Pour être tout à fait précis, la très rare XJ220 était capable en son temps de rouler plus vite en pointe, mais pas sur la Nordschleife, 7’39 » pour la F-Type R contre 7’46 » pour la XJ220. Au delà de la hausse de puissance, le Coupé R améliore par ailleurs tous ses paramètres mécaniques avec pour la première fois, des freins en carbone – céramique proposés en option (chère) tandis que le différentiel électronique est appuyé par un inédit système de Torque Vectoring, et que les suspensions ont droit à un calibrage spécifique et adaptatif.
Nous quittions donc notre V6S en arrivant au circuit de Motorland Aragon, pour grimper dans l’une de ces F-Type R équipées de freins carbone-céramique. Comme premier contact avec ce nouveau coupé V8 R réputé si méchant, il fallait avant tout apprendre le circuit sur les quatre premiers tours de piste…au terme desquels un véritable déluge est venu noyer la piste. Impossible de poursuivre dès lors et se rapprocher des limites de l’auto (drapeau rouge), nous avons seulement déconnecté toutes les assistances de pilotage pour chercher à la faire glisser à faible vitesse en sortie de virage sur la chaussée saturée en eau, juste pour voir. Et comme mon niveau de pilote n’a strictement rien à voir avec celui de Chris Harris, les tentatives se sont pour la plupart soldées par des têtes à queue et autres coups de raquette ridiculement mal maitrisés, dès le simple petit filet de gaz entretenu avec le volant encore braqué. Mon pilote accompagnant me remontait le moral en insistant sur le fait que dans ces conditions extrêmes, les 550 chevaux et 680 Nm imposent une finesse de préhension particulière sans béquilles électroniques. Certes, l’exercice de glisse contrôlée semblait naturellement beaucoup plus difficile que sur le sec. Mais à cet instant précis, ce Coupé R me paraissait franchement radical dans son comportement. Même si sur le peu de temps que j’avais eu sur piste sèche, elle laissait entrevoir une relative docilité malgré de copieuses performances.
Méchante oui, mais pas perverse
Le lendemain, nous reprenions le Coupé V8 R pour l’essayer cette fois sur la route. Première confirmation lors de la première accélération : quelque soit le moteur, la F-Type Coupé réalise le tour de force d’augmenter encore l’intensité sonore à bord à pleine charge par rapport au Roadster, qui était pourtant déjà très communicatif sur ce plan. Deuxième confirmation, cette V8 R développe un niveau de performances encore un cran au-dessus du Roadster V8 S. La poussée ressentie est au niveau d’une supercar comme la R8 V10 Plus ou une SLS GT, avec une bande sonore très proche de cette dernière. Il n’y a plus rien à voir avec la V6S, reléguée dans un autre monde en matière de performances pures et de violence mécanique mais ça, on s’en doutait. La vraie surprise, c’est en fait le comportement de la bête.
Après quelques kilomètres où le train arrière se distinguait souvent par sa mobilité en pleine accélération sur les premiers ou seconds rapports, je décidais de désactiver toutes les aides à la conduite pour vérifier à quel point la bête pouvait se montrer fougueuse au naturel, lâchée sur une route d’arrière pays au tracé de rêve. Là, le rythme augmentait en même temps que mon niveau de sudation corporelle. Convaincu de la dangerosité de cette auto présentée comme une bête cruelle dans la pub du SuperBowl, je m’attendais à un rodéo sauvage et impossible à maitriser pour le conducteur moyen. J’avais tort.
Au fil des kilomètres puis des centaines de kilomètres, la relative facilité de l’auto laissée sans béquille électronique est étonnante. Certes, on est bien au volant d’un engin aux capacités de dragster qui laisse volontiers de la fumée sur le tarmac à la moindre accélération généreuse sur les premiers rapports, mais on se sent en sécurité même lorsque l’on hausse franchement le rythme. A condition de respecter les bases de la conduite sportive, on peut se rapprocher peu à peu d’une forme de plaisir pur impossible à imaginer durant un tête à queue sous la pluie. Malgré la puissance et le couple, le train arrière est finalement rarement débordé et le comportement dynamique est assez différent du Roadster V8S. Le train avant semble plus précis et surtout, il décroche beaucoup moins vite. On n’a plus cette impression de lourdeur et ce sous-virage chronique à la limite, la recalibration du différentiel électronique et le système de Torque Vectoring y sont certainement pour beaucoup.
L’équilibre général contraste nettement avec la brutalité mécanique, les près de 1700 kilos se font oublier et au final, la V8 R se révèle d’une progressivité insoupçonnée. J’avoue avoir rarement vécu un épisode routier aussi frissonnant dans ma vie qu’avec ce Coupé V8 R, méchant mais pas du tout pervers dans sa façon de laisser son conducteur jouer avec le feu. Certes, on n’atteint pas le plus haut niveau d’efficacité ultime comme peuvent le faire une Nissan GT-R ou une Porsche 911 Turbo S sur ce genre de terrain. Certes, la boite de vitesses ZF 8 rapports, très bien réglée en mode automatique, reste perfectible en mode manuel dans certaines phases par rapport aux meilleurs systèmes du marché. Mais en terme de plaisir primal le compteur est au max et au-delà de cet aspect, jamais une Jaguar n’avait été capable de rouler aussi fort -et bien- auparavant. Coté freinage enfin, les grands disques en acier semblent suffire pour quelques virées musclées sur route.
Achetez un V8
Reste à prendre en considération le prix des trois versions proposées sur la F-Type Coupé. Moins cher que le Roadster, le V6 se négocie à partir de 67 400 euros. Nous n’avons pas essayé cette dernière mais on se rappelle que la différence entre le Roadster V6 et le V6S n’était pas très impressionnante au volant. En admettant que l’écart soit à peu près le même entre le Coupé V6 et le Coupé V6S (79 300 euros en prix de base), sans doute est-il possible de se contenter de la « simple » V6 pour profiter de la bande sonore raffinée du six cylindres à moindre coût. Pour le grand frisson mécanique, c’est évidemment le choix V8 R qui s’impose, placé un peu plus cher que le Roadster V8S en tarif (104 800 euros). Une Nissan GT-R encore plus performante se paye moins cher, mais en matière de sensations et de brutalité mécanique il n’y a aucune concurrence à moins de doubler ce prix pour passer à une Mercedes SLS GT. Dans le genre V8 qui gronde il y a bien la nouvelle Corvette C7 mais en terme de polyvalence et de distinction, la Jag semble hors d’atteinte. Allez, vivement une version Clubsport pour hausser encore un peu le niveau : les Méchants nourrissent généralement de grands desseins…
+ | Style toujours aussi efficace |
Sonorité extraordinaire quelque soit le moteur | |
Performances de la V8 R | |
Caractère de la V8 R | |
Tarif de la V8 R au regard de la concurrence | |
– | Poids étonnant |
Tarification de la V6S moins intéressante ? | |
Largeur parfois compliquée sur route | |
Boite pas au niveau d’une double embrayage en mode manuel |
Jaguar F-Type Coupé | ||
V6S | V8R | |
Motorisation et transmission | ||
Moteur – Type | 6 cylindres en V
Compresseur |
8 cylindres en V
Compresseur |
Carburant | Essence | Essence |
Cylindrée (cm3) | 2995 | 5000 |
Puissance (kW / ch @ tr/min) | 280 / 380 @6500 | 405 / 550 @6500 |
Couple (Nm @ tr/min) | 460 @ 1500 | 625 @ 2500 |
Boîte de vitesse – Type | Automatique | Automatique |
Nombre de rapports | 8 | 8 |
Roues motrices | Arrière | Arrière |
Performances | ||
0 à 100 km/h (sec.) | 4,9 | 4,2 |
Vitesse maximale (km/h) | 275 | 300 |
Consommations | ||
Cycle mixte (l/100 km) | 9,1 | 11,1 |
Emissions de CO2 (g/km) | 213 | 259 |
Dimensions | ||
Longueur (mm) | 4470 | |
Largeur (mm) | 1923 | |
Hauteur (mm) | 1309 | |
Empattement (mm) | 2622 | |
Poids (kg) | 1594 | 1665 |
Volume de coffre (l) | 196 | 324 |
Réservoir (l) | 72 | 72 |
Crédit photos : Cédric Pinatel/le blog auto sauf 1-Nicolas Meunier 2-Jaguar France
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