine de Narva devrait débuter la production d’aimants de terres rares permanents en 2025. Et ce, avec des volumes suffisants pour équiper environ 1,5 million de voitures électriques. La production prévue en phase optimale sera de 5 000 tonnes, pour la construction de 4,5 millions de voitures électriques.
Le Fonds européen pour la transition équitable a contribué à hauteur de 19 millions d’euros pour soutenir le projet d’un montant global de 100 millions d’euros.
Un processus unique en dehors de l’Asie
L’usine de séparation de terres rares de Neo, située à proximité à Sillamze, aussi en Estonie, fournira des terres rares au site de Narva.Ces oxydes de terres rares magnétiques de haute pureté seront transformés via un processus qui sera le premier du genre en Europe.
Au cœur du processus de fabrication se trouve la division du minerai, provenant des États-Unis, en éléments de terres rares distincts, composants essentiels pour l’artisanat d’aimants permanents.
La nouvelle installation d’aimants de Narva est différente de l’installation actuelle de Silmet, c’est une installation en aval. L’installation Silmet fournira des oxydes de terre rares à l’installation de Narva, les oxydes à convertir en alliages de terres rares, puis en aimants permanents. Le site de Narva fabriquera les aimants spéciaux nécessaires aux moteurs des véhicules électriques.
Selon Vasileios Tsianos, directeur du développement de Neo, a expliqué que l’usine de Sillame elle-même est unique dans le monde occidental. Son principal avantage : son personnel, bien formé à cette technologie rare.
Aujourd’hui, Silmet est la seule installation en dehors de l’Asie permettant à l’échelle industrielle la séparation d’éléments de terres rares. Il est le seul centre dans l’hémisphère occidental capable de transformer efficacement à grande échelle le concentré de minerai de terres rares en oxydes.
L’ Estonie redoute la guerre avec la Russie
L’Estonie partage environ 300 kilomètres de frontière commune avec la Russie. Selon un sondage en ligne réalisé par l’institut BVA Xsight pour ARTE en avril 2024, 70% des Estoniens redoutent la guerre avec leur voisin russe. En cause : la proximité géographique et le poids de l’histoire. Cette peur se manifeste jusque dans le quotidien de nombreux habitants de ce pays balte.
« La guerre en Ukraine a rendu les investisseurs mal à l’aise pendant un certain temps, mais ils savent qu’il s’agit d’un territoire de l’UE, c’est un territoire de l’OTAN, et ils se sentent en sécurité ici » déclarait en 2023 Ivan Sergeyev, coordinateur du processus de transition du comté d’Ida-Viru, lieu d’implantation de l’usine.
Reste qu’à Narva, la ville « où commence l’Europe », comme le veut l’adage régional, 95 % de ses quelque 53 000 habitants parlent la langue de Pouchkine. Une spécificité qui la rend d’autant plus vulnérable …