La direction de l’équipementier automobile Barre Thomas (ex-CF Gomma) de Rennes a convoqué un CE extraordinaire le vendredi 16 mars pour annoncer un projet de restructuration, qui concernerait selon les syndicats 309 emplois sur les 1.650 salariés que compte l’entreprise.
Ce plan intervient moins d’un an après la reprise du site, en juillet 2006, par la Société des Polymères Barre Thomas, à la suite du placement en redressement judiciaire de C.F Gomma – fabriquant des pièces en caoutchouc pour l’industrie automobile – en décembre 2005.
Les suppressions d’emplois qui seraient dûs à une baisse d’activité importante de 26 % concerneraient « 187 ouvriers de fabrication, et 122 dans les secteurs technique et administratif, soit 19% des effectifs, et devraient s’étaler jusqu’à avril 2008 », a indiqué Dominique Martin, du syndicat FO (majoritaire).
Pour rappel, la direction de l’usine CF Gomma de Rennes avait annoncé en décembre 2005 à ses 2.000 salariés qu’elle avait déposé le bilan. Au mois d’août 2006, l’entreprise avait dû gager une partie de ses stocks pour obtenir des banques un prêt de dix millions d’euros. Mais les problèmes de trésorerie sont apparus au grand jour, quand, début novembre, le paiement des salaires d’octobre s’est effectué avec plusieurs jours de retard.
Après son rachat en 1999, par CF Gomma, l’entité rennaise avait, en effet, dû s’endetter pour acquérir une usine polonaise à Czestochowa qui emploie à présent plus de 1 000 ouvriers. En 2003, la direction de la Barre-Thomas avait dû en effet, sur demande de la direction du groupe, racheter pour 36 millions d’euros une usine du groupe Gomma située en Pologne. Le directeur financier de la Barre-Thomas aurait été licencié en 2004 pour n’avoir pas voulu cautionner cette opération financière représentant un important transfert d’argent de Rennes vers la direction du groupe. La direction vient cependant de céder la plus ancienne des deux usines de Czestochowa en Pologne à l’ancien actionnaire italien.
L’usine appartenait auparavant au groupe PSA Peugeot-Citroën, qui demeure d’ailleurs son client presque unique. CF Gomma fournit en particulier les équipements caoutchouc de l’usine PSA de Rennes La Jannais. Celle-ci, dédiée aux véhicules haut de gamme de Peugeot et Citroën, représente 95% des ventes de l’usine Barre Thomas.
Le 12 juillet 2006, le tribunal de commerce de Nantes a désigné le fonds d’investissements anglo-américain Silver Point comme repreneur de l’usine, comme le souhaitaient les syndicats. Le tribunal a ainsi écarté le plan de continuation proposé par le groupe italien Pugliese, spécialisé dans l’électronique et entré fin février dans le capital du groupe CF Gomma.
Tel qu’annoncé alors … l »offre de Silver Point aurait du permettre de garder la totalité des salariés de CF Gomma à Rennes, soit 1.650 personnes. Le nouvel acquéreur est un fonds d’investissement créé en 2002 par Robert O’Shea et Edward Mulé (des anciens de Goldman Sachs). Il pratique l’achat puis la revente de sociétés après restructuration. Le tribunal a toutefois obtenu du nouveau propriétaire qu’il s’engage à ne pas revendre C FGomma avant au moins cinq ans.
Mais dès la reprise de la Branche Thomas en juillet 2006 , la société envisageait néanmoins la nécessité de procèder à un plan de restructuration. “L’évolution négative du chiffre d’affaires, due à la faiblesse du carnet de commandes, à l’évolution du prix des matières premières et aux perspectives du marché automobile confortent malheureusement l’analyse faite mi juin 2006″ explique désormais sans confirmer les chiffres, la direction dans un communiqué. Le chiffre d’affaires devrait s’établir à 185 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2007 contre 205 millions d’euros en 2006.,
« On savait dès la reprise de la Barre Thomas , par Silver Point que 400 emplois étaient menacés, mais on ne pensait pas que ça arriverait si vite » précise pour sa part Dominique Martin (FO). La CFTC estime quant à elle que l’objectif de la direction serait de rapidement diminuer les effectifs afin de rentabiliser au plus vite l’entreprise. Mais selon le syndicat, cette 2eme restructuration risque d’être beaucoup plus grave que la 1ere car les départs volontaires seront moins nombreux tandis que la « solution » des départs en pré-retraites a d’ores et déjà été utilisée précédemment.
D’après les premières estimations , ce plan risque de contraindre plus de 200 salariés au licenciement sec … Lors du précédent plan , une mobilisation de 150 salariés a permis de sauver 31 postes. La CFTC estime pour sa part qu’il faudra redemander au département et à la région de participer financièrement à l’accompagnement des départs.
La CGT se dit « dégoutée“ quant à elle par ce nouveau plan de licenciements, alors que l’on demande aux salariés de venir ce mois-ci effectuer 2 séances supplémentaires et obligatoires. Une des raisons invoquées par la direction est le manque de nouvelles commandes de PSA. Toutefois la CGT laisse sous entendre que la politique de la direction serait diminuer les effectifs stables, alors que 65 intérimaires seraient présents dans l’entreprise actuellement et peut-être plus dans les mois à venir, selon elle. Pour le syndicaliste Dominique Martin, « le seul salut pourrait venir de PSA qui nous aiderait à tenir jusqu’à l’obtentions de nouveaux marchés ».
Mais à entendre les réactions des salariés pour le moins abasourdis par la nouvelle, la plupart s’y attendaient. Plusieurs égratignent l’actionnaire, Silver Point, tous rappellent l’impasse actuelle de l’industrie française : « On ne voit plus que des suppressions d’emplois, partout : Alcatel, Airbus… Cette fuite du travail à l’étranger devient inquiétante », résume une employée. « Vu la crise du secteur automobile, les salariés de La Barre Thomas ne seront pas les derniers à trinquer, ajoute un technicien. Comment voulez-vous qu’on s’imagine retrouver un poste similaire dans le futur. »
Sources : AFP, Ouest France
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