Donald Trump aurait-il fait coup double via la guerre des taxes ? Ne se contentant pas de menacer de freiner l'activité des constructeurs automobiles étrangers - le locataire de la Maison Blanche pourrait avoir atteint un autre but : diviser l'Union européenne. Créant en tout premier lieu des tensions entre la France et l'Allemagne.
Alors que la chancelière allemande Angela Merkel adopte désormais une attitude conciliante vis à vis des Etats-Unis, ses partenaires européens – et tout particulièrement la France à travers la voix de son ministre de l'économie Bruno Le Maire - ne l'entendent pas de la même oreille. Il est vrai que ce sont les constructeurs allemands tels que BMW, Mercedes, ou VW qui ont le plus à craindre des retombées négatives d'une guerre commerciale menée via droits de douane interposés.
Angela Merkel en faveur d'une baisse des droits de douane
En réponse aux menaces de Donald Trump qui a annoncé que les Etats-Unis relèveraient leurs propres taxes sur les importations de voitures européennes, si l'Union européenne n'abaissait pas ses taux, Angela Merkel, a déclaré la semaine passée qu'elle était prête à soutenir et négocier un abaissement des droits de douane européens sur l'automobile.
Evoquant jeudi dernier l’idée d’abaisser les taxes européennes, la chancelière allemande a déclaré qu'il s'agissait d'une "option" qu'elle pouvait "imaginer", à condition de trouver "une position européenne commune" et d’impliquer "tous les pays avec lesquels nous commercialisons des voitures".
Rappelons qu'à l'heure actuelle, l’UE impose 10 % de droits de douane aux véhicules importés des Etats-Unis [(y compris ceux fabriqués par des constructeurs européens, notamment allemands, qui possèdent d’importantes usines sur place).] Les Etats-Unis, eux, taxent à 2,5 % les importations de voitures et à 25 % celles des camionnettes et pick-up.
Une position allemande qui a fait notamment réagir le ministre français de l'économie et des finances, Bruno Le Maire.
Bruno Le Maire souhaite une étude d'impact préalable
Mercredi, Bruno Le Maire a toutefois déclaré que la France et l'Allemagne devaient évaluer l'impact sur leurs industries automobiles de la mise en œuvre d'éventuelles baisse des tarifs douaniers européens sur les importations automobiles américaines avant de les envisager.
Une critique à peine voilée à l'encontre de Angela Merkel … laquelle a lancé un pavé dans la mare sans visiblement consulter préalablement ses partenaires …. ne semblant prêcher que pour sa paroisse …. et faisant ainsi fi des impacts qu'auraient de telles mesures sur les constructeurs européens non germaniques et sur l'économie de l'UE dans son ensemble.
"Il est important que, avant d'envisager quelque solution que ce soit, nous regardions la France et l'Allemagne ensemble, quel est l'impact pour nos industries automobiles et c'est ce travail que nous allons faire dans les prochaines semaines", a ainsi déclaré Bruno Le Maire lors d'une conférence de presse commune avec le ministre allemand de l'Economie, Peter Altmaier.
Tentant de calmer les tensions, ce dernier a toutefois tenu à souligner que l'Allemagne n'avait pas encore défini de position vis-à-vis des menaces américaines et attendait les résultats de la prochaine visite du président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, à Washington pour ce faire.
Il a par ailleurs tenu à ajouter qu'il lui semblait "important d'explorer toutes les solutions possibles", en vue d'aboutir au final à l'adoption d'une "position commune France et Allemagne" et "une position européenne ensuite".
Un dossier du ressort de la Commission européenne
Reste que la prise de position de Angela Merkel a d’autant plus étonné, à Paris et à Bruxelles, qu'il revient de droit à la Commission européenne de mener les discussions avec les Etats-Unis. Le Président de la Commission, Jean-Claude Juncker, doit rencontrer le président Donald Trump fin juillet à Washington.
De source diplomatique, on fait également valoir qu'un tel accord laisserait à penser que l'UE aurait cédé aux menaces de Donald Trump.
L'Allemagne serait fortement impactée par la mise en exécution des menaces de Trump
Il est vrai que l'Allemagne a fort à perdre dans la bataille qui se joue actuellement.
Selon une récente étude de l’institut économique Ifo de Munich, un relèvement à 25 % des taxes américaines sur les voitures coûterait à l’Allemagne 5 milliards d’euros, soit 0,16 % de son produit intérieur brut.
Selon les conclusions de cette étude, "aucun pays n’aurait à craindre des pertes absolues plus importantes que l’Allemagne, si de tels droits de douane venaient à être mis en place."
Le secteur automobile représente en effet un enjeu vital pour l'économie allemande, à l'origine d'environ 800.000 emplois dans le pays.
Sources : AFP, Reuters, Le Monde, IFO