Un nouveau cas de tentative de suicide d’un salarié de PSA Mulhouse, qui s’est produit mardi dernier, a été révélé samedi par Françoise Ruch et Jacques Hestin, têtes de liste de la LCR aux municipales de Mulhouse, dans un communiqué.
En 2007, cinq salariés de PSA Mulhouse s’étaient suicidés, dont l’un – semble-t-il – pour une cause d’ordre privé. Un autre salarié de PSA à Charleville-Mézières a mis fin à ses jours l’an dernier, invoquant ses conditions de travail.
La direction du site de Mulhouse a confirmé l’information tout en condamnant « fermement l’exploitation politique ou syndicale d’informations qui relèvent de la vie intime des intéressés« . Le porte-parole de la direction a précisé que le salarié était en congé de maladie depuis dix jours lorsqu’il a attenté à ses jours et que son état n’inspirait plus d’inquiétude. « Encore une fois, on cherche à stigmatiser une entreprise de plus de 10.000 salariés« , a-t-il déploré.
Selon les deux candidats de la LCR, le salarié handicapé, qui travaillait sur les lignes de montage de l’atelier de carrosserie, a tenté de mettre fin à ses jours en avalant des détergents de nettoyage industriel.
Vincent Duse, délégué CGT à PSA Mulhouse, figure sur la liste de Françoise Ruch et Jacques Hestin qui promettent de lutter contre « le scandale de santé publique » et « la loi du silence » qui entoure l’usine de Mulhouse. Ils affirment que la direction de Peugeot a fait signer « au travailleur un papier dans lequel il s’engageait à ne plus être absent pour cause de maladie à l’avenir« , une pratique « totalement illégale mais courante dans cette usine« .
« C’est totalement faux, la direction n’a jamais fait signer un tel papier à qui que ce soit« , a répondu le porte-parole. Selon lui, le salarié a reçu le 8 février un avertissement par écrit pour une absence injustifiée, « selon la procédure réglementaire« . Le lendemain, il s’est mis en congé de maladie et n’a plus reparu à l’usine, selon la direction.
En juillet 2007, après les suicides de quatre salariés du site en moins de deux mois, le syndicat CGT, qui a révélé cette série tragique, souhaitait d’ores et déjà « tirer la sonnette d’alarme sur les fortes pressions subies sur le lieu de travail« . Il entendait, sans vouloir établir de lien de cause à effet avec les drames, dénoncer « la pénibilité du travail qui favorise les dépressions » et voulait s’interroger sur la portée que peuvent avoir « des lettres culpabilisantes envoyées aux salariés en arrêt maladie« . La CGT a rassemblé une centaine de lettres-types, envoyées à des salariés malades du site de Mulhouse qui avaient fourni un certificat médical. Les autres syndicats, dont la CFDT et FO, confirment cette pression sans pour autant s’allier à l’action de la CGT.
Le Monde.fr s’est procuré une de ces lettres, dans laquelle le chef du personnel attire l' »attention sur l’importance et la fréquence de l’absence » du salarié. Il indique que l' »absentéisme personnel est incompatible avec l’organisation industrielle et perturbe de façon inacceptable le fonctionnement de [l’]unité de production« . Il conclut en demandant « de modifier [le] comportement de façon notable et durable« .
La CGT fait état de rumeurs selon lesquelles un des trois salariés qui se sont suicidés aurait reçu ce type de lettre. « Ces lettres sont envoyées dans des cas très rares, voire extrêmes« , précisait alors la direction de PSA Peugeot-Citroën à Mulhouse. Elles sont précédées d’un entretien téléphonique. « Cette démarche est faite après consultation du médecin du travail, en respect du droit social et vise à renouer le dialogue avec le salarié« , assure l’entreprise.
Mais selon Me Philippe Ravisy, auteur du livre Le Harcèlement moral au travail, « cette lettre exerce une pression qui est non conforme aux règles du droit du travail« . Il ajoute que cette note « porte atteinte à la liberté d’être malade » (L. 120-2).
Un autre avocat, Me Christophe Ricour, habitué à défendre les entreprises, confirme : « Cette lettre est culpabilisante dans le cadre d’un arrêt de travail. » Et d’ajouter : « Elle n’est pas écrite dans la nuance, elle est même discriminatoire à l’égard de la santé de l’employé. L’entreprise peut lui reprocher son absence et non sa maladie. Or c’est ce qu’elle fait quand elle lui demande de modifier son comportement. » Concernant « la perturbation du service évoquée, cela est toujours difficile à prouver« , indique Me Ricour.
Au-delà de cette lettre, le délégué syndical CGT de PSA à Mulhouse faisait état d’autres méthodes utilisées par l’entreprise envers ses salariés malades : « Certains responsables de secteur vont jusqu’à appeler des personnes en arrêt de travail pour leur demander de terminer leur congé maladie plus tôt et de revenir travailler afin de pallier le retard de la productivité. »
Sources : AFP, Le Monde