Nouveau scandale Volkswagen : évasion fiscale au Luxembourg

Volkswagen à l’origine d’un nouveau scandale. Déjà empêtré pour ne pas dire embourbé dans l’affaire du dieselgate, le constructeur ne semble pas en être à une malversation près …

Alors que les dirigeants de VW avaient juré les grands dieux n’avoir « jamais joué le jeu » de l’optimisation fiscale via l’intermédiaire de pays pour le moins accueillants … et peu regardants … il vient d’être pris la main dans le sac …

Le groupe allemand s’est ainsi alloué les généreux services de « logement » offerts par le  Luxembourg en vue d’y héberger la bagatelle de 5,8 milliards d’euros en trois ans. Le tout via la mise en place d’une structure lui permettant de ne payer que 1,7 million d’euros d’impôt. Au grand dam des finances publiques de l’Allemagne mais également de la France.

Pas de cela chez nous ! Un discours désormais mis à mal

Pourtant au printemps 2013, Hans Dieter Pötsch, alors directeur financier de Volkswagen, s’était voulu très clair. Interrogé alors sur les montages fiscaux luxembourgeois permettant aux multinationales d’échapper à l’impôt, il avait clamé haut et fort que son groupe ne mangeait pas de ce pain là. Ajoutant même que VW était soucieux de se comporter en bon citoyen.

Mais des documents consultés par Der Spiegel et les collaborations européennes en matière d’investigation (EIC) lequel incluent également Mediapart et le journal italien L’Espresso révèlent une réalité toute différente.

En 2012 déjà, et donc un an avant les déclarations de Potsch, les dirigeants de Volkswagen s’étaient déplacés au Luxembourg en vue d’y mettre en place une holding et un actif financier de trésorerie.

Puis, en 2014, la société allemande a transféré au Grand-Duché les points de contrôle d’une douzaine de succursales à travers le monde, soit au total une douzaine de sociétés sous l’égide d’une autre holding néerlandaise.

Des impôts grandement allégés …

Si le groupe Volkswagen affirme fièrement avoir payé plus de 3 milliards de dollars d’impots en 2016, l’addition aurait pu – et même aurait dû – être nettement plus salée au regard des documents examinés par le consortium EIC. L’année dernière, la société aura ainsi réussi à réduire ses taxes en profitant des généreuses règles fiscales luxembourgeoises.

Une entreprise partiellement publique, détenue à 20 % par un gouvernement régional (la région de Basse-Saxe) aura donc mis en place une structure à l’étranger en vue de réduire sa pression fiscale…

VFL : holding financière au Luxembourg

Selon l’enquête, le constructeur allemand a créé une holding financière au Luxembourg en 2012, laquelle a reçu 5,8 milliards d’euros au cours des trois dernières années.

Mediapart affirme même que cette structure a enregistré 3 milliards de dollars pour la seule année 2016 … le tout sans verser un seul centime d’impôt.

Or, l’ancien directeur financier du groupe, aujourd’hui président du conseil de surveillance, Hans Dieter Pötsch aurait donné son aval à ce montage financier …

Peu regardant, le groupe allemand assume même ces pratiques : « la mise en place de sociétés de holding et de financement dans un environnement réglementaire attractif obéit à des motivations principalement financières et stratégiques » a-t-il ainsi déclaré.

L’affaire débute en 2012, lorsque Volkswagen crée deux sociétés luxembourgeoises pour y rassembler ses actifs. L’une d’entre elles, Volkswagen Finance Luxemburg (VFL), a accueilli à partir de 2014 la majorité des actifs non allemands de Volkswagen, soit 26 sociétés, dont une quinzaine de filiales nationales (France, Japon, Australie, Pologne, Japon, Irlande notamment).

La société luxembourgeoise VFL possède aujourd’hui 14,8 milliards d’euros d’actifs … mais ne compte que cinq salariés. Les dividendes versés par les filiales nationales chargées de la commercialisation des véhicules sont transférés chez VFL au Luxembourg … où ils ne sont pas imposés, ajoute par ailleurs Mediapart. Même chose pour les flux de trésorerie de marques propriétaires telles que Skoda, Seat et Bentley.

Au total entre 2014 et 2016 les filiales de Volkswagen dans le monde ont transféré au Luxembourg environ 5,8 milliards d’euros, somme qui a fini en grande partie dans les coffres du VFL sous forme de dividendes.

Selon le Spiegel, VFL a sur cette période déclaré des profits de 3.5 milliards d’euros … mais n’a payé que 1.7 million euros en taxes, le taux d’imposition n’étant que de 0.05 % ….

Quant aux profits de filiales telles que Skoda et Seat, s’ils avaient été transférés à une holding basée en Allemagne, VW aurait été contraint de payer une taxe additionnelle de 5 %.

Volkswagen se défend de pratiques illégales

VW a assuré à EIC que l’imposition des entreprises luxembourgeoises repose sur « des dispositions légales », ajoutant que « toute autre chose serait inadmissible ». Le groupe automobile pourrait ainsi bénéficier de ce qu’on appelle une « décision fiscale », une interprétation de la taxation par les autorités locales. Volkswagen n’a pas nié cette option.

Un porte-parole de VW a par ailleurs déclaré que les dividendes avaient déjà été imposés dans leur pays d’origine. Arguant en conséquence, qu’ils ne pouvaient donc plus être taxés comme des revenus de la holding luxembourgeoise.

Dans les faits, l’argent versé au Luxembourg a été utilisé en partie pour financer, sous forme de prêts, un grand nombre de filiales internationales de Volkswagen.

Pour assurer ce financement : d’autres entreprises luxembourgeoises ou néerlandaises … à leur tour contrôlées par VFL. Et au final, le produit de ces transactions internes au groupe est collecté au Luxembourg. Libre d’impôt.

Mieux encore ! les filiales internationales de VW en France, en Suède et au Portugal paient des intérêts sur ces prêts, intérêts comptabilisés comme des charges dans leur compte de résultat …. ce qui permet d’alléger leurs impôts, en réduisant leurs bénéfices.

Sources : Der Spiegel, Mediapart, Espresso, LeSoir.be, El Mundo

Photo : VW

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