Pourquoi le véhicule électrique menace La Réunion ?

En Métropole, on a largement gommé les potentiels « black out » qui menaçaient les régions Bretagne et PACA. Il y a eu pour cela de grands investissements pour doubler les voies d’approvisionnement d’ultra haute tension et de très haute tension. Mais, à La Réunion, l’approvisionnement est toujours local. Il n’y a pas, en effet, de connexion avec les pays voisins (via des câbles sous-marins) et l’île est donc livrée à elle-même.

Or, ce parc de VE qui n’est pour le moment « que » de 15 000 unités va continuer de croître et on estime que le VE pourrait représenter de 9 à 12% du parc roulant en 2028, c’est-à-dire demain. L’équilibre électrique du réseau est précaire à La Réunion et chaque comportement compte. C’est le cas de la charge des VE. C’est pourquoi EDF a lancé une grande campagne de sensibilisation sur la charge nocturne et non lors des pics de consommation.

Si on laisse les VE se charger entre 18 et 21h, La Réunion devra déployer des moyens de production pour ces périodes. Et on sait que ces moyens pilotables sont très souvent carbonés en plus d’être très cher « pour rien ». Mais, il n’y a pas que de la communication. En effet, EDF lance une expérimentation auprès d’une quarantaine de volontaires, pour le moment, qui consiste à installer une prise renforcée pilotée.

Des heures creuses solaires

Une prise renforcée va délivrer du 14 A contre 8 à 10 A pour une prise domestique classique. En termes de puissance, cela donne 3,2 kW contre 2,3 kW sur une prise classique. Cela charge donc plus vite même si cela reste une charge lente. Toutefois, cette prise est pilotée par le fournisseur d’électricité. En clair, elle ne délivre du courant que lorsqu’elle en reçoit l’ordre par le gestionnaire du réseau.

Pour les utilisateurs, rien ne change. En rentrant chez eux, ils branchent le véhicule qui ne se rechargera que sur les plages autorisées. Et elles sont suffisamment larges pour recharger les déplacements du quotidien (40 km/j en moyenne à La Réunion). On peut même la laisser branchée au-delà de la plage horaire puisque là encore le courant ne passera plus. Les utilisateurs de VE qui ont conscience du souci du réseau électrique peuvent déjà programmer eux-mêmes les recharges. Avec la prise, ils n’ont même pas besoin d’y penser : ils branchent, et voilà !

Cette expérimentation va permettre à EDF de proposer par la suite cette prise à tous les possesseurs et futurs possesseurs de VE. Les entreprises et les copropriétés seront aussi sollicitées dans le futur. Une autre option sera d’utiliser des boîtiers muraux pilotés. Outre une puissance délivrée plus importante, ils seront aussi pilotés sur le même principe et éviteront ainsi les pics de consommation. L’autre nouveauté étudiée par EDF ce sont des heures creuses en journée. En effet, l’électricité de l’île dépend beaucoup du solaire qui produit la journée quand il n’y a pas forcément de demande pour absorber la production. En proposant un tarif préférentiel ou « heures creuses solaires » le but est encore de diriger une partie de la consommation sur les plages horaires favorables.

L’Île de La Réunion est un laboratoire géant pour anticiper un parc de VE important. En Métropole, on est grosso-modo à 2,5% du parc roulant, sauf que notre production électrique est plus diversifiée et que le démarrage de solution pilotée carbonée ne se fait qu’en tout dernier ressort. Les solutions imaginées pour La Réunion seront tout de même réplicables en Métropole.

Source : France Info

(24 commentaires)

    1. Il semblerait que la Corse soit électriquement reliée à l’Italie et la Sardaigne, ça sera plus facile pour eux que la Réunion qui est entièrement autonome.

    2. @Panama : non. La Corse a le système SACOI qui double le système SARCO (si si).

      SACOI c’est une liaison Sardaigne-Corse-Italie et SARCO la liaison Sardaigne-Corse.

      SACOI c’est du DC 200 kV pour 50 MW, SARCO c’est du AC 150 kV 100 MW.

      SACOI date de 1964 mais ne dessert réellement la Corse que depuis 1986. Cela permet à la Corse de ne pas être une île électrique 🙂

      En France Métropolitaine, Belle-Ile est alimentée par 3 câbles sous-marin et a des centrales fioul de secours (pour l’été principalement).
      Oléron, Ré, Aix, etc. toutes les îles importantes sont reliées au continent pour leur électricité 🙂

      Le souci se pose aux Antilles et à la Réunion principalement car il n’y a pas ces interconnexions à des sources différentiées.

      1. Thibaut, j’ai des souvenirs de la Corse en blackout total pendant plusieurs jours il y a une dizaine d’année. Mais le problème a peut-être été résolu depuis.

    3. Merci pour les précisions! Mais voir des iles sous des climats tropicaux cramer de l’énergie fossile alors que le potentiel solaire, eolien et biomasse est gigantesque, no comment…

      1. @Amiral_Sub : Rome ne s’est pas faite en un jour. EDF dans ces coins installe à tour de bras.
        Entre 2019 et 2022, la part du fossile à la Réunion a baissé de 5 points.

        Bcp de bâtiments ont été installés en auto-consommation. Mais là encore, ce n’est pas du « yaka faukon » ni un coup de baguette magique.

        Le plan prévoyait 2024 pour un 100% renouvelable ou presque…la pandémie est passée par là et a fait prendre environ 3 ans de retard à la PPE (programmation pluriannuelle de l’énergie).

        C’est un peu comme quand l’Etat a décidé de désenclaver la Bretagne de son insularité électrique….ce n’est pas en un claquement de doigts que l’on passe de « pas grand chose » produit sur place (1 TWh en 2005) à 7,5 TWh en 2022 🙂

        Nonobstant ce retard pris, solaire et éolien supposent que l’on double la production par du pilotable…ici ce sera du fioul ou du charbon qui resteront là « au cas où ». Pourquoi ? Car des fois y a pétole, ou couvert…et donc il faut pouvoir produire. C’est le paradoxe du renouvelable qui impose du pilotable et surtout un système de stockage (les barrages sont utilisés pour cela mais ce n’est pas illimité.

        Bref, la planification des consommations est la clé pour un bon développement. Sinon on arrive à surproduire et « gâcher » de l’électricité car on la produit au mauvais moment.

      2. Alors pour le potentiel solaire et éolien, il faut aussi penser aux cyclones… qui va tout arracher.
        Ce n’est pas pour rien si la grosse culture de l’Île c’est la canne qui résiste et se remets de tout. Ceux qui ont voulu diversifier… on arrêté.

      3. Biomasse il serait sans doute possible d’aller au delà de la classique (et à peu près aussi dégueulasse à cramer que la houille de nos voisins schpountz) mélasse. La cane qui se remets de tout assez vite et s’y récolte à l’année est plus jolie et sans doute plus efficace pour transformer l’énergie solaire que du PV. A voir le rendement en tenant compte des transformations nécessaires derrière pour en faire un vrai carburant comme l’éthanol. Suite à un gros cyclone, de telles centrales pourraient en prime fonctionner temporairement avec du fossile en dépannage de qq mois.

  1. Avec ces prises pilotées, est-il tout de même possible de forcer la charge pour recharger son véhicule ?

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