Histoires parallèles: Amédée Gordini et Carlo Abarth

1. Origines

Amedeo Gordini est né en 1899, près de Bologne. Issu d’une famille pauvre, il se retrouve orphelin et doit arrêter l’école à l’age de 11 ans. La région étant riche en atelier de mécaniques, le voila donc mécanicien. La légende nous dit qu’en 1907, le petit Amedeo avait assisté au Tour d’Emilie, une compétition automobile et se fut une révélation. Il fait la guerre comme soldat d’infanterie. En 1925, il part à Paris. Lui qui n’a pas eu d’enfance, découvre les nuits Parisiennes et les femmes… Amedeo s’y installe définitivement, se marie et se fait naturaliser sous le nom de « Amédée ».

Karl Abarth nait à Vienne en 1905. Il fait un apprentissage chez Castagna, à Milan, mais ce sont les deux-roues que Karl préfère. A la fin des années 20, il s’aligne en compétition moto avec des cadres qu’il a lui-même conçu. Puis en 1934, il se met au side-car où il est imbattable.

2. L’éclosion

Dés le début des années 20, Amédée courrait sur des Fiat qu’il préparait lui-même. Lorsqu’il décide d’émigrer, il va naturellement continuer la compétition et son nom est souvent en haut des feuilles de classement. Le QG de Gordini est à Suresnes. Or, en 1934, Henri Théodore Pigozzi, Italien, comme lui, s’installe à Poissy (à quelques kilomètres de Suresnes) pour produire des Fiat sous le nom de Simca. Entre Pigozzi et Gordini, le courant passe très vite et dés 1937, l’équipe Gordini représente Simca en compétition. La guerre n’interrompt pas l’association et dés 1945, Gordini reprend du service (en revanche Amédée a arrêté de piloter.) Amédée est un as de la mécanique (d’où son surnom de sorcier): par exemple, le modeste 1100 32ch de la Simca 8 développe 65ch une fois passé entre ses mains. En F2, les Gordini trustent les podiums et elles permettent à des pilotes comme Fangio ou Trintignant de se faire connaitre.

Karl Abarth épouse une certaine Maria, secrétaire particulière d’Anton Piech (gendre de Ferdinand Porsche et père de Ferdinand Piech.) Dés lors, Karl sera un proche de la famille Porsche. Mais comme il est Juif, il doit fuir Vienne et part en Yougoslavie. On dit qu’il était le mécanicien attitré de Tito (qui fut mécano de Porsche!) et de ses Partisans durant la guerre. Ensuite, il épouse une Italienne, décide de devenir Italien et de changer son nom en « Carlo ». En 1946, à Turin, Piero Dusio, responsable de Cisitalia, cherche quelqu’un pour lui concevoir une F1. Abarth l’aiguille vers Porsche (qui cherche justement de quoi occuper son bureau d’étude) et au passage, il se retrouve team-manager de Cisitalia.

3. Indépendants

En 1951, sans complexe, Gordini (jusqu’ici présent en F2) veut défier Alfa-Romeo ou Ferrari en F1. Avec Simca, c’est le divorce (raison officielle: il n’y a pas de moteur pouvant servir pour la F1 chez Simca.) Gordini emménage dans ses fameux ateliers du boulevard Victor, à Paris. Sans aucun soutien, le constructeur vivote, courant à droite et à gauche ou vendant des volants à des gentleman-drivers pour remplir les caisses. Amédée n’hésite pas à fouiller dans les poubelles de Simca pour chercher des pièces! Mais aussi bien en Sport qu’en F1, les Gordini ont du mal à suivre le train des Ferrari et des Mercedes. Pas de résultats, donc pas de primes d’arrivées, donc pas d’argent, donc pas de moyens pour développer les voitures, donc pas de résultats, etc. Trop c’est trop, en 1957, Gordini accepte l’offre de Renault de travailler pour eux.

En 1949, Cisitalia fait faillite. Sur ses ruines, Carlo Abarth fonde Abarth, qui prépare des voitures de compétition, sur base Fiat, Alfa Romeo, Simca ou Porsche. Son emblème sera le scorpion, son signe zodiacal. En parallèle, il rencontre Giovanni Savonuzzi. Ce dernier est impressionné par les silencieux de pistolets et il veut transférer cette technologie vers les échappements. Cela donnera les fameuses « Marmita Abarth » pour motos et voitures; du tuning avant l’heure! Dans les années 50, il y avait quantité de préparateurs Italiens de voitures de compétition (Nardi, Osca, Siata…). Mais Abarth sait promouvoir ses victoires et dans les années 60, il n’y a plus qu’Abarth. Invincible en course de cote, Abarth louche sur le Sport et la F1. Mais Enzo Ferrari instrumentalise la FIA pour mettre des bâtons dans les roues à ce concurrent potentiel.

4. Dépendants

Au salon de Paris 1957, Renault présente la Dauphine Gordini: avec sa culasse à soupapes inclinées, le 845cm3 passe de 30 à 35ch. Mais les grands débuts auront lieu en 1964, avec la R8 Gordini. Le magazine Moteurs pousse Renault à lancer une coupe monotype. Ce sera la fameuse Coupe R8 Gordini et ses jours « G », à partir de 1966. En parallèle, Gordini est le préparateur attitré d’Alpine. Renault réfléchira un temps à un coupé ARG (Alpine-Renault-Gordini), hélas, il n’a jamais vu le jour.

En 1971, Carlo Abarth décide de prendre du recul et vend son entreprise à Fiat. C’est un mouvement logique vu que dés la fin des années 50, Abarth a proposé des dérivés sportifs de Fiat 500 et 600. Abarth devient le département compétition de Fiat. Le premier programme concerne le rallye avec une… Fiat 124 cabriolet! Il y eu également des voitures de séries comme l’Autobianchi A112 Abarth (qui eu plus tard droit à une coupe monotype en rallye grâce à André Chardonnet.)

5. La chute

En 1971, Renault rachète la marque Gordini. La même année, la R12 Gordini remplace la R8 Gordini tant sur la route que sur la piste. Trahison, c’est une traction! Il y eu également une R17 Gordini. Les activités d’Alpine et Gordini sont regroupées à Viry-Chatillon et en 1976, le site prend l’enseigne de « Renault Sport ». En 1979, Amédée Gordini s’éteint alors que le badge Gordini a disparu, sauf en Grande-Bretagne où la R5 Alpine est rebaptisée « R5 Gordini » (Sunbeam, puis PSA, y détiennent les droits du nom « Alpine ».)

Carlo Abarth meurt en 1979 (la même année qu’Amédée Gordini!) Dans les années 80, Fiat décide ne plus utiliser le nom d’Abarth pour ses modèles de série. En course, il disparaitra des culasses avec la fin de la Lancia Delta. Curieusement, Fiat reviendra très vite sur sa décision. Mais le kit Abarth pour Fiat Cinquecento ou la Fiat Stilo Abarth n’ont pas laissés de souvenirs indélébiles (et surement pas de bons souvenirs.) Du coup, c’est avec la Grande Punto Abarth et surtout la Fiat 500 Abarth, que Fiat prétend avoir ressuscité Abarth, lui donnant au passage un atelier.

Ah, si seulement Renault pouvait faire de même avec Gordini…

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