Histoire de logos, épisode 5 : Ferrari

L’héritage d’un as

L’histoire du logo Ferrari prend racine dans l’épopée de l’aviateur italien Francesco Baracca, considéré comme le meilleur as de l’armée de l’air italienne durant la Première Guerre Mondiale. Fils d’un important propriétaire terrien et de la comptesse Paolina, Baracca entre dans la carrière des armes. A l’issue de sa formation à l’Académie militaire de Modène, il sert, de 1909 à 1912, dans le 2ème régiment de cavalerie Piemonte Reale, dont le blason, sur l’une des quatre parties, arbore un cheval argenté cabré sur fond rouge.

En 1912, Baracca passe à l’aviation, sa véritable passion, et participe à la première guerre mondiale à partir de 1915 dans la chasse italienne. Il est considéré comme le premier aviateur italien à remporter une victoire au combat et, jusqu’en 1918, cumule 34 victoires officielles. Sur son avion, Baracca fait peindre sur le côté gauche un cheval noir cabré, qui semble être un hommage au régiment de cavalerie auquel il a appartenu à ses débuts, même si certaines hypothèses affirmèrent que le cheval en question aurait été en fait celui de la ville de Stuttgart, en vertu d’une tradition selon laquelle les aviateurs prenaient comme symbole celui du 5ème avion ennemi abattu, qui aurait été en l’occurence un avion allemand issu de cette zone militaire. Toutefois, la thèse de l’hommage au régiment de cavalerie est bien plus probable.

Un autre mystère concerne la couleur d’origine du cheval. Certaines hypothèses affirment que la couleur originelle du cheval était le rouge, tiré par inversion du blason du 2e régiment de cavalerie « Piemonte Reale » , et que la couleur noire a été adoptée comme signe de deuil après la mort de Baracca par ses camarades d’escadron qui ont renoncé à leurs insignes personnels. Rien ne permet de le prouver, contrairement à l’attachement de Baracca pour son régiment d’origine. Cet insigne perdure encore aujourd’hui dans l’Aeronautica Militare, notamment au sein du 10ème Groupe de Chasse.

A l’occasion du 1000e Grand Prix de l’écurie Ferrari en Formule 1 au Mugello en 2020, une formation de chasse Eurofighter arborant le Cheval cabré sur le fuselage, a effectué un vol de démonstration.

Le hasard d’une rencontre

Le 17 juin 1923 se tient le Grand Prix de Savio, en Emilie-Romagne, près de Ravenne. Les parents de Francesco Barraca assistent à la course et rencontrent le vainqueur du jour. Il s’agir d’un certain Enzo Ferrari, qui était au volant d’une Alfa Romeo. Les Baracca retrouvent dans ce jeune pilote talentueux la bravoure de leur regretté fils. Un jour, lors d’une énième rencontre rapportée par Enzo Ferrari lui-même, la comtesse lui aurait dit : « Monsieur Ferrari, pourquoi ne mettez-vous pas le Cheval cabré de mon fils sur vos voitures ? Cela vous portera chance ».

Il faut attendre néanmoins quelques années. Après avoir raccroché son casque, Enzo Ferrari devient manager et fonde en 1929 sa propre écurie, la Scuderia Ferrari, qui doit engager des voitures Alfa Romeo. Ce n’est cependant qu’en 1932 que le fameux blason fait son apparition, en juillet, à l’occasion des 24 Heures de Spa-Francorchamps, un grand classique des courses d’endurance programmé sur ce circuit difficile, construit sur les routes reliant certains villages des Ardennes, en Belgique.

Ce cheval cabré noir porta chance à Ferrari : la 8C 2300 MM de la Scuderia domina la compétition. Antonio Brivio et Eugenio Siena remportèrent la course, précédant sur la ligne d’arrivée leurs équipiers Piero Taruffi et Guido d’Ippolito. En 1938, Alfa Corse absorbe la Scuderia. Frustré de sa perte d’indépendance et en conflit avec plusieurs ingénieurs, Ferrari quitte l’entité mais n’a pas le droit, pendant 4 ans, d’utiliser et de produire à son nom des voitures de course. Il fonde alors Auto Avio Costruzioni, puis la guerre vient tout chambouler.

Les évolutions d’après-guerre

En 1945, Ferrari fait redessiner un nouveau cheval cabré par Eligio Gerosa, un jeune graveur milanais et ce dernier récidive en 1947 pour le blason de l’écurie de course. C’est en effet cette année là que Ferrari peut enfin lancer sa propre marque, avec son premier modèle, la 125S. Le cheval cabré fait son retour, toujours noir mais plus élancé et avec une queue redessinée (vers le haut, contrairement à la queue du cheval de Baracca), une posture cabrée inclinée à 58°, le tout inséré dans un écusson dominé en son sommet par un liseré du drapeau italien et un fond entièrement jaune, qui évoque évidemment les couleurs emblématiques de sa ville natale, Modène.

Les lettres S et F signifient Scuderia Ferrari pour les modèles de course. Le Scudetto en forme de bouclier est l’apanage des voitures préprées par la Scuderia, mais à côté de l’écusson apparait aussi un logo rectangulaire vertical, qui trône fièrement sur la proue. Pour l’anecdote, le cheval cabré apparaît aussi jusque dans les années 60 sur le carénage des Ducati de course, en lien avec le designer en chef de la marque motocycliste, Fabio Taglioni, qui était également originaire de Modène.

À compter de 1960/61, l’abréviation SF est complétée par le fameux « Ferrari » et sa police spécifique, dont la première lettre, le F, où la barre horizontale supérieure s’étire jusqu’au derier « r », ne laissant que la lettre finale « i » sans surplombage. Les voitures de compétition vont prendre pour usage d’avoir le logo rectangulaire sur le museau, tandis que le blason Scudetto est positionné sur les flancs. Pour les modèles de série, alors que les modèles de grand tourisme ont tendance à n’arborer que le logo rectangulaire, les berlinettes sportives et supercars, comme la 308 ou la F40, reprennent à la fois le logo recantgulaire avant et le blason latéral, comme pour les modèles de compétition, afin de souligner les passerelles technologiques toujours plus fortes entre les Ferrari de course et celles de route.

Enfin, en 2002, le rectangle s’est légèrement élargi et la séparation noire nette entre les trois bandes du liseré tricolore italien s’est estompée, mais le logo conserve les mêmes caractéristiques immuables, reconnaissables au premier coup d’oeil.

Sources : Ferrari

(17 commentaires)

    1. Le rouges des voitures de courses vient de la couleur nationale de chaque pays.
      Pour le UK c’était le vert, le bleu pour la FR, le blanc pour l’Allemagne, le rouge pour l’Italie et le jaune pour la Belgique.

      C’est pour cela que les Alfa Romeo, Maserati ou Ferrari de course étaient toutes rouges. Ferrari a conservé cette tradition pour les F1, les barquettes, et les GTE.
      Malgré tout, le jaune de Modène était l’une des couleurs favorite de Enzo Ferrari.
      En gros, 45 à 50% des Ferrari de route sont rouges, derrière, on trouve du gris, de l’argenté, du bleu. Le jaune et le noir sont les parents pauvres avec en gros 7% de Ferrari noires ou jaunes.
      Les couleurs plus « exotiques » comme vert, blanc, etc sont quasiment absentes.

        1. @Zafira500 : non c’était le blanc. En 1934, la légende veut que les Mercedes se présentent pour le GP de l’AVUS avec un peu trop de poids. Les mécanos auraient gratté la peinture d’où après l’argenté.

          Ne pas oublier qu’à l’époque, c’était des peintures opaques toutes « bébêtes » 😉 pas de métallisé.

    2.  » rouges des voitures de courses vient de la couleur nationale de chaque pays »: merci car je m’étais souvent posé la question

      1. Quant aux voitures blanches pour l’Allemagne, la légende veut que les Mercedes arrivent au GP de l’Avus en 1934 un peu trop lourdes par rapport au 750 kg max réglementaires.
        Les techcs/mécanos auraient alors gratté la peinture blanche pour alléger les voitures, laissant la carrosserie à nu, argenté.
        Et hop les flèches d’argent…

        Japon = blanc avec rond rouge (Honda conserve la tradition…enfin quand ils sont constructeurs en F1)
        USA = bleu avec bandes blanches longitudinales, ou blanc avec bandes bleues.
        Le souci c’est que souvent les différents pays se retrouvent avec les mêmes couleurs (genre la Grève, la France, l’Inde, etc en bleu 🙂 ).

  1. Par contre il y a une erreur sur la voiture du Portugal. Elle devrait avoir le châssis blanc.
    La Suisse aussi c’est rouge, mais avec capot blanc (bien respecté ici).
    Le Chili c’est rouge, avec capot bleu ciel.
    L’Espagne c’est rouge, avec capot jaune.

    Tiens la Pologne aussi a une erreur, normalement ce sont les couleurs allemandes (blanc) mais avec châssis rouge 🙂

  2. Il a pas eu besoin de chance pour sa victoire à Spa-Francorchamps avec l’Alfa 8C, c’était la meilleure voiture de course d’avant-guerre, avec un palmarès long comme le bras.

    Le logo rectangulaire me fait penser à l’album « Travelling without moving » de Jamiroquai, on retrouve ce logo sur la pochette, avec un petit Jay Kay à la place du cheval. Ce qui n’a pas plus à Ferrari, qui avait envisagé d’intenter un procès au chanteur. Ce dernier étant client de la marque, les choses en sont restés là.

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