Škoda, pour beaucoup, c’est encore les 110/120 ou la Favorit : des voitures cubiques, terminées un vendredi à 16h55. D’où la surprise en découvrant cette Felicia toute en rondeurs et en chromes. Eh oui, Škoda, ça a aussi été ça…
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Redémarrage difficile Montée en gamme Felicia |
Arme de séduction massive
La Felicia, c’est avant tout une bouille craquante. Elle reprend les codes des américaines, mais en miniature. Comme les Auto-Union 1000 SP ou Simca (Sport) Plein Ciel/Océane. « Miniature » est bien le mot, car la Felicia ne mesure que 4,07m de long, 1,6m de large et 1,38m de haut. Et pourtant, à l’époque, c’est une voiture de milieu de gamme. La toute première Felicia que j’ai vu, c’était à Cuba. Elle était garée en épi à côté d’une Chevrolet Impala contemporaine. Le contraste en terme de dimensions était incroyable.
On est à mille lieu de l’austérité qui prévaut alors en Tchécoslovaquie. Les stylistes se sont visiblement fait plaisir. Parmi les nombreux détails, on note ce joli « Felicia » chromé à l’arrière.
Esthétiquement, la Felicia est dans le coup, en 1960. Mais techniquement… Les voies étroites et le porte-à-faux avant inexistants trahissent l’âge des dessous. En effet, c’est une lointaine descendante de la Popular de 1934. D’où un châssis séparé, étiré au fil des modèles et des roues arrière motrices. C’est pour ça que le constructeur n’a pas eu trop de mal à la transformer en cabriolet : la rigidité est assurée par le châssis. Alors qu’à la même époque, la Mini dispose d’une caisse monocoque et d’un moteur transversal qui entraîne les roues avant.
Spartade
Pour rester dans le thème américain, elle dispose d’une banquette à l’avant, mais avec des dossiers séparés. Officiellement, la Felicia est « un cabriolet 4/5 places ». En sortant le chausse-pied, on doit bien pouvoir caser quatre Richard Hammond à l’intérieur. Par contre, Teddy Riner serait obligé d’enlever la banquette avant.
Dans les années 50, l’équipement des voitures est plutôt spartiate. Alors dans les pays de l’Est… C’est bien simple, il n’y a rien ! Même pas la condamnation centralisée. Les vitres sont à manivelle. Elle dispose d’un pré-équipement radio. Au moins, dans les embouteillages, vous pouvez jouer avec les réglages. Le levier de vitesse est sur la colonne de direction ; les commodos sont au centre. Škoda n’a pas jugé utile de graver la moindre indication ou le moindre pictogramme. De toutes façons, les phares et les essuie-glaces ne font pas grand chose. Idem pour le frein à main (une canne, sur le côté gauche, comme sur les Porsche 356.) Elle se capote et décapote facilement. Par contre, la capote n’a pas d’armature et il faut donc manœuvrer vitres fermées (sinon, vous risquez d’assommer votre passager.) Et bien sûr, le tissu n’est pas imperméable.
En bref, il faut l’apprécier uniquement de jour, par beau temps.
Na cestě
Visiblement, les ingénieurs tchécoslovaques avaient une confiance limitée en leur mécanique. En effet, le capot est équipé d’un pantographe pour le maintenir ouvert, sans vérin, ni tirette. De quoi permettre de bricoler à l’aise. Alors que le coffre doit se contenter d’une petite tige.
Pourtant, le bon vieux 1,2l a la réputation d’être increvable. Ses concepteurs en tirent 55ch, avec un seul carburateur et sans suralimentation. C’est autant que le 1,3l Flash des Simca contemporaines, alors que les Français ont davantage de moyens et un moteur plus moderne. La Felicia est équipée d’une boîte à quatre rapports, avec grille en ʞ. La première est plutôt rétive. Heureusement, il est possible de démarrer en seconde, voir en troisième !
L’avantage de son châssis antédiluvien, c’est que la Felicia possède une bonne garde au sol. Les nids de poule et autres dos d’âne sont une rigolade. Elle pourrait donner des leçons de franchissement à nombre de SUV modernes. D’autant plus que le confort en « tout chemin » est bluffant. Y compris pour les standards actuels.
Pour le reste, la Felicia est peu adaptée à la circulation actuelle. Il n’y a pas de ceintures, les sièges n’offrent aucun maintien et l’unique rétroviseur extérieur ne sert à rien. Le clignotant ne fait pas de bruit et il ne s’arrête pas lorsque vous revenez en ligne droite. La jauge à essence est agitée de tremblements qui s’accentuent lorsque la voiture roule. Quant au klaxon, il est asthmatique. Evidemment, la direction n’est pas assistée. Il faut de bons biceps pour faire un créneau ! De façon générale la Fecilia se montre assez floue. Il faut donner de petits coups de volant pour aller tout droit. Enfin, les quatre tambours ralentissent à peine les 890kg de l’ensemble. Il faut anticiper les ralentissements… Heureusement, les automobilistes sont plutôt indulgents face à une voiture aussi mignonne.
Hélas, le moteur a un souci. Du coup, elle atteint péniblement 70km/h en pointe. Alors qu’elle revendique 125km/h. Après un bruit façon « Darth Vader vient de courir un 100 mètres », le 1,2l s’éteint à un feu rouge et refuse de repartir. C’est terminé. La Felicia rentre en dépanneuse. Snif.
Conclusion
Avec trois bouts de ficelle, les Tchécoslovaques ont créé un cabriolet offrant des prestations acceptables pour l’époque. Et ce malgré une base technique archaïque. On ne peut que tirer un coup de chapeau à Škoda. Dommage que depuis, le constructeur n’ait pas produit d’autres cabriolets.
La Felicia n’est plus du tout adaptée au trafic actuel. C’est une voiture à sortir durant les beaux jours, pour une balade ou pour une réunion d’anciennes.
Et si vous en vouliez une ? Il en existe trois recensées en France. Il faut donc cibler le marché européen. Grâce à son très joli minois, la Felicia est très demandée. Le prix de vente peut varier de 3 000€ à 12 000€ et à peine l’annonce publiée, la voiture est vendue. Soyez donc à la fois patient et à l’affût…
Crédit photos : Joest Jonathan Ouaknine/Le Blog Auto