Elle a un nom long comme un train mais elle pourrait tenir dans l’empattement d’une Audi A8 W12 de dernière génération. Un peu moins de trois plaques d’immatriculations suffisent à définir sa largeur. Elle se rapproche plus d’un Vespa que d’une voiture, c’est vieux, inconfortable et pourtant, elle sait délivrer, à sa manière, des sensations. Séquence nostalgie.
Le style et vie à bord :
Quadragénaire, la Fiat 126 étonne encore avec ses dimensions aux portes du monde des jouets. Entre temps, La Smart Fortwo a jeté un pavé dans la mare, mais ses 3,10m de long, 1,38m de large et 1,33m de haut qui suffisent à la former sont toujours étonnants. Elle respire les années 70, l’époque où les designers concevaient une auto avec une règle et une équerre. C’est tout carré, à l’opposé de sa sœur, la Fiat 500, qui affichait quelques rondeurs. Le petit capot qui abrite le coffre et la partie arrière avec son angle de 45° encadrent une modeste bulle qui accueille les passagers. Complètement dépouillée, la planche de bord top moumoute embarque le minimum vital. Le compteur de vitesse ouvre la marche avant de laisser la place aux commandes d’éclairage et à un autoradio qui permettra au passager de se transformer en DJ.
La Personal 4 voit le jour en 1976. Elle s’équipe alors de boucliers plus enveloppants en plastique noir tandis que l’intérieur adopte une présentation un peu plus cossue. Premier constat : son nom est on ne peut plus caractéristique ! La réalité fera qu’elle sera plus personnelle que familiale, comme le laisse supposer son nom. Les places arrière ont le mérite d’être présentes pour la gloire (et donc un parfait complément du volume de chargement) tandis que les places avant permettront aux passagers d’être intimes, épaule contre épaule.
Sur la route :
La phase de démarrage oblige à croiser les doigts. On met les clés dignes d’une boîte aux lettres dans le neiman, on tire la commande de gauche au niveau du plancher pour le starter puis on passe à celle de droite pour le démarreur et là, on attend. Le temps nécessaire à une Ferrari F430 pour effectuer le 0-100km/h devrait vous suffire pour lancer le bicylindre à plat dans un concert de grouinements. Situé en porte-à-faux arrière, ce 654cm3 développe quelques 24 chevaux. Nul besoin de faire un chapitre sur cette mécanique, tant il est aisé d’imaginer que les capacités d’accélération et de relance sont quasi-inexistantes, voir effrayantes. Autoroutes et autres voies rapides sont à proscrire.
Une fois que la première vitesse a été trouvée grâce au levier, la Fiat 126 s’élance. Alors que cette boîte de conserve (quid de la protection des passagers en cas d’accident ?) s’ébroue sur les premiers mètres, le bruit commence à se faire ressentir à l’intérieur. Toutefois, l’impression d’être dans une machine à laver à tambour s’atténue au fil des quatre pignons de la boîte de vitesses. A propos de tambours justement, il y en a quatre qui se logent à l’intérieur des roues de 12 pouces. En 2012, le toucher de la pédale est déroutant et il arrive que l’on se demande si les freins fonctionnent tant les capacités de décélération sont médiocres. La notion d’anticipation prend ici tout son sens.
Vous vous en doutez, le confort est complètement sommaire. Assis sur des ressorts, vous passerez de longues heures à vous battre avec la ventilation réglée au petit bonheur la chance. Une tirette permettra de diriger l’air sur les pieds ou sur les genoux via les deux orifices centraux, tandis qu’une autre vous donnera le choix entre froid et tiède. Il va vous falloir vous habituer aux « Papa j’ai froid » à répétition.
Les suspensions n’arrangent rien. Trop fermes, elles vous secouent dans tous les sens à la moindre irrégularité ou au simple passage sur un ralentisseur. Sur ces derniers, la secousse du train avant est à peine passée que l’arrière vous gratifie d’une claque dans le dos. Merci à l’empattement court. Mais en virage, les suspensions ont cette effrayante habitude de se transformer en pompes à vélo. Il y a bien un semblant de tenu de route en entrée de courbe, mais l’effet s’estompe au fil des mètres parcourus. Ça tangue et ça bouge. Serrage de fesses doublement assuré grâce à l’arrière train qui a une fâcheuse tendance à délaisser son grip sur le mouillé.
La rétrovision est quasi inexistante. Le seul rétroviseur extérieur tient du miroir de courtoisie fétiche de madame alors que celui d’intérieur n’englobe même pas l’intégralité de la lunette arrière. Quand vous vérifiez vos angles morts, profitez en pour jeter un œil derrière vous.
Enfin (un point fort), la direction est plutôt directe et légère, et se révèle généreuse en remontée d’informations. Les aspérités de la route sont correctement retransmises et on sait où les roues se trouvent sur la chaussée. Mais un simple regard sur les passages de roue intérieurs permettra de savoir où ses galettes se situent sur la route.
Verdict :
En devenant Personal 4 650, la Fiat 126 se veut familiale et un peu plus performante qu’une version classique. En revanche, au 21eme siècle, la véritable place de cette voiture se situe dans un garage ou sur une place de parking lors de rassemblement d’automobiles de collection. Sa conduite renvoie directement au monde du deux roues : avare en passagers, une instrumentation dérisoire, une anticipation du freinage nécessaire, une rétrovision qui implique directement le conducteur et des virages à prendre avec la plus grande circonspection sur le mouillé, auquel s’ajoutent spécifiquement des commandes mécaniques floues. A la manière d’un dictateur, elle oblige le conducteur à faire corps avec la machine. C’est dépouillé, il y a du bruit, ca vibre, ca bouge… Un véritable pot de yaourt brassé nature. Les sensations délivrées par la 126 sont d’une autre époque et malgré ses points noirs, elle vous colle un sourire comparable à un gamin sur son premier vélo. Hors agglomération elle devient presque suicidaire à côté des 38 tonnes ou autres grosses cylindrées, mais en ville elle est impériale. Elle se faufile à travers les voies piétonnes autorisées aux engins motorisés, se gare n’importe où (oubliez quand même de chevaucher les trottoirs) et du fait de son gabarit, de son époque et de sa relative renommée, son capital sympathie auprès des piétons (notamment des jeunes étudiantes) atteint un niveau plus qu’appréciable.
Comme ses consœurs italiennes à moteur arrière, elle réussit haut la main l’exercice des sensations et de la personnalité.
La galerie complète :
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