Les enquêteurs du bureau des procureurs se sont rendus au petit matin à son immeuble devant lequel une tenture grise avait été dressée, selon des images diffusées sur les chaînes de télévision japonaises.
Une voiture a quitté les lieux moins d’une heure plus tard, d’après le direct diffusé sur la chaîne Nippon TV. Selon cette télévision privée, M. Ghosn était à bord. Il a été plus tard conduit au centre de détention de Kosuge (nord de la capitale).
Il est « extrêmement rare » qu’un suspect soit ré-arrêté après avoir été relâché, soulignaient les médias locaux.
Sa libération le 6 mars, moyennant le paiement d’une caution d’un milliard de yens (8 millions d’euros), avait déjà surpris. Par le passé, des détentions pour des cas similaires avaient duré beaucoup plus longtemps mais l’affaire Ghosn, de par la notoriété du suspect, a jeté une lumière crue sur le système judiciaire japonais, soulevant des critiques à l’étranger.
« Manœuvre de Nissan »
« Pourquoi venir m’arrêter alors que je n’entravais en rien la procédure en cours, sinon pour me briser ? », a lancé le magnat de l’automobile déchu dans un communiqué transmis à l’AFP et probablement rédigé au préalable. Et d’ajouter: « Je suis innocent de toutes les accusations infondées portées contre moi et des faits qui me sont reprochés ».
Cette arrestation « fait partie d’une nouvelle manœuvre de certains individus chez Nissan qui vise à m’empêcher de me défendre en manipulant les procureurs », a-t-il accusé, reprenant le thème du « complot » brandi dans de précédentes interviews accordées en prison.
Son avocat Junichiro Hironaka s’est lui aussi insurgé contre les méthodes du parquet: « Nous ne comprenons pas pourquoi ils ont besoin de le placer en détention. (…) C’est extrêmement injuste ». Le défenseur tiendra un point de presse à 15h15 heure de Tokyo (06h15 GMT).
Ce nouveau rebondissement dans un interminable feuilleton, qui s’est ouvert le 19 novembre avec l’arrestation surprise de celui qui était alors le tout-puissant PDG de l’alliance automobile Renault-Nissan-Mitsubishi Motors, intervient alors même qu’il avait décidé de prendre la parole pour la première fois depuis sa sortie de prison.
M. Ghosn, 65 ans, avait annoncé mercredi via Twitter, de façon impromptue, qu’il s’exprimerait devant la presse le 11 avril.
« Je me tiens prêt à dire la vérité à propos de ce qui se passe. Conférence de presse jeudi 11 avril », avait-il écrit dans un court message sur un compte certifié, qui, selon une porte-parole, est administré par ses avocats.
« Procès équitable »
Déjà sous le coup de trois inculpations pour déclarations inexactes de revenus sur les années 2010 à 2018, dans des documents remis par Nissan aux autorités financières, et pour abus de confiance, M. Ghosn est désormais sous la menace d’une quatrième mise en examen.
Le parquet le soupçonne d’avoir transféré des fonds de Nissan, pour un total de 15 millions de dollars entre fin 2015 et mi-2018, à une société « de facto contrôlée par lui ».
Sur cette somme, 5 millions ont été détournés, a précisé le bureau des procureurs dans un communiqué. « Le suspect a trahi sa fonction (de patron de Nissan) pour en tirer des bénéfices personnels », a-t-il souligné.
Selon une source proche du dossier, le procédé a débuté dès 2012, portant sur une somme totale de plus de 30 millions de dollars versée à un distributeur de véhicules Nissan à Oman, montants dont une partie lui serait revenue indirectement.
Il aurait notamment acheté un yacht et investi dans une société dirigée par son fils aux Etats-Unis.
Des flux financiers similaires ont été signalés la semaine dernière par Renault à la justice française, à l’issue d’une enquête interne du constructeur qui s’interroge aussi sur des dépenses opaques au sein de la filiale commune avec Nissan, RNBV, basée aux Pays-Bas.
Une enquête a déjà été ouverte sur le financement du mariage de Carlos Ghosn au château de Versailles en octobre 2016.
Au Japon, la date du procès n’a pas été fixée. Ses avocats ont déposé cette semaine une requête au tribunal pour que l’ex-patron soit jugé séparément de Nissan, qui, bien qu’étant aussi inculpé sur un des volets, « a pris depuis le début le parti des procureurs », selon Me Hironaka.
« Mon plus grand espoir aujourd’hui est de pouvoir bénéficier d’un procès équitable », a confié M. Ghosn.
Le dirigeant franco-libanais-brésilien espère être blanchi après avoir été dépouillé de la présidence des trois constructeurs qu’ils avaient unis et hissés au premier rang mondial.
Nissan, qui a encore une fois jeudi évoqué « des preuves substantielles d’un comportement ouvertement contraire à l’éthique », se prépare à tenir lundi une assemblée générale extraordinaire d’actionnaires. Le mandat d’administrateur de M. Ghosn devrait être révoqué, coupant tous ses liens avec l’entreprise qu’il a naguère sauvée de la faillite.
Par AFP
Il faut tuer le colonel Ghosn
Mise en scène : Hiroto Saikawa
Production : Nissan
Il faut le faire taire, ou le discréditer avant sa conférence de presse…
lors de la 1ere accusations aussi, basée sur les enquêtes internes, la solidité des preuves était si substantielle qu’au bout de la 1ere garde à vue (de 3 semaines quand même!!), il avait fallu trouver une autre accusation pour prolonger sa détention…
Ce n’est qu’une garde à vue, pas de la prison ou un procès. Le fait que sa garde à vue ait été prolongée à la suite d’une nouvelle accusation ne veut aucunement dire que les preuves de la première n’étaient pas solides.
une personne est accusée, soupçonnée d’etre un serial killer
si la 1ere enquete sur une victime avait des preuves solides de sa culpabilité, alors il n’est pas nécessaire d’étendre les soupçons à d’autres victimes potentielles pour prolonger sa garde à vue. Direction tribunal, la taule…
je trouve alors étonnant qu’il avait fallu soupçonner Carlos d’autres malversations pour pouvoir prolonger sa garde à vue d’autant de fois…
c’est pourtant de notoriete publique.
N’etant pas capable de reunir suffisemment de preuves pour tourner la garde en vue en proces, apres 3 semaines (duree max legale), ils l’ont relache pour l’arreter de nouveau sur le champ sur de nouvelles accusations.
C’est une pratique connue et reconnue de la justice japonaise qui consiste a, lorsqu’il est difficile de prouver une culpabilite, lacher les accusations au compte goutte pour garder une personne au chaud.
C’est dingue ! Le nombre de choses qu’il n’a pas faites ne cesse de s’allonger 🙂
Donc toi si j’en juge par tes deux messages sur ce fil tu présumes les gens coupables alors que cela devrait être l’inverse.
Sinon pour info, si au japon tu as des preuves substantielles, la personne reste en détention jusu’au procès.
Quand tu multiplies les gardes à vue, cela veut dire que le procureur n’a pas assez de preuves et veut forcer son suspect à avouer et signer une confession.
Honnêtement, je ne connais pas le système judiciaire japonais. Et toi, probablement pas vraiment plus (un article lu ici où là, ça ne compte pas, sinon moi aussi, je suis un expert). Mais je suis sur qu’il est incorrect d’affirmer que :
– Il n’y a absolument rien contre lui, car on en sait rien
– Il est coupable, car on en sait rien non plus, et en plus, c’est contraire au droit français qui dit qu’on doit respecter la présomption d’innocence (même pour quelqu’un soupçonné à l’étranger)
Bref, j’aime bien les messages ironiques, oui, mais j’ignore de quoi il est réellement coupable, s’il est coupable de quoi que ce soit.
Et toi aussi, 🙂
Il n’est surement pas tout blanc. Mais il y a tout de meme quelque chose qui ne va pas du tout.
Le fonctionnement de la justice japonaise est risible, a la limite honteux. Ghosn n’est pas le premier a le subir.
Ce que ne dit pas l’article, par exemple, c’est qu’a cette nouvelle arrestation de Ghosn, sa femme, presente a ce moment, s’est vu son passeport et son telephone confisque, alors qu’elle n’est en rien suspecte (du moins dans aucun des documents de la justice japonaise).
C’est purement et simplement illegal.
Tout comme le principe de presumer les gens innocents, principe de base de la justice (du moins occidentale), totalement absent du systeme judiciere japonais. 99% des gens passant par un proces sont inculpes… ca ne vous faire pas tilter tout de meme??
Dommage, personne n’a defendu Frederic pierucci balancé par Alstom pour proteger le PDG.
https://www.usinenouvelle.com/editorial/frederic-pierucci-sacrifie-par-alstom-instrument-de-ge.N795725
C’est ce qu’on appelle la guerre economique.
Les generaux prennent cher (Ghosn), une pensée pour les sous lieutenant (F.Pierucci) et une pensée aux soldats d’en bas..
Mais c’est qu’à force de surjouer à ce petit jeu juste parce qu’ils ne veulent pas que Nissan soit gobé par Renault, la justice japonaise va finir par nous rendre Ghosn sympathique ptdr
j’adore ce mec. Des caricatures comme ça, on a peine à imaginer que ça existe.