« Nous sommes tous Carlos Ghosn » affiche le Liban

Reprenant les termes du slogan « nous sommes tous Charlie »,  né quelques heures après l’attentat perpétré dans les bureaux de Charlie Hebdo  à Paris le 7 janvier 2015, une campagne en faveur du dirigeant incarcéré au Japon pour des soupçons de malversations financières vient de voir le jour au Liban, pays d’origine de Carlos Ghosn.

Plusieurs panneaux d’affichage sont en effet apparus jeudi sur dans les rues de Beyrouth clamant : « Nous sommes tous Carlos Ghosn ». Une société – privée – libanaise  spécialisée dans les campagnes  publicitaires souhaite ainsi soutenir – voire défendre ? – le dirigeant détenu dans des conditions que certains jugent on ne peut plus spartiates. Mais si l’on a faim ou mal au dos …. cela prouve au moins que l’on est vivant … ce que ne sont plus nombre de journalistes de Charlie Hebdo. La comparaison entre Carlos Ghosn et eux semble pour le moins disproportionnée voire même déplacée …

Campagne contre l’injustice et la présomption d’innocence

« C’est une campagne contre l’injustice », explique Dany Kamal, l’un des associés de la société Med K & K, tout en mettant l’accent sur la présomption d’innocence. Principe qui prévaut en France mais pas au Japon, où l’accusé étant présumé coupable, c’est donc à lui qu’incombe la charge de la preuve. Ce qui signifie en clair que c’est à lui au fond de sa prison  – et ses avocats  – de prouver son innocence.

Pour rappel, Carlos Ghosn est en garde à vue depuis le 19 novembre dernier pour avoir, selon Tokyo, dissimulé aux autorités boursières environ 38 millions d’euros de revenus sur cinq années.

Stupeur, émotion et soutien au Liban

Son interpellation à Tokyo a provoqué la stupeur parmi ses amitiés et connaissances libanaises ainsi que dans les milieux officiels, qui insistent sur son innocence. Sur les réseaux sociaux, des photos avec la mention « Innocent » se sont multipliées lors de son arrestation.

Certains libanais ont toutefois stigmatisé une vague émotive de solidarité en dépit d’accusations « graves ».

Carlos Ghosn se rendait régulièrement au Liban, investissant ces dernières années dans la viticulture et le secteur bancaire. Ceci pouvant expliquer cela …

Le 27 novembre dernier, le ministre libanais des Affaires étrangères, Gebran Bassil, a convoqué l’ambassadeur du Japon à Beyrouth, Matahiro Yamaguchi, pour lui faire part de « points d’interrogations qui entourent les circonstances de l’arrestation de M. Ghosn et les conditions de détention ».

« Le phénix libanais ne sera pas brûlé par le soleil du Japon », a assuré de son côté le ministre de l’Intérieur, Nohad Machnouk.

Ghosn, un franco-libanais-brésilien

D’origine libanaise, le grand-père paternel de Carlos Ghosn,  émigre au Brésil à l’âge de 13 ans avec ses parents. Son fils  épouse une femme  d’origine libanaise et s’installe à Porto Velho, ville où Carlos Ghosn voit le jour en 1954.

La famille quitte ensuite le Brésil pour le Liban, le jeune Carlos, alors âgé de 6 ans étant confronté à des problèmes de santé. À l’âge de 16 ans, il arrive en France où il poursuit de brillantes études. Ce qui en fait de lui un franco-libanais-brésilien.

En 1996, à 42 ans, Carlos Ghosn rejoint Renault,  l’année de la privatisation. Le PDG de l’époque, Louis Schweitzer, avait décelé en lui un successeur potentiel. Ce dernier, qui avait dirigé le cabinet de Laurent Fabius à Matignon de 1984 à 1986 avant de faire carrière chez Renault,  lui conseilla de demander la nationalité française pour éviter toute polémique. Ce que fit Ghosn sans se faire prier.

Sources : AFP, vanity Fair, Wikipedia

(12 commentaires)

  1. Oui avec la Syrie qui s’enflamme à côté… mettre une affiche d’un libanais qui a réussi ce n’est pas symptomatique d’une élite libanaise « cosmopolite » déconnectée d’une population qui tente de survivre au pays du Cèdre? Anachronique mais bon ce n’est qu’un avis d’un lecteur de ce blog.

    1. sauf qu’à mon avis, il faut mieux vivre au Liban que dans ladite Syrie voisine, même pour ledit peuple dont tu parles

      1. et le 1er ministre, Saad Hariri va toujours bien ? Il a pas été capturé une 2eme fois par l’Arabie Saoudite ?
        Il est tjs vivant ? ou bien MBS l’a liquidé ?

      2. @shooby. Le Liban a évité de peu la liste noire des paradis fiscaux de la part l’OCDE. Alors nous avons un ancien PDG en garde à vue qui après ses démêlés avec la justice … va devoir trouver une porte de sortie … Le Liban lui tend les bras … pas la France, ni le Brésil. Donc c’est un moyen comme un autre d’attraper un gros poison qui pourra participer au redressement de l’économie libanaise … Pas bête comme démarche. En France depuis 3 semaines on veut brûler du riche et au Brésil les extrêmes sont au pouvoir… Finalement le Liban comme porte de sortie, c’est une bonne option!

        1. oui mais voilà, les démêlés de Ghosn avec la Justice japonaise n’ont-ils pas été inventés par Nissan pour se débarrasser de Ghosn ?

          Pour le reste, entre une Syrie en ruine du fait de la guerre et un Liban certes à la limite avec l’OCDE mais où c’est relativement paisible, si tu continue à penser que la situation en Syrie est meilleure …

          1. @shooby. Alors pour une élite libanaise cosmopolisée ça va … après pour la population le quotidien ce n’est pas cela … pour un pays otage des conflits de ses voisins … c’est ce décalage qui est frappant! Ce soutien à un riche pdg alors que la population n’as pas de sous!

    1. Il doit représenter une certaine fierté pour certains. La réussite, une forme de pugnacité quelques soit les épreuves. On ne peut pas lui enlever ça non plus.

  2. Pourquoi faire directement le lien avec « Charlie »? Des détenus politiques ou des victimes de procès iniques, opaques et arbitraires peuvent bien être soutenus également. Là ils mettent le doigt là où ça fait mal aux japonais mais qui a commencé? C’est vrai que certaines « valeurs traditionnelles » japonaises comme la pêche à la baleine ou le non respect de la présomption d’innocence sont loin d’être des valeurs universelles. De plus le côté théâtral, longuement préparé et opportuniste de la démarche ne passe pas inaperçu. On se demande quel message font passer les japonais et quelles sont leur intentions au final?

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *