La Fiat 500 souffle ses soixante bougies

L’année 1957 fut riche en événements dans le monde ; outre la signature, le 25 mars 1957 du traité de Rome instituant la CEE, Franquin crée le célèbre personnage Gaston Lagaffe (m’enfin?), et l’URSS de son côté lance en fin d’année Spoutnik 1, premier satellite spatial à être mis en orbite. Et sur la planète automobile Fiat présente au début de l’été à Turin un nouveau petit véhicule : la Fiat nuova 500. Pourquoi nuova ? Tout simplement parce que le numéro a déjà été utilisé au sein de la marque, désignant la première 500 produite entre 1936 et 1955, plus connue sous le diminutif de topolino (petite souris).

Oeuvre de l’ingegnere Dante Giacosa, la nouvelle 500 répond à un cahier des charges précis : le nouveau modèle, d’une longueur inférieure à trois mètres, doit pouvoir emmener quatre personnes et leurs bagages, représentant ainsi une alternative sur quatre roues crédible face aux scooters majoritairement utilisés par les italiens à l’époque. Si Giacosa est déjà responsable entre autres de la topolino, ou dans un autre genre du sculptural coupé 8V au sein de Fiat (et accessoirement courtisé par Enzo Ferrari…), c’est avec la nuova 500 qu’il va faire preuve de son génie, en réalisant une voiture aussi simple de conception qu’économique (à produire et à utiliser) et facile à entretenir.

Initialement prévue pour être une 2+2, la 500 sera finalement bien une quatre places. Pour faire des économies sur la quantité d’acier utilisée pour la carrosserie, une capote en toile qui s’étend de la baie de pare-brise aux grilles d’aération du moteur est installée. Et question motorisation, c’est un bicylindre de 479 cc développant 13 chevaux qui est installée en position arrière, permettant ainsi de gagner un peu de place dans l’habitacle.

Pour autant, le succès est loin d’être immédiat ; à sa sortie, les italiens la boudent notamment parce qu’elle ne se différencie pas suffisamment de sa grande sœur 600, qui permet elle aussi de convoyer quatre personnes mais est équipée d’un moteur à quatre cylindres. De même, la première version souffre de multiples problèmes de finition : les vitres avant sont fixes, et les petits déflecteurs une fois en position d’aérer les occupants bloquent le maniement du volant… De même les vis apparentes, défauts de soudures et l’absence de chromes ne plaident pas en la faveur de la nouvelle venue. Enfin, la faible puissance du moteur est également critiquée.

Tout ceci pousse Fiat, dès novembre 1957, à porter la puissance du moteur à 15 chevaux via l’amélioration de l’arbre à cames et du carburateur, et à proposer une nouvelle déclinaison de la 500, la normale, par opposition à la première mouture qui continue quant à elle sa carrière en version rebaptisée economica. Si la normale est proposée au même prix que le tout premier modèle, l’economica quant à elle est proposée moins cher ; aussi, pour calmer l’ire des acheteurs initiaux, Fiat propose non seulement et gracieusement le montage du moteur amélioré, mais rembourse également à ses premiers clients la différence entre le prix payé au lancement et celui de la version economica.

En 1958 apparaît la version Sport, dont le moteur bénéficie d’une augmentation de cylindrée, qui passe à 499,5 cc. En outre, grâce au montage d’un carburateur Weber 26 IMB2 et à l’adoption d’un nouveau dessin pour l’arbre à cames, la puissance ‘bondit’ à 21 chevaux. Disponible tant en découvrable qu’avec un toit fermé, cette version peut également être équipée d’un toit fixe nervuré.

L’année suivante, la version tetto appribile (toit ouvrant) fait ses débuts aux côtés de la découvrable. Cette version, la plus connue dans la lignée des 500, est dotée d’une vraie lunette arrière fixe. De plus, intérieurement les passagers arrière bénéficient enfin d’une vraie banquette, alors que jusqu’ici ils devaient se contenter d’une simple planche… Gare aux hémorroïdes!

Apparue en 1960, la 500 D bénéficie de l’augmentation de cylindrée élaborée pour la Sport, mais avec une puissance revue à 17,5 chevaux. Cette même année apparaît la déclinaison giardiniera (jardinière), au châssis allongé et au moteur positionné à 90 degrés pour conserver un seuil de chargement correct.

A noter qu’il s’agit là de la seule déclinaison de la 500 à conserver durant toute sa carrière ses fameuses portes suicides. Pour la version ‘normale’, celle-ci adoptera des ouvertures plus conventionnelles en 1965, avec le remplacement de la 500 D par la 500 F. Cette nouvelle version gagne aussi un demi-cheval de puissance supplémentaire, et hormis ses portières, ne se distingue que difficilement de la D.

C’est au cours des sixties que la nuova 500 va connaître le succès, en devenant la voiture la plus vendue d’Italie. On voit également fleurir ça et là nombre de déclinaisons tantôt sportives (Abarth, Giannini), mais également luxueuses et/ou personnalisables (Ghia, Vignale, Lombardi, Moretti). En 1968, Fiat lance la 500 L (pour lusso), reconnaissable à ses protections chromées de pare-chocs, son logo de calandre spécifique, son volant à deux branches, sa sellerie dite cannelloni et son bloc d’instrumentation rectangulaire, issu de la Fiat 850.

Si en France la 500 a été commercialisée jusqu’en 1972, date de présentation de sa remplaçante la Fiat 126, une ultime déclinaison a été introduite la même année, mais cantonnée au marché italien. Il s’agit de la R (pour rinnovata), qui bénéficie d’une nouvelle augmentation de cylindrée à 594 cc, mais délaisse les ornements et les fioritures des précédentes versions pour ne pas faire d’ombre à la nouvelle 126. Du basique, rien que du basique, en guise de chant du cygne…

Au total, 3 800 000 exemplaires de la Fiat 500, toutes versions confondues, auront été produits entre juillet 1957 et août 1975. Reine des villes avec ses 2,97 mètres de long et 1,32 de large, elle conserve aujourd’hui encore de par sa bouille irrésistible un incroyable capital sympathie. Pour s’en convaincre, il suffit de se promener avec en ville, toit ouvert et coude à la portière : même la sportive la plus exclusive ne suscitera pas autant de pouces levés et de sourires sur son passage!

Pour les plus jeunes cinéphiles, la 500 incarne Luigi le vendeur de pneus fan de Ferrari dans la série de films Cars, tandis que leurs aînés songeront au 1,88 mètre de l’acteur Jean Reno, engoncé dans une Fiat à la carrosserie très mal en point dans Le Grand Bleu.

Grâce à son histoire, à sa conception aussi minimaliste que géniale, et à son dessin qui aura marqué des générations d’automobilistes, pas étonnant que la petite grande voiture ait fait récemment son entrée au fameux MoMa, le musée d’art moderne new-yorkais. Pas étonnant non plus qu’à l’instar de la Mini, le constructeur turinois ait revisité non sans succès ce modèle-phare il y a maintenant dix ans…

Illustrations : Fiat

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