Perte nette pour Tesla au T1 2019
Tesla a en effet enregistré une perte nette de 702 millions de dollars au cours des trois premiers mois de 2019. Une contre-performance que Musk avait concédé en février dernier, après avoir initialement affirmé – voire fanfaronné ? - que la société enregistrerait des profits tout au long de l'année 2019.
Fin d'un cycle de modestes profits
La perte s'avère certes légèrement inférieure à celle de la même période 2018. Elle fait également suite à une modeste série de deux trimestres profitables consécutifs pour Tesla. Reste que le constat n'est au final guère brillant : depuis son entrée en bourse en 2010... la société n'a pu afficher un bénéfice net que durant quatre trimestres …
A noter également : depuis le début de 2019, Tesla a dépensé plus de 1,5 milliard de dollars en liquidités.
Chiffre d'affaires en hausse mais inférieur aux attentes
Certes, les revenus du constructeur ont grimpé de 33% au premier trimestre 2019 par rapport à la même période 2018, s'élevant à 4,54 milliards de dollars. Ils sont toutefois nettement inférieurs aux 5,19 milliards sur lesquels tablaient les investisseurs.
Le chiffre d'affaires de Tesla aura en effet été moindre qu'espéré en raison d'un volume de livraisons de véhicules – de 63.000 exemplaires - inférieur aux 76.000 attendus.
Retards de livraison de la Model 3
Selon Tesla, cette mauvaise performance trimestrielle serait due à des retards de livraisons du Model 3.
Bien que les livraisons aient augmenté de 110% par rapport au même trimestre de l’année dernière, elles ont diminué de 31% par rapport au quatrième trimestre. Le constructeur a été confronté à des difficultés pour expédier sa Model 3 à ses clients d'Europe et de Chine, malgré l'augmentation massive des livraisons dans ces deux pays.
Reste que justement, si ce modèle est censée transformer Tesla en constructeur de masse … il semble avoir du mal à grimper la marche …
Musk promet un retour à la rentabilité au 3eme trimestre
Mais fidèle à lui-même - entre adepte de la méthode Coué, fanfaronnade ou utopie - Elon Musk a déclaré dans une lettre aux investisseurs mercredi que la société s'attendait à perdre de l'argent de nouveau au deuxième trimestre mais comptait revenir à la rentabilité au troisième trimestre.
La méthode miracle ? Tesla table sur un rebond des livraisons de véhicules et confirme s'attendre à livrer entre 360.000 et 400.000 véhicules en 2019, ce qui le cas échéant correspondrait à une hausse de 45 à 65 % par rapport à 2018.
Une rentabilité envisageable, mais à quels frais ?
Ce premier trimestre 2019 constitue tout de même l'un des pires enregistrés par Tesla depuis sa création. L'entreprise n'a pu en effet réduire ses pertes qu'après avoir amorcé un plan de réduction des coûts en fermant des magasins, en favorisant les ventes en ligne et en licenciant des employés. Ce qui n'augure rien de bon pour la suite des événements.
Ce n'est pas en réduisant la voilure, le nombre de voiliers et de navigateurs qu'on devient une invincible Armada …
Une stratégie de vente confuse
Pire encore, des allers-retours sur les conditions et modes de ventes de la Model 3 n'ont rien arrangé à l'affaire, semant confusion – voire doute - dans les esprits d'éventuels prospects, s'interrogeant sur la stratégie de l'entreprise, ces changements désordonnés n'étant pas fait pour les rassurer.
Le 28 février dernier, Tesla a ainsi annoncé fermer ses boutiques et ne plus vendre ses voitures qu'en ligne. Objectif affiché : limiter l'impact financier du lancement d'une version de la Model 3 à 35.000 dollars. Une annonce suivie quelques jours après d'une sorte de rétro-pédalage, le constructeur déclarant au final n'envisager la fermeture que de quelques boutiques tout en mettant fin à son projet de vendre son véhicule en ligne.
Un vent de moins en moins favorable
Autre élément à prendre en compte désormais. Si dans les premiers temps, Tesla pouvait disposer d'avantages offerts aux pionniers d'un domaine, tel n'est plus le cas désormais.
En effet, ses clients ne bénéficient plus pleinement des crédits d’impôt fédéraux pour les véhicules électriques, tandis que le flot initial de consommateurs attirés par la modèles 3 s’estompe quelque peu.
Autre facteur de taille : de de plus en plus de rivaux - notamment les marques de luxe allemandes - font leur entrée sur le marché des véhicules électriques. Se présentant ainsi comme des concurrents directs de Tesla.
Nouveaux besoins de capitaux ?
Lors d'une téléconférence avec des journalistes, Zach Kirkhorn, responsable financier de Tesla, ne semblant guère soucieux, a écarté la nécessité de mobiliser davantage de capitaux. Promettant qu'un mois de production solide serait au rendez-vous après des mois de livraisons médiocres.
Un discours qui n'a guère impressionné Wall Street. Une pléiade d’analystes s’inquiètent du manque de liquidités potentiel de Tesla et de la possibilité que les ventes de la Model 3 «cannibalisent» ses anciens modèles S et X.
Bien que Musk ait déclaré qu’il n’y avait pas besoin de capitaux supplémentaires à ce stade, certains experts financiers estiment que Tesla devra probablement mobiliser plus de 3 milliards de dollars à court terme pour répondre à ses besoins d'investissements et faire face à ses emprunts. Parmi eux, Wedbush Securities s'inquiète que soit désormais à la barre « un directeur financier inexpérimenté ». Ses analystes considèrent les avis de la société comme agressifs et estiment que la direction et le conseil d'administration de Tesla ne prennent pas de mesures de réduction des coûts suffisamment énergiques et ne revoient pas assez à la baisse les ambitions de la société pour pouvoir préserver le capital et donner une voie durable à sa rentabilité boursière.
L'avis de Leblogauto.com
Si Elon Musk tente d'attirer les investisseurs sur une vision d'avenir de son entreprise, le présent le rappelle bel et bien à l'ordre. Et la rentabilité peine à s'installer.
Si jusqu'à présent Tesla bénéficiait de l'avantage offert par son statut de pionnier, ce délai accordé de facto par les marchés va prochainement prendre fin. Le constructeur devra désormais mener de face deux combats majeurs : faire la preuve de ses capacités à passer au stade supérieur de producteur automobile de masse – ce qui lui impose de rendre compatible investissements long terme et rentabilité court terme – tout en menant la bataille face à de nouveaux concurrents habitués à une production de masse et disposant de plusieurs cordes à leur arc, pick-ups et SUV étant là pour garantir leurs marges.
Sources : Automotive News, Reuters, AFP, Yahoo Finance