Le blog auto a déjà essayé une Datsun Fairlady Sport et une Nissan 300ZX. Il semblait logique de tester celle qui vint entre les deux, la « S30 ». Voici donc une Datsun 240Z de 1971. Et pour commencer, un petit historique des « Z ».
My Fair Lady
La genèse de la 240Z n’est pas claire.
Pour les uns, c’est Yutaka Katayama (en charge de la filiale US) qui est à l’origine du projet. Il était persuadé (après avoir vu la Mustang ?) qu’il y avait un marché pour un coupé deux places de moyenne cylindrée. Il se rendit au siège de Nissan et sa démonstration fut si convaincante qu’une équipe fut détachée au projet.
Pour d’autres, il existait déjà un projet de coupé deux places, mais réservé à l’archipel. Le talent de « Mr K » fut d’avoir persuadé la direction de l’exporter.
De même, qui est le « père » de sa ligne ? Le nom d’Albrecht von Goertz fut longtemps avancé (afin de mettre un « grand nom occidental » sur la carrosserie ?) Aujourd’hui, on l’attribue à Yoshihiko Matsuo. Néanmoins, von Goertz a travaillé chez Yamaha comme consultant sur un projet de coupé destiné originellement à Nissan mais mort-né, qui a donné plus tard la Toyota 2000 GT (en fait dessinée par le styliste de Toyota Satoru Nozaki) Le fait est qu’il y a plus qu’un air de famille entre les deux coupés japonais, surtout de profil…
Une fois le feu vert donné, rien n’est trop beau pour la 240Z. Le 4 cylindres de la Laurel est transformé en 6 cylindres 2,4l (d’où le « 240 ».) Gavé par deux carburateurs Hitachi (des copies de SU), il développe 150ch. On parle d’une vitesse de plus de 190km/h (le 201 km/h « usine » est un peu optimiste.) Des chiffres de premier plan, pour 1969.
Kaboom !
La 240Z apparut pour le millésime 1970. A l’époque, Datsun n’était encore qu’un petit constructeur exotique aux USA (et il est carrément inconnu en Europe.) Katayama devait sortir l’artillerie lourde. Et il avait un argument de poids : 3 500$. 200$ de moins qu’une MG B et son 4 cylindres 95ch. 1000$ de moins qu’une Volvo 1800 S 115ch.
A ce prix là, ce fut la bousculade en concession ! Les premières 240Z n’arrivèrent qu’à l’automne. Nissan tablait sur 1 600 ventes annuelles… Et il en vendra près de 10 000 au 31 décembre ! L’usine d’Hiratsuka dut augmenter la cadence. Le roadster Fairlday Sport fut sacrifié pour libérer de la place. 2 500 voitures franchissaient le Pacifique chaque mois. Katayama se lamentait qu’il pourrait en écouler 4 000, malgré un réseau famélique.
Peter Brock engageait déjà des Fairlady Sport en endurance. Son équipe BRE fit donc la transition vers la 240Z. Il aligna même une voiture à la Baja 1000 ! Mais son plus gros succès, c’est au Safari Rally. Le local Shekar Mehta s’imposa en 1971 et en 1973, démontrant la fiabilité de la voiture. Cela permit aussi de faire connaitre Datsun en Europe. On compare alors la 240Z à la Honda S800 : une voiture japonaise performante, fabriquée par un constructeur dont on n’avait jamais entendu parler. Nissan participe à d’autres rallyes mondiaux, sans s’imposer. En parallèle, les Anglais de Samuri préparent des voitures privées destinés aux rallyes et aux courses de côte nationales.
260 Z
En 1974, l’état Américain imposa des normes antipollution. Le catalyseur asphyxiait le 6 cylindres, qui passa du coup à 2,6l. Mais la grosse évolution, ce fut surtout l’allongement de l’empattement. La 2 places devint une 2+2.
Au Japon, la 240Z mène une carrière en GT. Nissan y propose un avant profilé, dit « shark nose » ou « long nose ». Aux 24 heures du Mans 1972, on vit apparaître brièvement une 240Z. En 1975, une voiture « française » débarque, engagée par André Haller, alors concessionnaire Datsun en Alsace. C’était une « shark nose » japonaise, passée par l’Afrique du sud. Il était accompagné du préparateur Hans Schuller et de Benoit Maechler (ancien de la Formule Bleue.) Malgré le manque d’expérience, le trio termine 26ème. Pour 1976, Haller revint. Pour des raisons commerciales, la 240Z fut renommée « 260Z ». Il recruta Claude Buchet, qui avait plusieurs 24h au compteur, et Luc Favresse. Le soir, Haller perdit le contrôle et mourut sur le coup. Il reste l’homme de la première présence de Datsun/Nissan au Mans.
En 1976, les normes US devinrent encore plus contraignantes. Cette fois, le 6 cylindres passa à 2,8l. En Europe, il développait 170ch, alors qu’avec le catalyseur, la puissance s’effondra à 140ch (autant que la 260Z US.) Notez qu’au Japon, la 260Z poursuivit son chemin. Toutes les « S30 » s’y appelaient « Fairlady Z », quelle que soit leur cylindrée.
280 ZX
En 1979, la 280Z subit un profond lifting. La 280ZX reçut une carrosserie inédite, plus aérodynamique, et un nouvel intérieur. L’accent fut mis sur le confort et l’équipement. Elle était proposée en version 2 places (avec l’empattement de la 240Z) ou en 2+2 places (avec l’empattement des 260Z et 280Z), en coupé ou en T-top. En France, elle était uniquement disponible avec le 2,8l atmo à injection (140ch, puis 150ch.) Une poussive version 2l atmo était réservée au Japon, alors que le 2,8l turbo catalysé (140ch !) était l’apanage des USA. Notez qu’aux USA, elle reçut successivement des badges « Datsun by Nissan », puis « Nissan ». Tandis qu’en France, « Datsun » fit un peu de résistance.
Toujours aux Etats-Unis, le team BRE s’est perdu dans un ruineux programme F2. Nissan décide de s’impliquer en direct en IMSA. Les 280ZX (de vrais « silhouette ») sont le point de départ d’un aventure qui passera par les Nissan GTP, puis les protos 300ZX…
Malgré tout, les temps ont changé. Même avec de gros pare-chocs en plastique et une peinture dorée (!), la 280ZX accusait le poids des ans. L’heure était au profil « cale de porte » avec phares sous trappes. En prime, ses compatriotes Mazda et Toyota avaient réagi avec des RX-7 et Celica Supra très ambitieuses…
Epilogue
En 1983, la 300ZX (dite Z31) entrait en scène. 300 000 240Z/260Z/280Z/280ZX étaient sorties de chaine ; bien au-delà des rêves les plus fous de Nissan. Le rapport de force s’était inversé : les Japonais étaient désormais les rois du coupé de moyenne cylindrée. Les Anglais étaient au tapis. Enfin, la voiture a permis de faire connaitre le constructeur. Surtout en Europe.
A la fin des années 90, Nissan est au plus mal. C’est un tout jeune Carlos Ghosn qui le force à développer une nouvelle « Z ». La maladroite 240Z concept de 1999 a un certain succès. Néanmoins, Ghosn voulait davantage de personnalité et la fit remodeler. Cela donna la 350Z de 2003, mais c’est une autre histoire…
Crédits photos : Nissan, sauf photos 1 à 3 (Joest Jonathan Ouaknine/Le Blog Auto) et photo 7 (Chicago Auto Show)
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