Autoroutes : le Sénat pour une remise à plat sans concession

Pour un partage équitable des profits futurs

Dans un rapport présenté en fin de semaine, une commission d’enquête du Sénat appelle les concessions autoroutières à « partager équitablement les profits futurs avec l’Etat et les usagers ».

La cession au secteur privé faite un peu trop légèrement ?

Le rapport de la commission constate par ailleurs que « la cession des sociétés concessionnaires d’autoroutes au secteur privé n’a été précédée ni d’une révision des contrats de concession, ni d’une définition de l’équilibre économique et financier des concessions ni d’une révision des relations avec l’État concédant. » Un constat sous forme de critiques voire plus  …

Rappelons ainsi à titre d’exemple qu’au terme d’un long bras de fer entre l’État et les sociétés concessionnaires, un accord a été signé le 9 avril 2015 entre ces dernières et les deux ministres compétents de l’époque – Emmanuel Macron pour l’Économie et Ségolène Royal pour les Transports – établissant que pour compenser le gel des tarifs autoroutiers exigé par Ségolène Royal pour l’année 2015, les hausses de tarifs prévues normalement les 1er février de chaque année seraient plus importantes entre 2019 et 2023. Le texte accordant également aux sociétés un allongement de leurs concessions en échange de travaux à réaliser.

Absence de mise en concurrence

Alors que la plupart des autoroutes ont été privatisées en 2006, le rapport pointe du doigt le fait que la durée des concessions ait été « prolongée à plusieurs reprises sans mise en concurrence ».

Une rentabilité « généralement perçue comme trop favorable »

La commission d’enquête s’est également penchée sur « la situation de ces concessions dont la rentabilité est généralement perçue comme trop favorable ». Un dossier qui pourrait progressivement devenir brulant alors que l’arrivée à échéance des concessions accordées il y a quinze ans débutera entre 2031 et 2036.

Des tarifs adaptés  sur les autoroutes ?

La commission d’enquête estime par ailleurs que la – très bonne – santé financière des concessions doit permettre de faire évoluer le tarif des péages. Un élément présenté comme un axe majeur du rapport.

Lequel propose de pratiquer des réductions tarifaires pour les véhicules les moins polluants, poids lourds et véhicules légers, et de prendre en compte les trajets du quotidien.

Les sénateurs préconisent d' »accélérer le déploiement d’une offre d’abonnement sans frais pour les trajets domicile-travail garantissant des réductions tarifaires comprises entre 30 et 50% ».

« On peut faire évoluer les tarifs en fonction des véhicules des trajets quotidiens domicile travail, ça fait partie aussi des sujets qu’il faut traiter », confirme Vincent Delahaye, rapporteur de la commission. Autant de pistes qui pourraient permettre d’avoir « des tarifs plus attractifs pour un certain nombre de pratiques qu’on pourrait qualifier de vertueuses. »

Pour une amélioration du service rendu

Le rapport exhorte également les sociétés autoroutières à « négocier une amélioration du service rendu aux usagers compte tenu de la rentabilité élevée des sociétés de concession ». En gros, offrir aux conducteurs un service – voire une qualité de services ? – à la hauteur du prix payé …

Pour une remise à plat du cadre de gestion des autoroutes

Si la commission d’enquête préconise certes d’aller au terme des concessions, elle est toutefois d’avis de ne plus prolonger leur durée ». Objectif : « pouvoir remettre à plat le cadre de gestion des autoroutes. le tout en organisant « un sommet des autoroutes », pour « définir enfin l’équilibre économique et financier des concessions ». L’objectif est double précisent les sénateurs : « préparer la fin des concessions » et « anticiper la gestion future des autoroutes ».

Les autoroutes à nouveau dans le giron de l’Etat ?

« La fin des contrats se situe en 2031 et 2036 », rappelle le sénateur Vincent Delahaye, rapporteur de la commission. « C’est suffisamment lointain, la durée du contrat aura été suffisante pour qu’aujourd’hui, on arrête de proroger et qu’on se dise qu’à la fin de ces contrats, il faudra être prêt », martèle-t-il.

Plus encore, il estime que les autoroutes doivent revenir « dans le giron de l’Etat ».

Une rentabilité hors norme

Selon Vincent Delahaye, la rentabilité attendue par les sociétés d’autoroutes est de 8%, ce qui constitue un niveau élevé par rapport à toutes les autres sociétés. Et assez rare pour être souligné …

Plus encore, il précise que ces niveaux de rentabilité sur la durée complète du contrat seront atteintes aux alentours de 2022.

Selon le rapport, qui s’appuie sur une analyse indépendante, la « rentabilité actionnaires attendue » serait atteinte autour de 2022 (soit 16 ans après la privatisation) pour Vinci Autoroutes et pour Eiffage.

Dit plus clairement, cela signifie que la durée de ces concessions serait trop longue d’environ 10 ans .

Au-delà de 2022, les dividendes versés atteindraient environ 40 milliards d’euros, dont 32 milliards pour Vinci et Eiffage. Un chiffre à comparer avec les coûts d’acquisition des sociétés.

(12 commentaires)

  1. Je fais pleinement confiance aux lobbyistes d’Eiffage et Vinci pour arroser ou mouiller suffisamment les décideurs d’ici la fin des concessions, et obtenir non seulement le renouvellement mais surement des conditions encore plus avantageuses. Si besoin, tous les groupes privés de presse, radio et télévision, nous éduquerons pour l’accepter avec le sourire. Ce sont également ces groupes qui ont récupéré les concessions des voies ferrées rentables, avec des contrats encore plus lucratifs. Les actionnaires peuvent dormir tranquilles, la planche a billets n’est pas prête de s’arrêter…

    1. L’histoire continue avec ADP et les barrages hydro.
      Macron régale ses potes !
      A sa décharge, il ne s’en est jamais caché.

      1. @gul : posture facile sans construction intellectuelle de réflexion.
        Taper toujours dans le même sens, c’est si facile même quand on a des contrexemples vivant en face…

  2. les automobilistes ne sont pas les vaches a lait des concessions d’autoroute ,l’état doit les attribués aux régions qui gères déjà les transport ex les TER etc…

    1. Les régions? Ils ont t aucune compétence dans ce domaine et c’est remplie des personnes changeants tous les cinq ans, aucune stabilité, aucune vision à long terme. Laisser ça a des politiques élus sans compétences dans ce domaine c’est pire que tout. Ça finira juste en copinage et magouilles

  3. Alalala les commissions : des gens payés hors de prix pour accoucher de rien du tout. Des mesurettes déjà dépassées tellement ils ont passé de temps à tergiverser

  4. Ce qui n’est jamais dit dans les rapports, c’est que sous tutelle des SEM qui géraient les dites Autoroutes, à l’exception de COFIROUTE (A10 en particulier) ces mêmes sociétés semi publiques étaient quasi déficitaires, sauf Cofiroute qui gagnaient déjà de belles sommes en partie grâce à une gestion économe.
    En clair l’état est en position de perdre de l’argent qu’il n’aurait jamais gagné en étant gestionnaire… mais qu’il peut récupérer grâce aux IS…
    Demain si la SNCF était privatisée façon autoroute, elle dégagerait des marges positives sur pas mal de plans.
    Donc les Sénateurs s’émeuvent d’une situation parfaitement anticipable, avec un côté populiste de taper sur des gestionnaires qu’ils ne sont pas capables de nommer eux mêmes.
    On est donc dans une situation ubuesque où on reproche aux autres ce qu’on n’est pas capable de faire soit même…
    Gérer une autoroute c’est gérer un business… Donc en vendant les concessions avec un soit disant cahier des charges drastiques, on se rend compte que certains y parviennent en y gagnant des billes.
    Usager permanent des dites autoroutes depuis des lustres, je ne vois pas trop de différences entre SEM et les SA actuelles…
    Enfin si, les larges bandes enherbées que la SAprr fauchait à la tondeuse sont maintenant exploitées par un paysan qui y fait du foin….

    1. Cela ressemble surtout à un avertissement à peine voilé d’augmentation de la taxe prélevée par l’Etat tout en menaçant si les concessionnaires augmentent les péages…
      Les usagers ne seront pas gagnants, soyez-en sur 😉

      Les concessionnaires ont augmenter leurs marges de plusieurs manières dont :
      – suppression progressive des péagiers. Qui a vu récemment quelqu’un dans sa guérite au péage ? Perso, le dernier humain que j’ai vu à un péage distribuait des prospectus publicitaires un jour de départ en vacances.
      – travaux effectués par eux-mêmes…les concessionnaires sont des géants du BTP et des routes. On promet un investissement sur telle portion de route pour obtenir une augmentation du péage supérieure à l’inflation et cet investissement va dans la poche du groupe via les travaux.
      – discussion avec l’Etat pour obtenir des augmentations supérieures à l’inflation, mais qui sont pérennisées l’année d’après…alors qu’à chaque fois elles sont prévues pour être exceptionnelles.

      L’état ferait-il mieux ? Sans doute pas. Mais il n’aurait pas non plus la même gestion. On peut parier que l’on aurait encore majoritairement des péagiers (avec des syndicats imposant le maintien de ceux-ci), des travaux gérés par les DREAL sur plusieurs années, etc. 🙂

      1. l’état ne peut pas gérer en direct des routes à péages, il doit constituer un EPIC ou une SEM intermédiaire.
        Seules les routes gratuites peuvent être gérées par les DREAL, et avec difficultés par ailleurs… (Mais c’est une autre histoire, non de gj mais de bonnet rouges)…

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