Selon les informations financières fournies par le groupe Michelin, les ventes ont progressé en termes de montant de 16,3% en 2021 par rapport à 2020. Elles totalisent 23,795 milliards d’euros ce qui reste légèrement en dessous des 24,135 milliards d’euros de 2019. Le résultat opérationnel des secteurs frôle les 3 milliards d’euros à 2,966 milliards. Cela représente une marge de 12,5% identique à celle de 2019, année pré-crise Covid. La marge sur les pneumatiques de tourisme s’établit à 13,7%.
En volume, les ventes de pneumatiques progressent de 11,8%. Les ventes hors pneu grimpent de « seulement » 7,7%. Evidemment, si les volumes progressent moins que les montants, c’est que le prix unitaire s’est renchéri. Cela ne va pas sans poser de problème comme on le verra plus loin.
Michelin s’enorgueillit de gagner des parts de marché dans le segment des pneus 18 pouces. Mais, également d’avoir un mix d’activités entre première monte et remplacement « très favorable dans le segment automobile ».
Tout pour le dividende ?
Le groupe parle aussi d’un « pilotage dynamique des prix sur les activités non indexées s’appuyant sur la puissance de la marque et permettant de compenser les facteurs d’inflation ». Pour autant, l’inflation pose un réel souci puisque le prix des matières premières explose en ce moment. D’autres soucis viennent tendre les prix comme une logistique plus chère, mais également des difficultés à recruter.
Pour autant, les bons résultats permettent à Michelin de dégager un flux de trésorerie libre (free cash flow) avant acquisition de 1,5 milliard €. Le résultat net 2021 s’établit à 1 845 millions € en hausse de 1 220 millions €. En conséquence, Michelin propose de verser un dividende aux actionnaires de 4,50 € par action. Au cours de vendredi (152 euros) cela représente 3% de rendement.
Néanmoins, ces annonces ont été accueillies un peu froidement par les investisseurs. Le cours est, à date, à 140 €. Il faut dire que pour continuer de plaire aux investisseurs, et continuer d’afficher une marge à deux chiffres avant la virgule, Michelin va devoir compenser la hausse des matières premières.
Quelle économies pour maintenir la marge ?
Si les prix finaux grimpent, il y a de forts risques que les gens se tournent vers des marques moins chères. Il faut donc, pour les dirigeants, continuer de trouver des économies. Ces économies d’échelle par exemple ont grimpé de 41 millions d’euros en 2021 pour atteindre 122 millions d’euros annuels. D’aucuns craignent que Michelin fasse, hélas, des économies sur l’humain.
En effet, malgré un contexte 2022 qui s’annonce très difficile avec la hausse de tout un tas de matières premières, des carburants (pour la livraison par exemple) ou autres, Michelin vise (hors nouvel effet systémique lié au Covid-19) « un résultat opérationnel des secteurs annuel supérieur à 3,2 milliards € à parités constantes et un cash flow libre structurel supérieur à 1,2 milliard € ».
Il est clair, pour certains, dont les syndicats ouvriers, que ces objectifs menacent l’emploi en Europe, en France notamment. Actuellement, les 17 000 salariés de Michelin France sont en pleine négociation pour des hausses de salaires générales. Des hausses qui ne semblent pas compatibles avec les objectifs de marge. Les discussions (NAO salaire 2022) sont tendues. En effet, la CGT, par exemple, demande 3,5% de hausse de salaire quand la Direction fait des propositions plus basses.
Notre avis, par leblogauto.com
Comme avec les constructeurs nationaux ou TotalEnergies, la « relation » des Français avec Michelin est « spéciale ». On attend tous un peu de l’entreprise française une sorte de traitement de faveur pour les emplois en France. Pour autant, avec environ 17 000 salariés sur les 124 760 au total fin 2021, on peut dire que Michelin est plus international que Français.
Surtout, certains ne manqueront pas de souligner que le dividende va reverser aux actionnaires un peu plus de 800 millions d’euros sur les 1 845 millions d’euros du résultat net. Environ 43,5% du résultat reversé, cela parait « trop » pour de nombreux syndicats. Le résultat net par action était de 9,69 € par action en 2019, année d’un coupon de 2€. En 2021, il est de 10,31 €/action en 2021 avec un coupon proposé à 4,50 €.
Les chiffres
(EN MILLIONS €) | 2021 | 2020 | 2019 |
VENTES | 23 795 | 20 469 | 24 135 |
RÉSULTAT OPÉRATIONNEL DES SECTEURS | 2 966 | 1 878 | 3 009 |
MARGE OPÉRATIONNELLE DES SECTEURS | 12,5 % | 9,2 % | 12,5 % |
AUTOMOBILE
ET DISTRIBUTION ASSOCIÉE |
13,7 % | 8,3 % | 11,1 % |
TRANSPORT ROUTIER ET DISTRIBUTION ASSOCIÉE | 9,6 % | 5,6 % | 9,3 % |
ACTIVITÉS DE SPÉCIALITÉS ET DISTRIBUTION ASSOCIÉE | 13,0 % | 14,8 % | 18,7 % |
AUTRES PRODUITS ET CHARGES OPÉRATIONNELS | -189 | -475 | -318 |
RÉSULTAT OPÉRATIONNEL | 2 777 | 1 403 | 2 691 |
RÉSULTAT NET | 1 845 | 625 | 1 730 |
RÉSULTAT NET PAR ACTION | 10,31 € | 3,52 € | 9,69 € |
DIVIDENDE PAR ACTION | 4,50 €5 | 2,30 € | 2,00 € |
EBITDA DES SECTEURS | 4 700 | 3 631 | 4 763 |
INVESTISSEMENTS HORS ACQUISITIONS | 1 705 | 1 221 | 1 801 |
ENDETTEMENT NET | 2 789 | 3 531 | 5 184 |
RATIO D’ENDETTEMENT NET | 18,6 % | 28,0 % | 39,2 % |
PROVISION POUR AVANTAGES AU PERSONNEL DIFFÉRÉS | 3 362 | 3 700 | 3 873 |
CASH FLOW LIBRE1 | 1 357 | 2 004 | 1 142 |
CASH FLOW LIBRE STRUCTUREL2 | 1 793 | 2 010 | 1 615 |
ROCE3 | 10,3 % | 6,0 % | 10,0 % |
EFFECTIF INSCRIT4 | 124 760 | 123 600 | 127 200 |
notes
1Cash flow libre : Flux de trésorerie sur activités opérationnelles moins les flux de trésorerie sur activités d’investissement retraités des flux de
trésorerie nets sur les actifs financiers de gestion de trésorerie et de garantie d’emprunts.
2Cash flow libre structurel : cash flow libre avant acquisitions, ajusté de l’effet de la variation des cours de matières premières sur les comptes clients, les comptes fournisseurs et les stocks.
3 Pour le calcul du ROCE, sont ajoutés au résultat opérationnel des secteurs l’amortissement des actifs incorporels acquis ainsi que le résultat des
sociétés mises en équivalence. Le ROCE est calculé après impôts, sur la base d’un taux standard de 25 %.
4 Fin de période.
5 Dividende soumis à l’approbation lors de l’Assemblée générale des actionnaires du 13 mai 2022.
NAO = négociation annuelle obligatoire
Comme la plupart des marques françaises, Michelin finira par disparaître face à la concurrence asiatique bien meilleure.
Michelin, la bible des gastronomes , l’édition française 2022 sera donc dévoilée le 22 mars .
Je ne suis pas forcément aligné avec l’analyse sur l’impact de la hausse du cout des matières premières. Il s’agit en fait d’une « opportunité » pour toute société qui fait du haut de gamme. En effet, une société (qu’elle fabrique des pneus, des parfums ou des confitures…) qui fait du haut de gamme a en général un ratio « cout humain » / cout matière élevé (car localisée en Europe, car budget marketing et R&D…). Si on augmente le cout des matières, on baisse se ratio – donc l’impact devient plus fort sur des produits moins chers…
Tout pour le dividende, bien sûr.
Actuellement, les NAO sont tendues dans tous ces grands groupes français qui ont dégagé des beaux bénéfices en 2021. Hors de question de donner une augmentation au salarié ingrat, qui veut grignoter l’augmentation des bénéfices prévus, au risque de démotiver l’actionnaire investisseur chéri.
Ça serait ballot !