Depuis mai, Lola était en liquidation judiciaire. Le propriétaire, Martin Birrane, cherchait un repreneur. Malheureusement, en ces temps de crise, les candidats ne se bousculent pas. A fortiori pour un constructeur criblé de dettes et sans réel projet d’avenir. Le 5 octobre, Birrane décide d’arrêter le supplice. C’est le point final de 55 ans d’histoire.
En 1957, Eric Broadley et son cousin Graham construisent une « spéciale » à moteur Ford. Les Broadley la pilotent alternativement, dans les courses de club.
E. Broadley trouve qu’il est meilleur concepteur que pilote. Il sera désormais constructeur. Il se souvient d’un amour de jeunesse, une Mexicaine prénommée Lola. D’où la création de Lola Cars, en 1958.
La Lola mk1 est une sport. C’est un succès commercial et sportif. Elles sont construites chez Rob Rushbrook, dont Lola finit par racheter le garage et le nommer responsable de la production!
En 1960, Lola passe aux monoplaces avec la mk2:
En 1963, avec la mk6, Lola vise les courses internationales d’endurance.
A la même époque, Carroll Shelby est envoyé par Henry Ford II à Modène pour racheter Ferrari. Au terme d’un poker menteur, les négociations capotent.
Shelby, ancien distributeur Good Year en Californie, possède un bon carnet d’adresse. Il effectue un détour chez Lola. De retour à Detroit, il convainc Ford d’aller seul au Mans, avec une voiture basée sur la mk6. Ce sera la GT40, dont les deux premiers exemplaires sont fabriqués chez Lola.
Ce contrat avec Ford ouvre grand les portes des USA. Lola se lance en Indycar et remporte les 500 miles d’Indianapolis 1966 avec Graham Hill:
En parallèle, à partir de la GT40, il conçoit une nouvelle sport, la T70. La philosophie de Lola consiste à vendre un maximum de voitures auprès des privés.
En 1962, Lola s’engage brièvement en F1, avec John Surtees.
Quelques années plus tard, Surtees est embauché par Honda. L’écurie de F1 est à la dérive et il leur offre une reprise en main. Le châssis de la RA300 est ainsi conçu et construit chez Lola. D’où son surnom d’Hondola.
Le constructeur s’implique de plus en plus aux USA. On le retrouve ainsi en Can-Am.
En Europe, avec l’arrivée des sponsors, les écuries privées se multiplient. Lola surfe sur la vague avec toute une série de protos pour chaque discipline.
En Indycar, il y a une course à l’armement. De nombreux constructeurs jettent l’éponge et préfèrent engager des voitures construites par d’autres. D’autres, comme Lotus ou McLaren, se concentrent sur la F1.
Lola, lui, s’accroche.
Au début des années 80, Lola se concentre sur le très lucratif marché US (Indycar et IMSA.)
Il abandonne la F3 et la Formule Ford. Une décision rétrospectivement malheureuse…
L’Indycar est dominé par March. Carl Haas, l’importateur Lola, crée sa propre écurie (avec Paul Newman) pour mieux démontrer les qualités de ses produits.
Bonne pioche: March délaisse le CART pour s’investir davantage en F1. Leurs châssis ne sont plus aussi compétitifs et Lola voit revenir sa clientèle.
Il travaille également pour d’autres constructeur. On lui doit la Corvette GTP:
Il succède à March comme sous-traitant des Groupe C Nissan:
Il profite du passage de la F2 à la F3000 pour effectuer un retour. Les Lola F3000 sont dominées par les March, puis les Reynard.
Néanmoins, à la surprise générale, Lola est choisi en 1996 comme fournisseur unique de la F3000.
Comme March, Lola rêve de F1. Il construit des châssis pour Hill, Larrousse, puis Scuderia Italia, mais il souhaite une écurie « 100% Lola ».
Après un projet avorté en 1994, il saute le pas en 1997. Un projet mal ficelé, un partenaire (Mastercard) trop pressant, une voiture ratée… Après une non-qualification, Lola renonce et le constructeur est mis une première fois en faillite.
Eric Broadley doit passer la main. Martin Birrane, un gentleman-driver, rachète l’entreprise.
Il place Keith Wiggins (ex-patron de Pacific F1) à la tête.
Grâce au CART et à la F3000, les finances se redressent rapidement. Malgré cet échec, Lola reparlera plusieurs fois de retour en F1.
En attendant, il revient aux prototypes avec une voiture pour DAMS. Elle apparaitra dans le film Michel Vaillant (NDLA: oui, l’image est à l’endroit. C’est juste un cadrage « Luc Besson ».)
Reynard fait faillite et il se retrouve fournisseur unique du CART.
L’adversaire s’appelle désormais Dallara. A partir de la fin des années 90, il dispose d’un monopole de fait sur la F3.
En 2003, Lola tente un retour en F3, en s’associant à Dome. C’est un flop commercial et sportif.
Dallara se montre très agressif: FR3.5, Formel Master, A1 GP (avec Ferrari), GP2, Indycar, Indy Lights, GP3… Il remporte presque tous les appel d’offres!
Lola s’endort sur ses lauriers. En Champ Car, il se fait doubler par Panoz. Lorsque la F3000 devient GP2, c’est Dallara qui le double.
Du coup, l’Auto GP est la dernière discipline monoplace où il est présent.
Quant aux protos, le marché est trop atomisé pour faire vivre un constructeur comme lui.
Ses derniers projets se limitent à une mise à jour de l’Auto GP et à la future Indy Lights. L’ex-premier fabricant mondial de châssis de compétition n’est plus que l’ombre de lui-même.
La seule note positive est la conception de la Caterham SP/300 R.
En mai, Lola Cars fait une deuxième fois faillite.
La différence avec 1997 est qu’il n’a pas de potentiel pour remonter la pente. Pas de quoi motiver un repreneur.
La dissolution est inévitable. Seul restera Lola Composites, un sous-traitant pour l’aéronautique militaire.
Crédits photos: Lola Cars, sauf Ford (photos 5, 6, 9, 11, 13 et 20), Honda (photo 8) Nissan (photo 15), Super Nova (photo 16), Lamborghini (photo 17), Europa Corp (photo 19), Dome (photo 21), DAMS (photo 22), Auto GP (photo 23), Lotus (photo 24) et Caterham (photo 25.)
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