Certes si l’Iran n’est pas – officiellement – en odeur de sainteté dans les rangs de ce qu’on appelle communément la « communauté internationale », l’administration française semble quelque peu zélée pour expulser ses ressortissants hors de France. Faisant fi d’ailleurs des relations industrielles fortes entre Renault et Téhéran, voire des relations plus intimes existant entre Areva/Cogerma et l’Iran.
Un iranien qui effectuait un stage au Technocentre de Renault a été expulsé mercredi 20 juin vers l’Iran, menottes aux poignets. Ce centre de conception – qui a été récemment meurtri à plusieurs reprises par des cas de suicides – regroupe plus de 11 400 employés, et offre la possibilité à de nombreux étudiants d’y réaliser leur stage de fin d’études.
Lundi 18 juin, un jeune Iranien, étudiant à l’École des Mines à Paris, s’était présenté à la sous-préfecture d’Antony en vue d’obtenir le renouvellement de ses papiers. Mais sa requête s’est soldée … pas une décision d’expulsion de la sous-préfecture, cette dernière arguant que sa présence sur le territoire français constituait « une menace pour l’ordre public ». Afin de justifier leur décision, les services administratifs se sont appuyés sur une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies appelant à la vigilance à l’égard des activités nucléaires de l’Iran.
Chez Renault, dans le service de la direction de la Logistique où ce jeune Iranien faisait son stage, tous ses collègues sont abasourdis. Ce stagiaire préparait un mastère de management industriel et systèmes logistiques, sans aucun rapport avec le nucléaire. Un référé-liberté a eu lieu le vendredi 22 juin au tribunal de Versailles, au cours duquel son avocate a demandé qu’il puisse revenir en France terminer son stage et ses études. La décision du tribunal de Versailles, intervenue le 26 juin, a interdit le retour sur le territoire français de ce jeune stagiaire, que tous ses collègues du Technocentre appréciaient.
Une délégation de la CGT du Technocentre était présente pour le soutenir et témoigner que ses collègues et sa hiérarchie de Renault le soutiennent, invoquant le fait que ses études n’ont pas de rapport avec le nucléaire, et que, Renault produisant des Logan en Iran, les liens avec des stagiaires et des salariés de Renault d’Iran vont nécessairement se développer.
Ironie du sort, les premières voitures Logan de Renault, baptisée Tondar-90 et construites en Iran , ont été livrées à leur propriétaire lors d’une cérémonie organisée il y a deux semaines dans un grand hôtel de Téhéran. Environ 85.000 Iraniens se sont inscrits en mars, en versant chacun une avance de 5.400 dollars, pour acheter une Tondar (qui signifie Tonnerre en persan). « La production » des constructeurs automobiles iraniens « Irankhodro et Saïpa respectent parfaitement les normes de qualité internationale », a déclaré à cette occasion Andreas Gabriel, le directeur général français de la société Renault Pars. Cette co-entreprise rassemble le constructeur français d’une part, avec 51%, et la Société pour le développement et la modernisation de l’industrie iranienne (Idro), dépendant du ministère de l’Industrie, ainsi que Irankhodro et Saïpa.
« A l’heure actuelle, les usines de production d’Irankhodro et Saïpa produisent chaque jour un peu plus de 60 voitures, soit 1.500 voitures par mois. La production doit passer progressivement à plus de 10.000 par mois en mars 2008 », a ajouté M. Gabriel. L’objectif est de livrer d’ici là les 85.000 voitures achetées à l’avance par les Iraniens, même s’il paraît difficile à atteindre.
Selon les responsables français et iraniens, la production va augmenter à un rythme rapide. « Nous devrons atteindre une production supérieure à 200.000 véhicules pour la prochaine année iranienne » (mars 2008 – mars 2009), a expliqué M. Gabriel. La Tondar est proposée en trois modèles, du plus simple à un prix minimum de 6.750 euros, au plus sophistiqué avec toutes les options à 8.600 euros. Renault et la partie iranienne avaient signé en mars 2004 le contrat pour la production de la Logan, aux termes duquel 20% de la production doit être exportée. Mais en raison du nombre des voitures produites, les exportations ne commenceront pas avant trois mois. La co-entreprise, qui représente un investissement total de quelque 300 millions de dollars, est le plus gros projet d’investissement direct du constructeur français en Iran depuis la révolution islamique de 1979.
L’Iran est en effet devenu ces dernières années un producteur de voitures significatif. « Irankhodro et Saïpa ont produit durant la précédente année iranienne (mars 2006 – mars 2007) 1,1 millions de voitures, ce qui fait de l’Iran le seizième producteur automobile dans le monde », a déclaré Mehdi Mofidi, directeur général d’Idro, qui chapeaute les deux producteurs automobiles. L’Iran produit des Peugeot 405 et assemble des 206, mais aussi des voitures sud-coréennes et japonaises, produites sous licence.
Sources : AFP, Presse syndicale