Michel Meunier nous a quitté

Avec Eugène Martin et Henry Dangel, la France vient de perdre un troisième bricoleur de génie: Michel Meunier, mort à l’age de 68 ans.

Il restera dans l’histoire du sport auto français comme le « M » de WM, avec Gérard Welter. C’est l’histoire (qui se conjugue au présent gràce à WR) de passionnés animés par un rêve fou: construire une voiture pour rouler au Mans. Pas le championnat entier, juste les 24 heures du Mans.

Tout commence au centre de design Peugeot de La Garenne-Colombes, à la fin des années 60. Comme Paul Bracq ou Gerard Godefroy, Meunier et Welter étaient capables de dessiner des Peugeot la semaine et de belles voitures le week-end.

Meunier et Welter rêvent des 24 heures du Mans. Ils fondent WM, à Thorigny. Une P69 est construite en 1969, autour d’une 204 cabriolet, dont le moteur est poussé à 110ch gràce à l’injection. La style est pataud, mais elle atteint 210km/h.

Ils récidivent l’année suivante avec une voiture logiquement baptisée P70: châssis de 204, mais moteur de 304 (à l’arrière) et phares de 504 coupé. Elle ne courra pas au Mans. Au début, l’équipe d’une demi-douzaine de bénévoles (essentielement des employés de Peugeot) écumeront les circuits et les rallyes de l’hexagone.

En 1976, l’ACO crée la catégorie GTP. WM s’engouffre dans la brèche avec la P76. Comme d’habitude, ils piochent largement dans la banque d’organe de PSA: moteur V6 PRV, pare-brise et feux arrières de CX… Derrière le volant, on trouve Gerard Larrousse et Michel Meunier. Hélas, elle abandonne.

Mais le plie est pris et WM ne manquera jamais les 24 heures. En 1977, le V6 de la P77, plus lourde, donne 400ch; s’en est trop pour les freins. En 1978, WM effectue le meilleure chrono de GTP aux essais, mais là encore, c’est l’abandon. En 1979, il y aura trois P79, très fines après un passage en soufflerie et munie de deux turbos. Raulet et Max Mamers (l’actuel organisateur du trophée Andros) terminent 14e et seuls rescapés du GTP (donc vainqueur de la catégorie.)

En 1980, soutenu par Peugeot et Esso, la P79 de Guy Fréquelin (davantage connu pour ses performances en rallye) et Roger Dorchy sont 4e au général.

En 1981, l’ACO autorise les groupe C (qui rouleront l’année suivante en championnat du monde.) WM aligne quatre voitures: deux P80 de GTP et deux P81 de groupe C. Mais seul l’une des P80 sera là le dimanche à 16h. Pire, avec la P81, Thierry Boutsen sort dans les Hunaudières, fauchant un commissaires.

Certes, 1982 sera synonyme de double abandon, tandis qu’en 1983, Dorchy, Alain Couderc et l’ami Pascal Fabre amèneront l’unique P83 rescapée à la 16e place. Mais c’est surtout l’époque où Welter-Meunier, Yves Courage, Jean Rondeau, Louis Descarte ou Alain De Cadenet sont autant de petits artisans tricolores, concurrents réguliers du Mans, capable d’y amener une voiture sur le podium.

En 1984, WM (soutenu par Alain Giresse) retrouve le sourire: à bord de la P83B Dorchy est en tête lors du premier passage! Il récidive deux tours plus tard. Hélas, il devra renoncer, trahis par ses freins.

En 1985, une vieille P83B est 17e avec… Jean Rondeau à son volant. L’année suivante, l’unique P86 renonce. En 1987, WM rêve de dépasser les 400km/h. La P87 réussit l’exploit sur une autoroute en construction. L’Auto-Journal et le JT de 20 heures (autres temps, autres moeurs) en parleront. Mais sur les Hunaudières, le Mesta de la gendarmerie ne relève « que » 387km/h.

En 1988, Dorchy, sur la très fine P88, signée Heuliez, réalise l’exploit le samedi à 21h: 405km/h. En fait, il roula à 407km/h, mais comme Peugot lançait la 405… Mais le moteur, fatigué, rendra l’âme peu après.

Peugeot n’est pas resté insensible aux performances des voitures qu’elle motorise. Ainsi, en 1986, elle présenta le prototype Proxima (en fait, une maquette non-roulante) destinée à capitaliser sur l’image des WM (dont elle reprend la mécanique.) Et son auteur n’est autre que Gerard Welter!

Néanmoins, c’est le début de la fin de WM. En 1989, les deux P89 sont victimes d’incendies aux essais. En utilisant les deux épaves, ils construisent une unique P89, qui sera présente au Mans… Mais qui abandonnera à la 20e heure sur incendie.

1989 sera la dernière apparition des WM. Encore un abandon. Meunier prend du recule. Certains évoquent des pressions de Jean Todt (alors responsable de Peugeot-Talbot Sport) ou de Jean-Pierre Nicolas: Peugeot débarque en endurance avec la 905, alors exit WM. En 1993, Welter réactive la structure, sous le nom de WR (Welter Racing), sans Meunier.

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