La bande dessinée et l’automobile : Partie 3, l’automobile témoin du passé et vision de l’avenir.

Commençons par le passé. Et tant quà faire, ne faisons pas dans la demi-mesure et intéressons-nous à Astérix. Astérix !?! Mais comment a-t-il fait pour voir des voitures dans Astérix !?! devez-vous vous demander Bon je ladmets, hormis dans Astérix en Corse, où il y a un petit aparté au XXème siècle relatant le découverte dun cousin des Figatellix dans le maquis, il ny en a pas. Les anachronismes sont volontairement fréquents dans Astérix (à commencer par les menhirs dObélix), mais tout de même Cependant, les références, via les chars, sont assez nombreuses et savoureuses.

Entre autres allusions, on peut citer la célèbre course de chars à bufs des 24 heures de Suindinum vue dans La Serpe dOr, faisant évidemment référence aux 24 heures du Mans. La première édition de lalbum datant de 1962, donc avant la célèbre et tranquille traversée de piste de Jacky Ickx en 1969, on a le droit à un magnifique départ « type Le Mans ». Dans ce même album, on y découvre un Lutèce (Paris) aux rues encombrées de chars, quon retrouvera dans Le Tour de Gaule dAstérix. Egalement dans Le Tour de Gaule dAstérix, les encombrements sur la route du soleil.

Dans Astérix et les Normands, cest le char de Goudurix, neveu dAbraracourcix, qui fait directement référence aux puissantes voitures italiennes dont Uderzo est un amateur.

Au-delà de ces références humoristiques, lautomobile peut devenir un véritable système scientifique de datation dun récit, plus efficace que le carbone 14 ! Cest le cas dans Harry Dickson par exemple. Très documentés, Pascal J. Zanon et Christian Vanderhaeghe sont très précis dans la représentation de leurs véhicules. Pour sen convaincre, il suffit dadmirer le détail du ciel de toit de la Berliet qui apparaît dans Le Royaume Introuvable.

Cette berline dérivée de la Peugeot 402 nest pourtant ni très connue ni répandue. Un autre détail : la tablette type aviation dans lhabitacle du Stout Scarab de Echec au Roi, un ancêtre des monospaces actuels.

Pour représenter leurs voitures, les auteurs sinspirent toujours de miniatures, venant de chez Brooklin Models ou Western Models le plus souvent. Ainsi, on voit apparaître dans Echec au roi un attelage Pierce Arrow qui na jamais existé en réalité avec cette décoration. En effet, ce modèle argent à chromes dorés fut produit au 1/43° en série limitée pour les 20 ans de Brooklin Models.

Un détail qui montre que si les auteurs sont très attachés à garder une cohérence temporelle pour leurs véhicules (et cest pareil pour les locomotives, avions et armes), ils se font avant tout plaisir en les incluant dans leurs histoires. Il est ainsi peu probable quune Bugatti Atlantic et une Pierce-Arrow Silver Arrow ne se soient jamais rencontrées dans les rues de Paris comme cest le cas dans Le Royaume Introuvable.

Mais ces automobiles rares font partie du plaisir de la lecture de Harry Dickson et les voitures ny sont pas choisies au hasard mais bien en fonction de la personnalité de leur conducteur. Mais de ça, nous en reparlerons demain

Plus rigoureux est Jean-Pierre Gibrat, dans Le Vol du Corbeau. On peut y voir une circulation réduite dans un Paris occupé, avec quelques voitures à gazogène comme cette Renault Primaquatre (aux millésimes un peu mélangés).

Un des auteurs parmi les plus réputés pour sa rigueur et sa documentation est Edgar P. Jacobs, à lorigine de Blake et Mortimer. Que ce soit les lieux (je reconnais mon coin dans S.O.S. Météores) ou les automobiles. En fait les histoires sont assez similaires dans lesprit à celles de Harry Dickson, Blake et Mortimer ayant lantériorité. Lutilisation de lautomobile est donc assez similaire mais sans aucune invraisemblance. Lexactitude de la circulation tokyoïte dans Les 3 Formules du Professeur Sato en est le parfait exemple.

Mais Jacobs se fait également plaisir avec des voitures remarquables (au sens étymologique du terme) quil confie le plus souvent aux méchants. Cest le cas de la Lincoln noire dans Le Mystère de la Grande Pyramide ou, mieux encore, de la Ford Custom pilotée par Sharkey dans S.O.S. Météores.

Mais dans lEnigme de lAtlantide, on a droit à une vision futuriste du transport personnel. Après une longue expédition spéléologique (Jacobs ayant été marqué par une chute dans un puits lors de sa jeunesse, les grottes, caves et autres repères souterrains ont une place importante dans son uvre), le capitaine Francis Blake et le professeur Philip Mortimer arrivent chez les Atlantes, civilisation perdue et mythique vivant sous terre après lengloutissement de leur continent. Principale différence avec le reste du monde : leur prodigieuse avance technologique.

On y voit donc apparaître des véhicules évoluant à quelques centimètres du sol, sur des routes balisées de radars. On y découvre également un monorail, très inspiré de lAérotrain de Jean Bertin. Tous ces fantastiques véhicules sont mus par des moteurs nucléaires, alimentés dorichalque, le fameux minerai des Atlantes.

Une autre vision du futur assez similaire mais tout de même intéressante se trouve dans Yoko Tsuno. Ici les Atlantes sont remplacés par les Vinéens, de véritables extra-terrestres, humanoïdes à la peau bleue. Comment fut créée Vinéa ? Grâce à une crème de beauté ! Etant gamin, Roger Leloup a gardé en mémoire limage dune pub défraîchie pour une crème Nivea. La couleur passée de la photo faisait apparaître une femme à la peau bleue. Le nom ? Celui quil lisait alors, étant dyslexique : Vinea. Grand amateur daéronefs en tous genres (il a collaboré avec Hergé pour la création du Carreidas 160 qui apparaît dans Tintin, Vol 714 pour Sydney), Roger Leloup sest fait plaisir avec les engins des Vinéens.

Ici, lavance technologique nest pas due à un minerai quelconque mais à une grande maîtrise des forces électromagnétiques. Des rails électromagnétiques guides ces engins personnels, volants là encore. A la ville, Yoko roule en Honda Dax ou en Nissan 100 NX.

Mais celui qui est le plus atteint par ce que jai envie dappeler le « syndrome de la voiture volante » dans la vision futuriste du transport est bien Valerian. Lagent spatio-temporel, flanqué de sa jolie coéquipière Laureline ont loccasion dexpérimenter ce type de véhicules dans Les Cercles du Pouvoir. Rubanis y est une sorte de ville de débauche et de corruption. Cet album semble un brouillon (tout de même très bien réalisé) du film le Cinquième élément, aux décors également signés Jean-Claude Mézières.

Le chauffeur de taxi STraks, au style de conduite disons agressif annonce le personnage de Corben Dallas dans ce film. Ces voitures volantes sont légion dans les albums et films de science-fiction. Un vieux rêve également partagé par Enki Bilal.

Leo est lui assez optimiste. Dans Aldébaran, les véhicules sont propres, utilisant la propulsion éolienne.

Seules quelques voitures électriques parcourent les rues de la capitale Anatolie.

Enfin, terminons par une vision un peu plus réaliste et aussi moins réjouissante, celle du futur rempli dinsécurité que lon aperçoit dans Vlad. Un peu dans le style Mad Max., Vlad roule dans une sorte de cube à roulettes blindé.

Une vision du futur partagée par le concept Ford Synus présenté à Detroit en 2005, prônant un repli à lintérieur avec une ligne en forme de coffre-fort.

La suite demain, avec les héros de B.D. et leurs voitures.

Lire également :

La bande dessinée et l’automobile : Partie 1, Tintin.

La bande dessinée et l’automobile : Partie 2, Michel Vaillant.

La bande dessinée et l’automobile : Partie 4, les héros et leurs voitures.

La bande dessinée et l’automobile : Partie 5, Quand l’automobile s’inspire de la B.D… et inversement.

La bande dessinée et l’automobile : Partie 6, Mangas et Comics.

La bande dessinée et l’automobile : Partie 7, à découvrir...

Lien : Festival B.D. Angoulême.

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