La pollution est revenue sur le devant de la scène après s’être faite oubliée ces derniers mois. Après une offensive citant un pic de pollution vieux d’un an, voici que le Maire de Paris mais aussi le Gouvernement se saisissent du débat en prenant allègrement quelques raccourcis.
Haro sur le diesel
Le Maire de Paris Anne Hidalgo a fait une sortie remarquée le weekend dernier en fustigeant une nouvelle fois « le diesel », coupable selon elle de tous les maux des Parisiens. Oubliant joyeusement qu’un diesel euro 6 est largement moins polluant que les anciens diesel et même qu’un véhicule essence d’un certain âge, Mme Hidalgo déclare : « Je veux la fin du diesel à Paris en 2020, et si possible au-delà du périphérique. J’ai commencé en éradiquant en trois mois les voitures diesel du parc de la ville ».
Certes la ville n’utilise plus quelques voitures diesel de son parc, mais les plus de 2000 utilitaires mazoutés sont eux toujours bien là. En outre, la Mairie de Paris n’est pas la donneuse d’ordre mais peut influer sur les achats de bus de la RATP/du STIF, pourtant ceux-ci sont toujours massivement diesel alors que des bus au gaz et/ou des bus électriques existent et ont déjà fait leurs preuves. Deux poids deux mesures ?
Dans le détail, le Maire mélange un peu tout et n’importe quoi puisque tout en parlant d’éradiquer le diesel, elle parle de pastilles pour identifier le degré de pollution des véhicules. Cette pastille quelle est-elle ? C’est la pastille Priorit’air, actuellement en discussion au Ministère de l’Ecologie.
Le retour de la pastille verte…
Priorit’air part d’une bonne idée qui consiste à signaler des véhicules par leur pollution, sans pour autant fustiger tel ou tel carburant. Dans cette optique, Mme Ségolène Royal s’inscrit à contre courant de Mme Hidalgo puisque le vilain diesel n’est pas montré du doigt. Sauf que…le sytème est plus que discutable. En effet, un site est mis en place avec l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) pour que chacun puisse connaître le degré de pollution de son véhicule, et quelques tests montrent les limites (faites vous une idée ici).
Par exemple, un véhicule mis en circulation en 1995 sera considéré comme très polluant (une seule étoile) qu’il soit essence ou diesel, tandis qu’un diesel de 2000 n’aura que 2 étoiles et un essence de 2000 en aura 4 (jusque là, cela suit les mises en place progressives des normes euro). Mais le plus surprenant est qu’un véhicule de 2011, essence ou diesel obtient 5 étoiles (le maximum) soit la même chose qu’une voiture électrique !
Un système bancale
Que l’on considère qu’un diesel/essence récent qui respecte Euro 6 soit considéré comme « propre », soit, mais considérer qu’un véhicules diesel/essence récent soit aussi propre (on parle d’émissions) qu’un véhicule électrique montre les limites évidentes du système. De plus certains véhicules Euro4 ont été livrés après la mise en place de Euro 5, ils seront sur-classés par le système. Et quand la prochaine norme d’émission sortira, comment expliquer aux utilisateurs que les euro 6 seront finalement moins propres que les véhicules électriques ? Va-t-il falloir mettre des « 5 étoiles ++ » un peu sur le modèle des appareils électroménagers ?
Pour en revenir aux épisodes de pollution sur lesquels s’appuie Mme Hidalgo pour avancer son argumentaire anti-voiture/anti-diesel, il faut (une nouvelle fois) rappeler les études Airparif qui indiquent que 68% des particules de l’Ile de France sont importées. Selon les conditions météorologiques, ces particules importées proviennent soit de France, soit carrément l’Allemagne, Hollande, Pologne. Et sur les 32% de particules produites localement, moins de 1/3 provient du trafic routier (véhicules particuliers et professionnels). Interdire certains véhicules dans Paris ne réglera en rien la pollution de la ville !
Londres, le contre-exemple
Pour mettre en place son contrôle des véhicules, le Maire de Paris compte réutiliser les portiques écotaxe, mais également sur une mise en place de caméras, pour lire les plaques et vérifier la date de mise en service des véhicules. En cas d’infraction aux règles d’interdiction qui seraient mises en place, un PV serait automatiquement envoyé.
Paris devrait regarder ce qu’il se passe ailleurs. A Londres par exemple qui a mis en place un péage urbain il y a plus de 10 ans, le nombre de voitures a baissé de 60 000 par jour (chiffres de la Mairie) mais la pollution aux particules fines est toujours présente avec des pics de pollution toujours aussi nombreux…
Source : Ministère, AFP, illustration : Ministère