Un prototype Alfa Romeo sort d’un sommeil de 80 ans

Nous en avons eu un bref aperçu dans notre article consacré au Museo Storico Alfa Romeo : la compétition coule dans les veines du Biscione et la collection de voitures de course milanaises ressemble à une sorte de Panthéon mécanique. Après une minutieuse reconstitution et une restauration mécanique opérée par les équipes de Progetto 33, le véhicule en question a fait une halte au siège d’Alfa Romeo Racing, à Hinwill, en Suisse, dans les quartiers de Sauber Motorsport, où les derniers contrôles ont été effectués dans la soufflerie, avant que le moteur de la belle ne soit réanimé.

La belle en question a une histoire singulière. Baptisée dans la communication officielle « 12C Prototipo », elle s’appelait à l’origine S10 SS (Sprint Speciale). Bref retour historique.

Laver l’affront germanique

Au début des années 30, Alfa Romeo domine la scène des grands prix, notamment avec Tazio Nuvolari, jusqu’à ce que les construteurs allemands débarquent avec leurs énormes budgets subventionnés par le Reich et leurs surpuissantes flèches d’argent. A l’exception de quelques exploits épisodiques, comme au GP d’Allemagne 1935 où Nuvolari se joue des Silberpfeile, les bolides allemands écrasent tout sur leur passage entre 1935 et 1939, comme un signe précurseur du Blitzkrieg. Les deux nations ont beau sceller un « pacte » d’Acier en 1939, sur la piste, seule la fierté nationale compte !

Alfa Romeo subit et rien n’y fait, malgré les nombreuses monoplaces développées pour contrer la domination allemande. La course à la puissance est une obsession, et du côté du Biscione, on expérimente différentes solutions, comme la rocambolesque  « Bimotore » à 16 cylindres ou, plus raisonnablement, des monoplaces mues par des inédits V12 : la 12C-36 et 12C-37 (V12 4.0 litres).

Même quand Alfa veut échapper aux Allemands, on les rattrape ! En 1938, les autorités inaugurent la Formule 3 litres qui limite la cylindrée des moteurs suralimentés. Alfa Romeo lance ainsi la 308, mais Mercedes développe en un temps record la W154 qui remporte sa première course au GP de Tripoli, disputé dans la colonie italienne de Lybie. Offense !

Nouvel affront en 1940 quand c’est une BMW 328 qui remporte les Mille Miglia, une épreuve quasiment monopolisée par Alfa Romeo depuis le début des années 30 ! La petite sportive allemande, mue par un 6 cylindres en ligne de 80 chevaux, se permet de devancer une armée de 6C 2500. Dans le clan italien, on veut une revanche pour 1941. C’est la raison d’être de ce prototype de voiture de sport.

Un V12 moderne

L’aérodynamisme est très étudié: les supports de capot et les poignées de porte ont disparu, pour optimiser le Cx. On reconnaît aussi dans sa grande calandre béante le faciès des monoplaces Tipo C de la fin des années 30. Le poids total ne devait pas excéder 1100 kilos.  Côté mécanique, on mise sur un bloc développé par un certain Gioacchino Colombo avec un V12 à 60 degrés, doté de trois carburateurs et utilisant en partie du magnésium, pour une puissance qui doit dépasser les 180 chevaux. Colombo, oui, celui qui après la guerre contribuera à la naissance du mythe Ferrari avec les V12 des 375F1. C’est là que se trouve l’intérêt historique de cette 12C Prototipo (ou S10 SS), puisque la conception de son moteur préfigure les moteurs de course modernes qui surgiront après la guerre.

Un historique agité

Evidemment, l’éclatement de la guerre met un terme prématuré à tout cela. La seule « S10 SS » existante (sur les 4 exemplaires qui étaient prévus au départ) est cachée pendant les hostilités près du lac de Côme puis, une fois la paix revenue, Alfa Romeo mise tout sur la monoplace Alfetta dont on connaît l’épopée victorieuse. Cette S10 SS connait ensuite une histoire mouvementée, au gré de ses changements de propriétaires, avec une carrosserie démontée et réinstallée sur d’autres châssis et même des changements de motorisations sur le châssis d’origine.

Au final, le dernier propriétaire en date a réussi à reconstituer le puzzle et à « remembrer » la S10 SS en la confiant au spécialiste suisse de la restauration Egon Zweimüller, qui s’est récemment occupé d’une Bugatti 35C et d’une Alfa Romeo 33 Stradale. La voiture porte les stigmates du temps et n’est pas encore en mode « concurs d’élégance », avec des fissures et de nombreux éléments de carrosserie très usés, mais c’est ce qui fait aussi son charme. Petie cerise sur le gâteau, le redémarrage du V12 a été enregistré (mais c’est trop bref !)

Images et video : Alfa Romeo / Sauber

sources : grand prix winners, wikipedia et auto-motor-und-sport.de

(9 commentaires)

  1. Che bella Macchina!

    Si avec des racines comme celle-ci (ou la 402 Darl’Mat de la même époque, les Chrysler ou les DS Chapron, les FIAT et SIMCA Abarth) Stellantis ne nous fait plus rêver, c’est à rien y comprendre!

    Faut oublier les gros moulins thermiques, passer à l’hybride rechargeable ou le pur élec c’est irrémédiable pour l’environnement, mais ce qui fait tourner le regard c’est d’abord le Style! Alors les designers, on n’hésite pas, on pioche dans l’histoire ultrariche du groupe, et on fait rêver avec des belles carrosseries.
    Un porte étendard par marque, ça suffit. une belle citroen, Peugeot, Alfa, fiat, Lancia, Opel et les clients seront fidélisés.
    je trouve qu’Opel a su trouver une identité visuelle forte sur les derniers modèles, vivement un nouveau style Citroën, Lancia, Fiat…

    1. Citroen a fait exactement l’inverse, qu’une Xantia est plus sexy qu’une C5 aircross ou leur C4 qui ne ressemble à rien, c’est dire…..

  2. Jolie bête (quoique typique de l’époque). Dommage qu’on n’en sache pas plus sur le « modernisme » du V12: 2 ou 4ACT ? 2 ou 4 soupapes/ cylindre ? nombre de paliers du vilebrequin…Matériau du bloc moteur, des culasses…

    1. Les infos ne sont pas faciles à trouver sur ce prototype, dont le nom lui-même n’était pas l’appellation d’origine. Un roulage public est prévu, peut-être en apprendrons-nous plus à ce moment là.

    2. Ne serait-il pas possible de parler de véritables automobiles de sport sans revenir noys bassiner avec la ferraille allemande qui finit par donner la nausée ? Pour leq esthètes, leq gens de bon goût et équilibrés, je pense que oui .

      1. mon ami, le problème d’ALFA ROMEO a étè les journalistes…les journalistes ( pratiquement TOUS!!!!) ont toujours pris un malin plaisir a descendre ALFA, pourquoi? va savoir…il n’y a pas une marque au monde qui a ete plus critiquee qu’ALFA ROMEO. ales ecouter, c’est la plus grosse merde automobile que la terre a creee.
        mais cette « merde » est toujours lá !!!!
        et pour rappel, a ces messieurs les journalistes, quand Alfa a ete en vente….beaucoup d’entreprise voulait se l’approprier…Ford….BMW s’etait mis a rever de posseder le fabuleux V6 Alfa…, soit dit en passant, ALFA est avant tout un motoriste , et MERCEDES a fait appel au service d’ALFA pour developper son moteu diesel…
        sans oublier la raclee infligée en DTM, …tout ça pour dire que justement il y a une heure que je lisais le classement du grand prix de formule 1:
        Sir LEWIS HAMILTON est 5 sur la grille…..et la grande surprise vient de la HAAS….
        pas un seul mot sur la 6eme place de Botta avec son ALFA ROMEO ??????????????????????
        c’etait pourtant cocasse , bin non….rien du tout

  3. « il y a une heure que je lisais le classement du grand prix de formule 1 »

    >> Déjà c’était les qualifications et pas le GP. Et vous ne l’avez pas lu chez nous vu qu’on a pas arrété de parler de Magnussen et Bottas 😉 pas bien de ne pas nous lire.

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