La Souterraine: LSI (ex-GM&S) menacée de fermeture en 2022, selon la CGT
Selon la CGT relayée par l'AFP, l'usine de l'équipementier automobile LSI (ex-GM&S) à La Souterraine, dans la Creuse, est menacée de fermeture en 2022.
Selon la CGT relayée par l'AFP, l'usine de l'équipementier automobile LSI (ex-GM&S) à La Souterraine, dans la Creuse, est menacée de fermeture en 2022.
Le syndicat mention dans une "lettre ouverte" publiée ce dimanche, de propos publics du Directeur du site de la Souterraine. Il y serait évoqué une fermeture. LSI ou La Souterraine Industrie, c'est en fait l'usine GM&S qui avait défrayé la chronique pendant un an, entre fin 2016 et l'automne 2017. Le site, alors fortement menacé, avait été repris, pour 1€ symbolique, par le groupe GMD (ex-société VERON).
Le site sostranien avait alors vu ses effectifs passer de 277 salariés à 120 (ils sont actuellement 113). Vincent Labrousse, ex-délégué CGT de GM&S (licencié lors de la reprise), soutient que le directeur de l'établissement, Yannick Lacroix, "a annoncé publiquement la fermeture du site en 2022, lors d'une visite d'un député de la République" (le député LFI du Nord Adrien Quattenens NDLR).
Selon la CGT, la Direction du groupe GMD aurait décroché des marchés pour Renault et PSA. Mais, aucun de ces marchés n'auraient été affecté à LSI pour assurer la production du site. Selon Clémence Guetté, tête de liste LFI et NPA en Aquitaine : "Il s'agit d'une stratégie de GMD qui se sert de nous pour faire pression sur la République pour avoir encore plus de subventions".
Selon l'AFP, la direction de GMD n'était pas joignable dimanche.
Depuis la reprise par GMD, la CGT n'a de cesse de dénoncer le jeu de dupes de cette reprise. En 2018, Yann Augras, délégué CGT déclarait : "Plus de 80 salariés sont toujours sans emplois et PSA et Renault n'ont pas respecté leurs engagements". Vincent Labrousse ajoutait : "Trente-six ont retrouvé un emploi en CDI, 20 sont partis à la retraite, 3 ou 4 sont en création d'entreprise, 6 font des formations longues et les autres, environ 80, n'ont rien".
Après la reprise, il y a eu plusieurs Directeurs de l'usine en quelques mois. Toujours selon les syndicats, PSA et Renault, qui s'étaient engagés à assurer à leur sous-traitant GM&S/LSI pour plus de 22 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel, n'auraient pas respecté leur promesse. "En 2018, à eux deux, ils ont à peine commandé pour 10 millions d'euros" selon Yann Augras.
Les salariés avaient également assigné PSA et Renault devant le tribunal d'instance pour abus de position dominante. Ils considéraient en effet que les constructeurs automobiles avaient la mainmise sur le sous-traitant. Les représentants des salariés avaient même déposé une proposition de loi "responsabilité des donneurs d'ordres vis-à-vis des sous-traitants, des emplois et des territoires". Le but, obliger les donneurs d'ordres à assurer financièrement les conséquences de leur désengagement chez leurs sous-traitants.
LSI, ex-GM&S, est l'un des nombreux exemples de l'industrie automobile (et pas que) qui disparait peu à peu de notre paysage. Ces petits ateliers historiques ont longtemps été le poumon de tout un canton, un département. Ce sont encore très souvent les employeurs privés principaux du coin et leurs centaines d'emplois directs en représentent bien plus en indirects.
L'entreprise historique devenue LSI a été créée en 1962. Si elle ferme en 2022 comme le craint la CGT, cela serait un triste anniversaire pour les 60 ans. GM&S a été créé par Roger Devienne et son gendre Bernard Godefroy à La Souterraine. L'entreprise s'appelle alors la SOCOMEC et fabrique des guidons de bicyclettes et de patinettes pour enfants.
L'usinage de tubes en acier ne se développe pas autant qu'espéré et les prix sont déjà tirés vers le bas. En 1968, Godefroy redirige l'entreprise vers la sous-traitance industrielle, à la fois pour des camions, mais aussi l'ascensoriste OTIS. L'explosion du chiffre d'affaires et des commandes viendra d'un contrat à partir de 1974 avec Renault Agriculture. A l'époque, la SOCOMEC est le 301e sous-traitant de Renault.
Au début des années 90, la Sepesa (nouveau nom) est toujours sous-traitant de Renault qui n'en n'a plus que 16 (de nombreux autres ont été intégrés au groupe par exemple). Entre temps, deux établissements, un au Mans et un à Bessine-sur-Gartempe, ont été ouverts. La SEPESA ainsi que Euramec (une autre société de la Souterraine) sont rachetées par SER.
L'établissement de Bessine-sur-Gartempe est une aubaine pour les salariés sans emploi après la fermeture des mines d'uranium de la Cogéma. Bessine fabriquera des sous-ensembles de voitures Renault (comme l'Espace), La Souterraine des éléments plus petits. En 1997, Aries Industries. Les suppressions d'emplois ont déjà débuté 60 dans ce rachat.
Aries Industries est racheté rapidement après par le Britannique Wagon Automotive qui conserve en l'état les sites. Ils sont rentables, produisent toujours des pièces pour l'industrie auto. Hélas, en 2006, Wagon fusionne avec le Danois Oxford (sic.). Wagon Oxford a décidé de déménager la production à l'est de l'Europe, moins chère en main-d'œuvre. Les usines de La Souterraine et de Bessine sont revendues à un ancien de Wagon Oxford, David Cardwell. Ils s'appellent désormais SONAS.
Les belles promesses de 2006 ont fait long feu et en novembre 2008, le Tribunal de Grande Instance de Guéret place SONAS en redressement judiciaire. Le prix de l'acier a doublé et les conditions de la reprise de 2006 ne sont plus celle de 2008. De plus, Cardwell a négocié des conditions de reprises qui le prennent à la gorge (Wargon lui a imposé un délai de trois ans pour rembourser la reprise des usines). Vendues par Wargon, les usines de Sonas travaillent de fait pour Wargon. Un premier tour de "passe-passe".
Sonas est vendu à Halberg en 2009. La casse sociale est importante : sur 854 emplois sur les deux sites, 256 sont supprimés. Halberg devient Altia (Advance leader technology innovation automotive) et négocie enfin avec le ferroviaire (ce que Cardwell avait promis de faire). Sauf que si Altia va bien, les deux sites du limousin sont à sec, criblés de dettes. Les syndicats dénoncent un nouveau tour de passe-passe avec des moyens détournés (location de site par les filiales, etc.) de faire remonter la trésorerie acquise par des prêts vers la maison mère. Le site de la Souterraine verse 120.000 € de loyer chaque trimestre à la SCI du groupe.
C'est l'épisode 2013/2014 avec le Ministre Montebourg qui jure de ne pas laisser tomber les deux sites. Les deux sites sont rachetés par Transatlantic Industries, mais en avril 2014, ils sont de nouveau placés en redressement judiciaire. PSA et Renault, principaux clients des sites, ne croient pas dans ce repreneur sorti de nulle part (créé en 2014...). L'usine de La Souterraine est reprise par GM&S, l'usine de Bessine-sur-Gartempe par Steva en 2015.
Si pour Steva cela se passe plutôt bien (*), pour GM&S, le calvaire continue. Le patron de GM&S Industry a visiblement pris le CICE (740 000 €) mais n'a jamais investi comme prévu dans le site. C'est le deuxième épisode sous le quinquennat du Président Hollande. GM&S échappe d'un cheveu à la liquidation mais est une nouvelle fois placée en redressement judiciaire. Les clients principaux, Renault et PSA, ne passent plus autant de commandes au site. Il faut dire que les grèves et les productions aléatoires ont miné la confiance. PSA semble revenir au même niveau qu'avant cet épisode, Renault non.
En 2018, la justice valide le rachat des GM&S par LSI avec encore une énorme casse sociale. Sur les 277 salariés, 157 sont licenciés. L'an dernier, l'usine a fortement été touchée par la pandémie sanitaire à la Covid-19 et la production a été arrêtée plusieurs fois. Le nouvel épisode sera-t-il pour 2022 ? Comme pour d'autres sites, les syndicats appellent les clients constructeurs automobiles de reprendre de fait les sites.
(*) En 2019, Steva a été racheté par F2J qui a aussi repris Peugeot Japy
Avec AFP/swi-mal/pjl/els
Illustration : GMD (modifiée par leblgoauto.com)
Selon la CGT relayée par l'AFP, l'usine de l'équipementier automobile LSI (ex-GM&S) à La Souterraine, dans la Creuse, est menacée de fermeture en 2022.
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