24 heures du Mans 2018 : Le SMP Racing humble mais déterminé

Le banquier russe Boris Rotenberg, grand patron du team a été formé à l’école du judo aux côtés de Vladimir Poutine puis est devenu Président de la Fédération de Russie de judo. Il est également engagé dans le football, à la tête du Dynamo de Moscou et souhaite marquer de son empreinte ce championnat WEC-FIA. Dans cette perspective, il a confié l’exploitation des prototypes à l’écurie française ART Grand Prix. Tout naturellement c’est Sébastien Philippe, Team Manager et Directeur général chez ART Grand Prix qui se retrouve en première ligne pour tenter d’obtenir un résultat significatif lors de ces 24 heures du Mans.

Sébastien Philippe cumule bien des atouts pour assumer une telle responsabilité. En effet, passionné depuis son plus jeune âge, Sébastien s’est très vite essayé au karting. Vainqueur de la coupe du Monde Junior CIK en 1991, il effectue ses débuts en monoplace deux ans plus tard. Il remporte la Coupe de France Renault ELF Campus FFSA dès sa première saison. Il s’engage ensuite en Formule Renault, puis en Formule 3 sous les couleurs d’ASM F3 (qui deviendra ART Grand Prix par la suite), où il nouera des liens avec Frédéric Vasseur, le grand boss.

1999 marque son départ au Japon, pour continuer en F3 dans un premier temps et en Super GT par la suite. Couronné vice-champion en 2006, il rentre en France à l’issue de la saison 2009. C’est alors que Sébastien bascule de l’autre côté de la barrière en devenant Team Manager de l’écurie OAK Racing, où nous l’avions rencontré en 2013, année d’une victoire en LMP2 aux 24 heures du Mans, avant qu’il ne prenne ses fonctions début 2014 chez ART GP.

Pour la course 2018 on le retrouve à la tête du team SMP Racing qui a engagé les BR-Engineering BR1-AER N°11 et N°17.

Sébastien, comment as-tu atterri chez SMP, comme manager général, je crois ?

«  Comme tu le sais déjà je m’occupe d’Art Grand Prix et SMP Racing a confié l’exploitation de l’équipe de course à ART et tout naturellement, je me retrouve team manager. »

Parle-nous de cette structure, implantation, ambitions… ?

«  Art, nous sommes dans l’Yonne à Villeneuve la Guyarde. On est assez nouveaux en endurance. On cherche  à monter palier après palier. Nous n’en sommes qu’à notre deuxième course. C’est un projet très ambitieux en collaboration avec BR Engineering et AER. Notre objectif pour le futur, c’est de gagner en endurance, les 24 heures du Mans et le WEC. Dans un premier temps, nous n’avons pas d’autre objectif que de faire le mieux possible d’être humble et d’apprendre. »

Venons-en à tes fonctions, le team combien de personnes, venues d’Art  et d’ailleurs ?

« La partie exploitation c’est le personnel ART. Pour le management c’est en collaboration avec SMP mais tout ce qui est de l’ingénierie et les mécanos c’est ART. En tout nous sommes une cinquantaine »

Mais quel est le rôle de SMP Racing ?

« Toute la partie management avec les choix stratégiques de moteur, pneus, pilotes se fait avec SMP (dont les bureaux sont à Moscou) alors que, ART gère la partie purement technique. »

Avec quel bilan technique arrivez-vous au Mans ? Avez-vous fait des essais 24 h ?

« Non, nous n’avons pas eu ce loisir-là. On a suivi un programme de développement dans l’année 2017. Pour nous, c’est encore tout neuf. On a réussi à faire 7 000 kilomètres cet hiver mais on est encore de cette phase d’apprentissage,  qui va s’étendre sur toute l’année 2018. »

Peux-tu nous présenter l’auto assez peu connue ?

« C’est une toute nouvelle voiture, qui a été conçue en partenariat entre  les bureaux de BR Engineering et de Dallara. En fait, c’est quand même Dallara qui est derrière ce produit. Il a, in fine, dessiné l’auto et l’a produite. C’est encore très nouveau. Le moteur c’est un AER conçu et fabriqué par des anglais. Ces derniers avaient équipé il y a deux ans Rebellion et Bykolles et avaient connu de gros problèmes de fiabilité. Depuis, ils ont beaucoup travaillé sur les perfos et la fiabilité et du coup, il y a un vrai step de passé. Nous avons avec eux une très bonne collaboration et nous n’avons  connu que très peu de problèmes au niveau du moteur. »

Comment Button et Sarrazin s’intègrent dans l’équipe russe de pilotes ?

« Très bien, tout à fait bien. Stéphane Sarrazin a une très grande expérience de l’endurance. Il est passé chez Toyota, chez Peugeot qui sont de gros constructeurs, il amène avec lui tout ce bagage technique et sportif et nous aide ainsi à nous développer encore plus vite. Jenson Button,  c’est super, malgré son parcours il se montre très humble, il se met au niveau de l’équipe et nous apporte aussi  beaucoup  pour ce qui concerne l’organisation, le feed-back, le ressenti-voiture. Avec ces deux pointures ça partage très bien. »

Les russes sont pas mal non plus ?

« La Russie a la chance d’avoir de très bons pilotes, justement formés par SMP. On a Petrov et Aleshin, qui ont eu très grande expérience du sport automobile et deux petits jeunes Orudzhev et Isaakyan qui viennent de la 3.5 et possèdent une belle pointe de vitesse. Il faut qu’ils s’adaptent à la  philosophie endurance assez différente. En tout cas, je suis très content des pilotes et du travail qu’ils fournissent. »

Comment vois-tu votre course ?

«  C’est une course de 24 heures et j’ai un peu d’expérience de ces courses-là. Notre objectif c’est de bien faire le boulot, après, il  y a plein de choses qui peuvent se passer. Je ne tire pas de plan sur la comète, si ce n’est d’être impliqué à 100% pour ne rien regretter, mais  en restant humble et réaliste. »

Est-il envisageable d’aller chercher les Toyota ? Que penses-tu des équivalences hybrides et non hybrides ?

«  Aller chercher les Toyota, oui parce qu’ils n’ont que 2 voitures et l’on sait –eux, mieux que personne avec la course perdue en 2016, à 5 minutes du drapeau à damier- que sur une course de 24 heures tout peut arriver. On verra bien. C’est sûr qu’en termes de performances, ils seront très compliqués à aller chercher. Pour nous, il faudra aller au bout sans encombre et prêts à exploiter le moindre petit faux-pas qu’ils pourraient faire.

La question des équivalences on pourrait en parler pendant des heures… C’est effectivement un gros sujet que je me refuse à commenter dans la Presse, ça ne sert à rien, c’est un faux débat. On part avec les règles qui sont connues, nous sommes au début du projet et je préfère qu’on se concentre sur ce qu’on doit faire et comment on doit le faire et à partir de là, on verra plus tard. »

Alain Monnot

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(5 commentaires)

  1. Merci pour tous ces bien beaux articles sur les 24h, je les trouve d’une qualité rare. Ils renvoient bien l’aventure humaine que peut engendrer cette course vue de l’intérieur. Sans parler du défi technique élevé, et qui reste tout à fait d’actualité en matière de compétition.

    Vivement La Course !!! Continuez !

    1. Merci !

      Nous sommes sur place toute la semaine (et là à la conf de press des 24h). Nous avons encore qq sujets en réserves et sommes toujours à l’affût de sujets « décalés », sur les coulisses, que les spectateurs ne voient pas toujours.

  2. Team de compète sur le papier ! la voiture aussi n’a pas l’air dégueu non plus.
    Maintenant Button ou Alonso ça se jouera au plus malchanceux ^^

    1. La voiture c’est la Dallara LMP2 qui a été adaptée au LMP1, d’ailleurs ce n’est pas très surprenant de retrouver les Rebellion un peu devant vu que pour eux c’est la Oreca.

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