Le flot grisâtre de la morne circulation gazolée s’écoule sans âme aux abords d’une Méditerranée luisante d’un soleil matinal plein de promesses. Il faut l’avoir vu au moins une fois. Déhancher, déboiter, dépasser, s’extraire de cette litanie pâlotte paré d’un orange tanguant, comme un jus de fruit rafraîchissant (Tang Orange ?) dans un océan d’eau croupie. Ca illumine tout à coup le paysage, dévisse la tête des passants, arrondit leur regard, enjolive la matinée voire même la journée et avant tout dessine un sourire béat limite niais sur le visage d’un pequin moyen: Moi. Le Carver One, ça fait ça. La première fois.
Clairement, le Carver rend un peu stupide. Physiquement. Faites l’expérience. A la vue de l’engin, on se tait d’abord. On observe. On se penche, on se baisse. Puis on se retourne invariablement avec un air benêt et un sourire large comme le Grand Canyon en demandant: C’est quoi ça ?
Un Carver One.
Le siège social est basé en Hollande et la construction est assurée par Vandenbrink, le créateur. Si le volume de vente n’excédera jamais 500 véhicules par an pour des questions de facilités d’homologation, sachez qu’un partenariat vient d’être signé avec la très réputée société Prodrive pour construire et faire évoluer le concept. Un gage de sérieux pour l’avenir.
En ce qui concerne la partie administrative, un permis voiture est suffisant pour cet engin homologué au niveau européen. En France, il est rangé dans la catégorie des tricycles à moteur et vous évitera donc le passage au contrôle technique dans 4 ans.
Avant toute chose, pour pouvoir parler sereinement du Carver One, il faut mettre de côté un élément perturbateur: le prix. Annoncé à 35.850 euros, il est de nature à éteindre les plus enjoués. Surtout lorsque l’on dit que l’autoradio fait partie des options. Et pourtant il ne fait que refléter le caractère « artisanal » (dans le sens « art ») de la fabrication faite à la main. Ceci est d’autant plus frustrant que le Carver fait envie. Notamment après avoir rendu les clés.
Malgré ça, il faut être honnête. Il a une drôle de gueule. Pas évidente au premier abord avec ses 4 tentacules perçant un facies plat encadré de 2 globuleux optiques. Si les petits gars de Roswell en 1947 avaient dessiné une auto, sûr qu’elle ressemblerait à ça ! Le Carver, c’est un peu la gymnaste au visage disgracieux mais aux envolées magistrales, la joueuse de tennis difforme mais au coup droit génial, c’est vraiment le Ribery du parc automobile.
Le Carver est un tricyle, sorte d’hybride entre voiture et moto qui dispose d’un ensemble postérieur tiré de l’auto et d’un naseau farouchement motocycliste. De fait, les volumes sont étranges. Autant lorsque il est vertical, on peut y trouver un soupçon d’équilibre dans les formes, autant lorsqu’il penche, c’est moins flagrant.
Ah oui, le Carver penche. C’est ce qui fait toute sa spécificité par rapport à un simple Trike de Biker tatoué ou à la Reliant Regal de Mister Bean. Le DVC pour Dynamic Vehicle Control permet au cockpit de basculer dans les courbes en adaptant automatiquement l’angle d’inclinaison en fonction du degré de braquage au volant. L’avantage majeur se calcule en km/h. La vitesse de passage en courbe avant de vous mettre au tas devient nettement plus …sensationnelle.
Autre différence notable comparée au Trike du Hells Angels, vous êtes assis comme dans une auto. Sièges baquet, ceinture, volant et trois pédales. Comme dans une Twingo. Ou plutôt comme dans une Daihatsu puisque le groupe motopropulseur provient directement du Japon.
C’est en fait une vieille connaissance qui vous pousse à la roue, puisque ce n’est rien moins que le très compact (ce qui explique son choix) et techniquement évolué 4 cylindres 660 cc turbocompressé développant 68 ch. Celui là même que nous avons essayé dans la Copen il y a quelques temps.
Si la puce de Daihatsu qui pesait 833 kg nous faisait déjà pas mal transpirer, sachez que le Carver affiche un poids contenu de 670 kg.
Toute la saveur de notre « Tangue Orange » se situe donc dans ce paradoxe qui veut que vous conduisiez une moto assis dans une voiture.
Et comme dans une moto, c’est en tandem que la balade en couple sera possible. Vous pourrez donc embarquer un passager ou une passagère qui viendra entourer ses cuisses autour de votre anatomie qui n’en demandait pas tant. Si d’aventure, c’est votre pote Dédé que vous allez chercher à la sortie de son court de tennis, dites lui bien de changer de chaussettes…
En tous les cas, essayez de nouer la conversation avant de partir en balade. Après, je vous le garantis, vous aurez d’autres sources de plaisir qui viendront émoustiller votre cortex et vous renverseront de bonheur.
A suivre…
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