La vente Bonhams à l’occasion du Festival Of Speed de Goodwood est devenue l’une des plus spectaculaires, sinon la plus spectaculaire de l’année. La maison britannique aime les « coups », et après la Blower Bentley l’année dernière, elle a déniché une auto qui a le potentiel de faire exploser tous les records, un rêve de collectionneur : une Mercedes W196 ex-Fangio.
Dans toutes les anthologies de voitures de Grand Prix essentielles, la W196 occupe une place de choix. C’est la voiture du retour de Mercedes Benz aux Grand Prix en 1954, conçue par une équipe technique qui trouve ses racines dans celle des Flèches d’Argent d’avant-guerre et dont émerge Rudolf Uhlenhaut, un de ces ingénieurs de génie qui marquent de loin en loin l’histoire du sport auto. Sa mécanique en particulier est un bijou de technologie : 8 cylindres en ligne de 2,5l conforme à la nouvelle réglementation technique en vigueur pour la saison 1954, dotée de l’injection directe issue des travaux de l’ingénieur maison Hans Scherenberg pour le Messerchmitt BF109 pendant la guerre. Pour mettre toutes les chances de son côté, l’équipe allemande, à nouveau sous la férule d’Alfred Neubauer, s’offre les services de Juan Manual Fangio qui quitte Maserati en cours de saison pour mener l’équipe Mercedes aux côtés de Karl Kling.
Lors de sa première apparition au Grand Prix de France sur les longues lignes droites du circuit de Reims, la Mercedes W196 équipée d’une carrosserie enveloppante stromlinie fait preuve d’une supériorité absolue, surclassant instantanément les équipes italiennes jusqu’alors maîtresses du jeu, et s’impose par un doublé. Lors du Grand Prix à Silverstone la voiture carrossée se montre moins à l’aise en course et Mercedes revient avec des autos à roues découvertes pour le Grand Prix d’Allemagne, dont celle qui est proposée à la vente par Bonhams, le châssis 00006/54. Fangio gagne le Grand Prix d’Allemagne et le Grand Prix de Suisse avec ce châssis, avant de remporter le Grand Prix d’Italie. Il est couronné Champion du Monde. Il le sera également en 1955, faisant preuve avec la W196 d’une domination toute aussi insolente. Suite à la catastrophe du Mans cette année-là, Mercedes se retire à l’issue du dernier Grand Prix de la saison à Monza, remporté par Fangio, laissant en suspens l’épopée de cette voiture qui paraissait promise à dominer le sport pour longtemps.
La voiture mis en vente par Bonhams est le seul exemplaire de la W196 « hors captivité » comme le dit avec humour la maison de ventes aux enchères, faisant allusion au fait que les autres W196 existantes sont toutes dans le giron de Mercedes. Elle était jusque-là aux mains d’un collectionneur allemand, et reste globalement « dans son jus », ayant roulé à dose homéopathique depuis la fin de sa carrière sportive. La rareté, le prestige de la voiture et de son pilote, et son état sont un cocktail qui pourrait faire exploser les compteurs. Bonhams laisse planer une estimation de 5 millions de livres, mais c’est un minimum. 7, 10, 15 millions ? Rendez-vous à Goodwood en juillet pour le découvrir.
Source et crédit images : Bonhams
Lire également: